L’objectif 2 du développement durable, relative à l’élimination de la faim devient de plus en plus difficile à atteindre pour les pays africains. Dans l’espace UEMOA, l’insécurité alimentaire se corse, s’éternise et interpelle de plus belle.
Félicienne HOUESSOU
L’insécurité alimentaire dans l’espace UEMOA a touché 12 millions de personnes, ces dernières années, et, 1,71 million de personnes a besoin d’une assistance alimentaire et nutritionnelle immédiate, selon le Réseau de Prévention des Crises Alimentaires (RPCA). La situation alimentaire et nutritionnelle est impacté par l’insécurité civile persistante dans le Bassin du Lac Tchad, le Liptako-Gourma (Burkina, Mali et Niger) et dans le centre du Mali. Elle touche aussi la situation pastorale. En plus d’un déficit fourrager observé dans certaines zones, l’insécurité dans des localités au Mali, au Niger et au Burkina Faso rend difficile l’accès des animaux aux ressources fourragères. De plus, pour la campagne 2021/2022, la production céréalière globale dans l’espace a enregistré une régression de 13% de sa production définitive évaluée à 27,26 millions de tonnes. Cette situation alimentaire laisse entrevoir une crise alimentaire plus accentuée. « Nous sommes dans une année difficile avec des déficits au niveau de la pluviométrie et des productions vivrières et fourragères. Cette situation impacte les produits vivriers qui sont de plus en plus chers au grand dam des populations de notre espace », a reconnu le Président Mohamed BAZOUM lors de la 11e réunion du Comité de Haut Niveau sur la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle au sein de l’UEMOA. Un rapport publié par cinq agences des Nations unies (FAO, OMS, PAM, Unicef, FIDA), « l’Etat de la sécurité et de la malnutrition dans le monde 2018″, indique que la faim a grimpé pour la troisième année consécutive, après avoir longtemps reculé. Et l’Afrique est de loin le continent le plus touché. Les chiffres sont encore plus alarmants en ce qui concerne l’insécurité alimentaire grave. Près d’un Africain sur trois en est victime (trois fois plus que la moyenne mondiale) et près d’un sur deux dans la partie centrale du continent. Surtout dans la partie subsaharienne où près d’un quart de la population est sous-alimenté. En cause, particulièrement, la variabilité du climat et ses phénomènes extrêmes-types, inondations et sécheresses, de plus en plus fréquents, intenses et complexes… Face à cette situation, Abdou Dieng, directeur régional pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre au PAM (Programme alimentaire mondial) estime que « l’objectif d’élimination de la faim sera difficile à atteindre… On peut prendre le problème à bras-le-corps, les solutions existent, il faut que la communauté mondiale et les Etats africains en prennent conscience ».
Les pistes pour atténuer la crise
Selon le Président du Comité de Haut Niveau sur la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle, « la situation est inquiétante avec une baisse de la production céréalière de l’ordre de 13% avec des disparités d’un Etat à un autre ». Cette baisse aura un impact sur la production fourragère et sur le fonctionnement du marché des produits agricoles avec une augmentation des prix. L’inquiétude majeure des pays de l’Union pour 2022-2023 porte sur l’approvisionnement en engrais en raison des dérèglements au niveau mondial principalement la crise ukrainienne qui fait que ce produit essentiel pour la productivité agricole, se fait rare. Pour le moment, 40% des besoins sont satisfaits. Cette situation exigeait des institutions communautaires et des Etats, des actions pour y faire face. D’où les Plans Nationaux de Réponses évalués à plus de 500 milliards de francs CFA et financés à plus de 300 milliards de francs par les budgets des Etats. La recommandation forte du Comité de Haut Niveau sur la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle est de travailler pour résorber ce gap au niveau communautaire et des Etats et agir sur le long terme pour que cette production d’engrais soit plus importante au niveau de notre région. Pour rappel, c’est en décembre 2011, que la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’UEMOA a créé un Comité de Haut de Niveau sur la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle (CHN-SAN) dans l’espace communautaire. Il est chargé de réfléchir et d’identifier les solutions idoines pour mettre définitivement la région à l’abri des crises de famine, de malnutrition et d’insécurité alimentaire. Cette population était de 8 millions de personnes en 2021 et seulement 2 millions en 2014 d’où l’urgence pour la commission de l’UEMOA de plancher sur les mesures et orientations alternatives pour y faire face. C’est-à-dire : Éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et promouvoir l’agriculture durable.