Détrôné par le Mali du titre du plus grand producteur de coton d’Afrique et devancé par le Bénin qui le relègue en quatrième position derrière la Cote d’Ivoire, la production du coton au Burkina Faso est dans la tourmente.
Issa SIKITI DA SILVA
De 682 940 tonnes pendant la saison agricole 2016-2017 à 613 000 tonnes en 2017-2018, le pays des hommes intègres n’a produit que 436 000 tonnes en 2018-2019 malgré l’objectif de produire 800 000 tonnes et la forte subvention d’à peu près 27,4 millions de dollars mise à la disposition des agriculteurs pour se procurer des insecticides et des engrais et les installations d’irrigation.
Une chute vertigineuse de 30% qui, selon l’ l’Association interprofessionnelle du coton du Burkina (AICB), est due à l’abandon trois ans après de l’utilisation du coton génétiquement modifié (GM) résistant aux parasites. Après l’Afrique du Sud et l’Egypte, le Burkina Faso était le troisième pays africain à adopter la culture du coton transgénique (coton BT) pour accroitre les rendements, souligne la FAO. Ainsi avec l’aide de Monsanto, le pays aspirait à une nouvelle ère de la culture de l’or blanc.
Echec total
« Le coton BT fut commercialisé au Burkina en 2009. Cependant, lors de la première année de commercialisation, les responsables burkinabè remarquèrent une baisse dans la longueur des fibres et le taux de fibres. Les employés de Monsanto mirent cela sur le compte du stress hydrique et d’autres problèmes météorologiques », indique GeneWatch dans son « Burkina Faso abandons GM Btcotton », un news-report publié le 28 janvier 2016.
« Pourtant, le problème de la qualité persista, et lors de la saison 2014-2015, les deux tiers de la production nationale étaient classés comme étant de qualité inférieure et de longueur moyenne, un seul tiers conservant son classement comme fibre de longueur moyenne à grande. Le taux de fibres se situait bien en dessous des 42% obtenus par les cultivateurs non-OGM », ajoute GeneWatch.
Pluies et terrorisme
Apres l’abandon du coton BT, le Burkina Faso posa les pieds à terre et revint aux semences conventionnelles. Mais l’augmentation des attaques parasitaires sur les cultures, la détérioration de la sécurité dans plusieurs zones rurales du pays, l’arrêt des pluies dans certaines zones productrices du coton et la mauvaise qualité des engrais marquèrent un tournant décisif dans la chute du roi Burkina Faso dans le royaume africain du coton.
La culture du coton au Burkina Faso est pratiquée par plus de 250 000 exploitations agricoles, regroupant plus de 350 000 producteurs, et ce sont des exploitations agricoles en général de petite taille et de type familial avec environ 12 personnes, renseigne la FAO.
« La chute de la production a découragé certains agriculteurs de cultiver le coton. La dernière baisse a tout gâté. Beaucoup ont accumulé des dettes et se trouvent actuellement dans une situation difficile. C’est vraiment triste », se confie un agriculteur burkinabè en séjour d’affaires au Bénin. L’objectif pour la saison 2019-2020 est de produire 800 000 tonnes. L’or blanc représente 60 % des recettes d’exportation du Burkina Faso. Sa chute continuelle pourrait avoir un impact négatif sur le Produit intérieur brut et mettre en déroute les efforts de reconstruction entamés par le président Roch Marc Christian Kaboré après environ trois décennies de corruption et de pagaille financière sous le régime dictatorial de Blaise Compaoré.