Alors que la pandémie du coronavirus continue son parcours saboteur et impose même un retour au confinement ailleurs, le transport aérien français veut reprendre vie avec des vols en direction des pays africains à compter de juin 2020. Chose curieuse, au sein de l’Union européenne, ou en direction des Etats Unis et de l’Asie, il n’est encore rouvert le trafic Air France. Qu’y a-t-il de si pressant pour reprendre les activités en pleine Covid-19 ?
Sylvestre TCHOMAKOU
Plaie béante venue bouleverser le cours normal de la vie des communautés depuis le premier trimestre 2020, le coronavirus n’empêche point les hubs français de penser « business » et « rentabilité » au grand dam de la santé des populations africaines. Le lundi 16 mars 2020 lors de son allocution aux français, le président Emmanuel Macron a annoncé la fermeture entière et totale des frontières avec les pays limitrophes de la France et même aux pays non européens. Plus récemment, soit le 07 mai, le ministre français de l’intérieur, Christophe Castaner a fait savoir dans une déclaration relayée par TV5Monde, que la fermeture des frontières en Europe reste « la règle ». Les restrictions aux frontières avec les pays de l’espace européen (Union européenne, Schengen, Royaume-Uni), précise-t-il, sont « prolongées jusqu’au 15 juin 2020 au moins »et les frontières avec les pays non européens « resteront fermées jusqu’à nouvel ordre ». Des décisions qui attestent de la gravité de la Covid-19. Mais contre toute attente, malgré le vent libre que s’offre cette pandémie dans plus de 150 pays à travers le monde, dont 53 sur 54 en Afrique, la compagnie Air France annonce à grands renforts, la reprise de ses vols en direction du marché du ciel africain dès le 03 juin prochain pour une montée en altitude programmée à partir du 15 juin. La Côte d’Ivoire et le Bénin seront les premiers pays à être desservis, avec un vol dans la semaine du 03 et 11 juin. Les vols directs sur Abidjan et sur Cotonou, eux, reprendront le 15 juin 2020, avec une fréquence de 4 vols par semaine. S’en suivront toujours à partir du 15 juin, les vols en direction des pays tels que la Guinée-Conakry, la Mauritanie, le Togo, le Niger, et le Cameroun. A partir du 16 juin 2020, les directions Centreafrique, Sénégal, Mali et RDC. Cependant, même en France, le deuxième plus grand aéroport du pays, l’aéroport parisien d’Orly est fermé. A ce rythme, pendant que le nombre de morts repart à la hausse en France, 348 décès le mardi 12 mai 2020, point de doute que le pari de la reprise des activités de la compagnie en direction des pays africains est une décision grossière dont la motivation est de sauver de la banqueroute Air France, n’empêche les conséquences pour les pays à investir.
Un piège que doivent balayer les Etats africains
Sauvée de la faillite par une injection française et néerlandaise de 10 milliards d’euros, cette compagnie qui s’apprête à reprendre le trafic aérien en pleine covid-19 s’affiche comme la « nouvelle boîte à coronavirus » qui veut s’ouvrir sur l’Afrique jusqu’ici résistante par rapport à la pandémie. Pour cause, connu pour s’être propagé à travers le monde à partir du premier foyer déclaré à Wuhan en Chine, le coronavirus a pu atteindre tous les continents au trafic aérien qui a continué sur une bonne période. Venant à annoncer une reprise de ses activités en toute connaissance de la menace du coronavirus toujours active en France qu’en Afrique, dans un contexte d’absence de remède efficace ou d’inexactitude des appareils de dépistage, la compagnie Air France semble s’organiser pour faire de l’Afrique le prochain foyer de la covid-19. Ce, en lien avec les prévisions de l’Organisation mondiale de la santé(Oms) qui annonce une hécatombe sur le continent noir. Quoique l’agence aît annoncé des mesures de contrôle de température des passagers avant les embarquements, celles-ci sont ne garantissent rien. Car dans une étude intitulée « The incubation period of coronavirus disease 2019 COVID-19 », des chercheurs américains sont arrivés à la conclusion que la période médiane d’incubation du covid-19 est estimée à 5,1 jours (IC à 95%, 4,5 à 5,8 jours), et 97,5% de ceux qui développaient des symptômes le faisaient dans les 11,5 jours (IC, 8,2 à 15,6 jours) suivants l’infection. Les comprimés tels que les chloroquines étant aujourd’hui une piste pour soigner le mal, les passagers tenus par l’idée d’éffectuer leur voyage, n’hésiteraient sans doute à avaler quelques comprimés aux fins de faire baisser leur température pour être embarqués. A l’analyse de ces évidences, doit-on véritablement assister à la primauté de l’économie sur la santé des populations ? L’autorisation donnée par les autorités françaises à ce qu’ils conçoivent comme un « fleuron industriel » à reprendre les activités hors du continent européen, n’est-elle pas la preuve d’une nouvelle conspiration contre les peuples africains ? Pourquoi commencer par l’Afrique en excluant l’Eurasie, les Etats Unis ? Si les raisons sanitaires étaient le motif de la suspension des vols, et que le danger demeurre, les dirigeants africains se doivent d’une voix unique, de refuser d’exposer leurs citoyens en privilégiant les intérêts de commerçants véreux.