(La GAB, seule compagnie d’assurances à capitaux entièrement nationaux)
Le monde des assurances au Bénin a connu des changements significatifs au cours de ces dernières semaines. Pour la première fois depuis plusieurs années, les primes d’assurance du secteur automobile ont connu une hausse, chez tous les assureurs. Au plus fort de cette crise qui ébranle les prévisions financières des assurés à plus d’un titre, Gaston de SOUZA, directeur général de la Générale des Assurances du Bénin, analyse dans Financial Afrik, la situation et ses implications pour les assurés et les assureurs béninois.
Quels sont les principaux changements intervenus récemment dans le secteur des assurances au Bénin ?
Gaston de SOUZA: Le secteur des assurances au Bénin a connu une évolution majeure avec l’adoption de deux arrêtés. Le premier date du 27 décembre 2023 et porte sur la fixation du tarif minimal de l’assurance de responsabilité civile des véhicules terrestres à moteur en République du Bénin. Ce nouveau tarif minimum était jusqu’alors inférieur aux tarifs appliqués par les assureurs sur le marché. Cet arrêté s’est traduit principalement par une révision à la hausse du tarif minimum de l’assurance de responsabilité civile automobile.
Le 09 janvier 2024, un second arrêté interministériel a été pris par le gouvernement béninois. Il fixe les conditions particulières de souscription et de renouvellement de l’assurance de responsabilité civile des véhicules terrestres à moteur en République du Bénin. La nouvelle norme est que la souscription ou le renouvellement de cette assurance se fera sur présentation d’une attestation de contrôle technique à jour et d’une preuve d’acquittement de la Taxe sur les véhicules à moteur (TVM). Si le premier arrêté a semblé, aux yeux des populations assurées, être une tactique des assureurs pour accroître leurs marges, le second a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase.
Quelles sont les raisons de ces réformes ?
Les réformes engrangées par ces arrêtés visent à régler un certain nombre de défis auxquels notre marché était confronté. En effet, le secteur des assurances au Bénin connaît depuis plusieurs années une concurrence exacerbée par des enchères sur le montant des polices des assurances. Ces baisses permanentes se sont faites au fil des années sur un tarif qui n’a pas évolué depuis 20 ans. Le coût des prestations des assurances a connu dans le même temps une croissance, sous l’influence de plusieurs facteurs. L’un d’eux est l’augmentation du barème d’indemnisation des dommages corporels acté depuis 2014 par le régulateur CIMA (Conférence interafricaine des marchés d’assurance). L’augmentation du salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) ainsi que celle des honoraires de soins dans les cliniques et hôpitaux est également un facteur qui a pesé dans la balance. Ensemble, ils ont eu des impacts importants sur la charge de sinistres et les provisions pour sinistres à payer par les compagnies d’assurances.
La conjonction de ces deux phénomènes (la course à une police d’assurance la moins chère possible et la hausse des charges en raison de l’évolution du coût de la vie au fil des ans) à terme constituait une menace pour la solidité des compagnies d’assurance opérant dans le pays. Elle risquait en outre de porter atteinte à la qualité des services proposés, selon les évaluations du régulateur national. D’où cet ensemble de réformes sectorielles.
Pourquoi le secteur n’a-t-il pas réagi plus tôt ?
Plusieurs tentatives ont été faites par les acteurs du marché. Mais elles n’ont pas pu aboutir, faute de consensus. L’une des raisons de l’échec des précédentes tentatives de réforme se trouve dans les racines profondes d’une guerre sans merci pour des parts de marché, parfois au grand dam de la rentabilité. Aujourd’hui, notre marché se trouve à la croisée des chemins de l’amélioration de la qualité de services et des attentes légitimes et croissantes des assurés. Il était temps d’arrêter la saignée et c’est ce que l’intervention des ministères impliqués, par le biais de ces décisions administratives, nous force à faire désormais.
Quelle a été la réaction des clients à ces changements qui les ont affectés ?
Cela s’est traduit par une onde de choc. Nous vivons dans une économie où la cherté de la vie se fait ressentir de manière constante malgré les différentes mesures prises par les autorités. Dans ce contexte, les primes d’assurance automobile, étaient l’un des rares postes de dépense, qui avaient été préservés. Vous pouvez donc imaginer la réaction des clients, dont la plupart, n’ont jamais connu une hausse de prime, souvenez-vous, les prix ont été artificiellement maintenus depuis deux décennies. Pour nos clients, le choc a été grand. Surtout, si vous y ajoutez les dispositions de l’arrêté du 9 janvier, qui rend l’acquittement de la TVM, préalable à sa souscription de l’assurance.
Les clients étaient donc confus et frustrés. Avec une bonne communication, nous arrivons à leur apporter les explications dont ils ont besoin. A cela s’ajoute l’assurance que plus que jamais, leur tranquillité d’esprit reste l’engagement majeur de notre compagnie, La Générale des Assurances du Bénin. La plupart d’entre eux prennent des mesures pour s’adapter au mieux à la situation.
Quelle a été votre réaction en interne à la Générale des Assurances du Bénin?
Cette situation a été une occasion précieuse pour notre entreprise de renforcer nos liens avec notre clientèle et de réaffirmer notre engagement envers notre cœur de métier. Ce dernier réside dans le règlement efficace des sinistres et des prestations. Les derniers événements ont mis en lumière l’importance de notre capacité à répondre rapidement et efficacement aux besoins de nos assurés, et nous intensifions nos efforts pour y parvenir. En nous appuyant sur des solutions toujours plus innovantes et des procédures optimisées, nous offrons à nos clients une expérience encore plus satisfaisante en matière de réclamation. Plus que jamais, nous nous évertuons à être un partenaire de confiance pour nos assurés, tout en continuant à relever les défis du secteur avec agilité et détermination.
Quelles leçons peut-on tirer de cette situation ?
La leçon que j’en tire, personnellement, est l’importance d’être ancré dans la réalité. Il est primordial de tenir compte de l’évolution de facteurs tels que le marché, l’environnement réglementaire entre autres. Cela permet de mettre en place une politique de prix adaptée et adéquate, ce qui par ricochet permet de toujours offrir des services d’une qualité irréprochable.
La seconde leçon que je retiens est qu’une communication en toute transparence, et de bonne foi, est un pilier important de la relation entre assureur et assurés. Cela met en place un fondement solide, base d’une relation durable et résiliente. Il ne suffit pas de mettre le client au cœur de nos politiques internes, il faut également le lui faire savoir, surtout quand il traverse une situation particulière ou préoccupante telle que celle que nous avons eue.
Avec ces changements du prix, quels sont les facteurs de différenciation sur lesquels les compagnies d’assurance peuvent se baser pour performer sur le marché ?
Je crains de ne pouvoir répondre à cette question en toute transparence, au risque de dévoiler notre stratégie en interne. Je m’aventurerai juste à dire qu’il revient à chaque compagnie de se réinventer, ou pas. Mais je suis convaincu que sortir des sentiers battus et maintenir des relations mutuellement bénéfiques avec ses assurés sont les gages de la performance à terme.
Quels avantages, une telle situation présente-t-elle pour une compagnie comme la vôtre ?
Notre compagnie d’assurances, en 25 ans d’existence, a fait face à des défis majeurs. Elle a, contre vents et marées, fait preuve d’une grande résilience pour se maintenir dans le concert des compagnies d’assurances du marché béninois des assurances. Elle demeure, à ce jour, la seule compagnie d’assurances à capitaux entièrement nationaux, avec une grande réactivité et un panel de réassureurs engagés à accompagner sa croissance. Chez nous, l’augmentation du tarif est modérée au regard de nos tarifs précédents et cela nous offre de belles perspectives de différenciation.
Propos recueillis par Gwladys Johnson Akinocho de Financial Afrik