Bien que souvent douloureuses à court terme et donc impopulaires, les reformes ne conduisent nécessairement pas à la défaite électorale des dirigeants qui les ont instituées, selon une analyse des réformes structurelles et des résultats des élections conduite par le Fonds monétaire international (FMI) dans 66 pays.
ISSA SIKITI DA SILVA
Les politiques qui modifient le mode de fonctionnement des gouvernements – connues sous le nom de réformes structurelles – vont de la réduction des obstacles réglementaires à la concurrence, à l’ouverture au commerce et aux flux financiers, en passant par une flexibilité accrue du marché du travail, souligne le FMI dans son rapport « The Political Costs of Reforms: Fear or Reality? » publié le 18 octobre 2019.
Au Bénin, le gouvernement de Patrice Talon a mis en place des réformes économiques et structurelles pour « maintenir la stabilité économique et promouvoir une croissance économique inclusive, créative d’emplois dans un environnement de paix ».
Alors que les reformes ont été accueillies favorablement par certains milieux économiques et d’affaires, notamment capitalistes, elles ont été et continuent à être systématiquement boudées par l’homme de la rue, qui estime qu’elles ont apporté la souffrance et la détresse pour les moins démunis.
Crise
« La crise dans nos maisons s’est aggravée depuis que Talon est devenu président. Ses soi-disant reformes ont bloqué toutes les portes et les fenêtres qui nous aidaient à respirer un peu dans ce pays. Mais on va se rencontrer en 2021 », s’est lamenté un homme sans pourtant expliciter de quelles portes et fenêtres il s’agissait et dr quelle manière il respirait à travers ceux-ci.
Cependant, les experts du FMI qui ont rédigé le rapport ont laissé entendre que les reformes seraient mieux mises en œuvre lorsque les conditions économiques sont favorables.
« Notre nouvelle recherche suggère que les coûts électoraux associés aux réformes structurelles peuvent être évités, ou du moins considérablement réduits, si des considérations politiques sont prises en compte dans la conception de la politique », affirment Davide Furceri, Jonathan D. Ostry et Chris Papageorgiou. Gabriele Ciminelli, Davide Furceri, Jun Ge, Jonathan David Ostry, Chris Papageorgiou.
Un élément clé du succès des réformes structurelles est une forte appropriation et un dialogue renforcé avec les entreprises et la société civile.
Si les reformes structurelles ont des avantages économiques, son impact politique est moins bien défini. En effet, les réformes ne peuvent générer des gains pour la société dans son ensemble qu’à long terme, tout en infligeant des problèmes à court terme à certains secteurs », expliquent les experts du FMI.
Risque politique
Les réformes ne génèrent toujours pas de risque politique, dixit le FMI.
« Notre principale conclusion, basée sur 66 pays démocratiques, est que, si les réformes sont en moyenne associées à des coûts électoraux, les effets spécifiques dépendent non seulement du type de réforme, mais également du moment où elle est mise en œuvre dans le cycle électoral », ajoutent-ils.
« Plus précisément, les réformes sont généralement bénignes, voire favorables politiquement, lorsqu’elles sont mises en œuvre rapidement après les élections afin que les gouvernements puissent profiter des avantages économiques à moyen terme. Les risques électoraux sont accrus lorsque les gouvernements retardent et promulguent des réformes à la veille d’une élection, compte tenu des effets de dislocation à court terme souvent causés par les réformes ».