Les déséquilibres macroéconomiques ont fait un retour en force en Afrique, selon le Fonds monétaire international (FMI). Les situations budgétaires se sont détériorées au cours de la dernière décennie, la dette publique moyenne a doublé progressivement, atteignant environ 60% du Produit intérieur brut (PIB), et l’inflation à deux chiffres est revenue dans plusieurs pays.
Issa SIKITI DA SILVA
« Le lourd tribut économique imposé par la pandémie et la flambée des prix des matières premières vont rendre les conditions encore plus difficiles. Le risque d’une intensification des émeutes dans les mois à venir est très élevé », a indiqué Abebe Aemro Selassie, directeur du département Afrique du FMI, la semaine dernière.
A en croire cet éminent économiste éthiopien, le monde connaît des conditions financières plus strictes et une volatilité accrue des marchés financiers, ce qui exerce une pression supplémentaire sur les pays endettés, car des emprunts toujours plus coûteux érodent l’espace budgétaire.
« En outre, la fragmentation géopolitique perturbe les flux commerciaux et d’investissement, disloque les chaînes de valeur mondiales et augmente les coûts de production. Et par conséquent, l’Afrique se retrouve sur une voie de divergence économique par rapport au reste du monde », a indiqué Abebe Aemro Selassie, lors de la 13ème conférence Andrew Crockett des gouverneurs des banques centrales africaines à Oxford.
Parmi les déstabilisateurs économiques majeurs figurent l’inflation et le chômage, selon l’économiste Nicholas Kaldor. « Le chômage correspond à un décalage entre la quantité d’emplois offerte ou la main-d’œuvre demandée et la quantité d’emplois demandée ou la main-d’œuvre offerte sur le marché du travail », explique Nicholas Kaldor, cité par le site « The Premières ».
L’inflation, poursuit-il, ou la hausse continue et cumulative du niveau général des prix, résulte d’un excès de la quantité de monnaie offerte par les autorités monétaires par rapport à la quantité demandée de liquidités par les agents économiques sur le marché de la monnaie.
Que faire ?
L’heure des réformes structurelles initiales est venue, a lancé le directeur dans des propos publiés sur le site du FMI. « Parce qu’une croissance forte est le remède le plus critique pour éliminer les déséquilibres et, en particulier, réduire les taux d’endettement. Une économie en croissance signifie une assiette fiscale croissante et un plus grand potentiel de revenus », dixit le directeur du département Afrique du FMI.
« Pour de nombreux pays, la croissance devra provenir du secteur privé. Avec une pression budgétaire croissante et une dette croissante, il sera vital pour beaucoup de passer de modèles de croissance dirigés par le gouvernement à ceux du secteur privé. Et cela nécessitera des réformes vitales pour améliorer l’environnement des affaires », a-t-il souligné.
Le directeur du département Afrique du FMI a appelé les Etats africains à être plus sélectif pour garantir que les déséquilibres économiques ne nuisent pas de manière disproportionnée aux segments les plus vulnérables de la population.
« Les décideurs politiques doivent être plus sélectifs en matière de dépenses et d’investissements. Limiter les inefficacités et le gaspillage grâce à une gestion des finances publiques plus solide (par exemple, des contrôles des dépenses, une gestion des arriérés et des processus d’approvisionnement plus solides) aidera à créer de l’espace et à canaliser les fonds vers les domaines les plus rentables », a renchéri Abebe Aemro Selassie.