Surendettées, désorganisées et souvent pillées et mal gérées par des cadres irresponsables qui ont été nommés grâce à leur loyauté aux partis au pouvoir, ou par des proches des régimes, bon nombre d’entreprises publiques africaines sont à bout de souffle et au bord du précipice.
Issa SIKITI DA SILVA
Si en Afrique du Sud, la plupart des entreprises d’Etat se trouvent actuellement agonisants sur des lits de soins intensifs à cause de la malfaisance, le leadership incompétent et la mauvaise gestion mais surtout la mauvaise gouvernance des années Jacob Zuma, au Kenya les dettes de la fameuse Kenya Airways s’élevaient à 847 millions US à la fin de 2020, en attendant au moins 1 milliard US pour restructurer la compagnie décadente dont l’Etat détient 48.9% des actions.
En RDC, toutes les entreprises publiques sont presqu’en état de « décomposition » après 32 ans de pillage par les proches de Mobutu et près de 20 ans par les dignitaires du régime de Kabila junior. La crise est tellement sévère que les travailleurs de certaines entreprises n’ont pas été payés pendant plus de 36 mois.
Au Bénin, après une baisse de 30% de leur dette entre 2017 et 2019, les entreprises publiques se sont enfoncées dans le bourbier de la dette bancaire, dont le total s’acheminerait lentement mais surement, selon certaines sources, vers le cap de 300 millions d’euros. Le constat est amer dans presque tout le continent, atteignant des proportions alarmantes dans des pays traditionnellement corrompus comme le Nigéria et même en Afrique du Nord.
Soutenir, restructurer ou liquider
Bon nombre d’observateurs soulignent que la responsabilité de « ressusciter » ces entreprises publiques meurtries par la corruption et la mauvaise gestion incombe aux gouvernements, surtout en cette période de post-Covid.
Récemment, le Fonds international monétaire (FMI) a lancé un appel aux gouvernements de continuer à fournir un soutien financier aux entreprises qui peuvent se redresser.
Cependant, rappelle le FMI, ils ne peuvent pas lever le financement privé pour le faire tout en retirant leur soutien aux entreprises qui sont si gravement touchées qu’elles devraient être restructurées ou liquidées.
« Le soutien financier devrait devenir plus ciblé dans un contexte de rétrécissement de l’espace budgétaire. Les programmes de soutien politique devraient fixer des objectifs clairs pour remédier aux défaillances spécifiques du marché. Ils doivent inclure des garanties solides en matière de gouvernance et de transparence pour atténuer les risques et mettre en place des plans de sortie clairs dès le départ », expliquent Ceyla Pazarbasioglu et Rhoda Weeks-Brown, deux experts du FMI.
Les deux économistes, l’une turque et l’autre libérienne, exhortent les décideurs politiques à calibrer le soutien financier et le diriger efficacement vers les entreprises qui en ont besoin. « Ils doivent également être prêts à restructurer ou à liquider des entreprises gravement endommagées », renchérissent-elles.