Le malheur des uns fait le bonheur des autres, dit-on. Pendant que l’Occident continue de sanctionner sévèrement la Russie pour avoir envahi l’Ukraine et violé sa souveraineté nationale, les pays africains semblent profiter de l’occasion pour y monitorer des opportunités économiques à long terme.
Issa SIKITI DA SILVA
Classée en 2020 comme premier exportateur mondial de gaz naturel avec 22,6 % des exportations nettes mondiales et 2e exportateur de pétrole brut (13,2 %) et des produits raffinés, la Russie est en voie de perdre ces positions prestigieuses.
Son premier client de gaz naturel, l’Union européenne (UE), qui en 2021 a importé 140 milliards de m3 de gaz de Russie par gazoduc et 15 milliards de m3, sous forme de gaz naturel liquéfié (GNL), veut chercher ailleurs. En plus, ses 8 millions de barils de pétrole brut par jour de contribution au marché mondial pourraient se retrouver « dans le néant » si l’Occident persiste et signe de la bouter hors du marché mondial.
Devant ce fait accompli, les experts pensent que l’Afrique pourrait profiter de ce tournant imprévisible de l’histoire pour chercher une place au soleil dans la cour des grands.
Selon Danielle Resnick du think-tank américain Brookings Institution, le gaz naturel africain pourrait réduire la dépendance de l’Europe vis-à-vis de l’énergie russe.
A en croire cette politologue spécialiste en économie mondiale et développement basée à Washington, si les tensions en Ukraine suscitent un intérêt croissant pour les réserves de la Tanzanie, qui détient les sixièmes réserves de gaz les plus grosses en Afrique, les 1400 milliards de mètres cubes de gaz naturel découverts au Sénégal entre 2014 et 2017 pourraient attirer des capitaux de l’Europe, qui cherche à diversifier ses besoins d’énergie.
Nigéria
« Il y a aussi le Nigéria, déjà fournisseur de GNL de plusieurs pays européens, qui se lance également avec le Niger et l’Algérie sur le projet de gazoduc Transsaharien pour accroître les exportations de gaz naturel vers les marchés européens », a renchéri Danielle Resnick dans un document de recherche publié le 25 février 2022 par le Brookings Institution. Le 16 février dernier, ces trois pays ont signé un accord pour développer le pipeline, estimé à 13 milliards de dollars.
Les trois premiers producteurs de gaz du continent, à savoir l’Algérie, l’Égypte et le Nigéria, produisent 87% de la production totale de gaz en Afrique.
Quant au Mozambique, l’autre géant du gaz naturel africain de plus en plus considéré comme le « Qatar africain », ses réserves énormes de gaz semblent attirer de plus en plus d’investisseurs, dont TotalEnergies, ce groupe français qui compte extraire 13 millions de tonnes de gaz par an dès 2024 avec un investissement de 20 milliards de dollars.
Ukraine
L’invasion de l’Ukraine par la Russie semble avoir jeté une ombre sur l’Afrique.
Malgré la distance géographique qui sépare le continent avec le lieu du conflit, il existe des liens importants entre l’Ukraine et l’Afrique, notamment plus de 8 000 Marocains et 4 000 Nigérians étudiant en Ukraine et plus de 4 milliards de dollars d’exportations de l’Ukraine vers l’Afrique, a fait savoir le Brookings Institution.