(L’efficacité de la répression du trafic de drogue analysée)
(L’intérêt de la thèse pour la communauté scientifique)
Après plusieurs années de recherches laborieuses sur les trafics illicites de drogue au Bénin, Waïdi Akodjenou, l’impétrant touche enfin le graal du troisième cycle de l’enseignement supérieur. Il accède au rang de Docteur de la Faculté de Droit et de Sciences politiques (FADESP) de l’Université d’Abomey-Calavi (UAC). L’homme a brillamment soutenu sa thèse ce lundi 24 juillet 2023 dans la salle des ACTES de l’Ecole Doctorale des Sciences Juridiques, Politiques et Administratives de l’UAC en présence de ses parents et amis.
Belmondo ATIKPO
Un nouveau Docteur à la Faculté de Droit et de Sciences politiques. Il s’agit de Waïdi Akodjenou qui a passé avec succès dans l’après-midi de ce lundi 24 juillet sa soutenance de fin de cycle doctoral. L’impétrant a proposé dans une approche dynamique une nouvelle offre pénale sur l’épineux sujet de trafic illicite de drogues en République du Bénin. Devant un jury composé de cinq membres, l’aspirant a planché avec brio sur un sujet d’actualité en lien avec le trafic des stupéfiants. Cette thèse condensée dans un document de 370 pages porte sur le thème : « l’efficacité de la répression du trafic illicite de drogue au Bénin ». Dans ses grands axes, la thèse est intelligemment structurée en deux grands volets. Dans la première partie, on note comme grand titre : La Vaine Recherche de l’Efficacité. Cette première grande partie est reliée à plusieurs chapitres comme : l’efficacité recherchée par la pénalisation, l’efficacité recherchée par la dérogation, l’efficacité marquée des mesures répressives, la persistance du trafic illicite, l’accumulation des effets pervers.
La seconde partie du document est libellée comme suit : la quête d’une nouvelle approche. Cette partie est en lien avec des chapitres ci-après : la légitimité de la dépénalisation, les intérêts de la dépénalisation, la régulation de la production et de la distribution, l’application des sanctions adaptées aux contrevenants. En portant sa plume dans la plaie puante du trafic illicite de drogues et ses effets pervers, Docteur Waïdi a abordé un sujet original sous la direction de son directeur de thèse, Noël Gbaguidi, professeur titulaire agrégé de droit privé. 21 minutes, c’est le temps qu’a mis le candidat pour présenter le contenu de sa thèse. Il est resté dans le temps puisque le jury lui a donné au plus trente minutes pour résumer les résultats obtenus après plusieurs années de recherches sur le trafic de la cocaïne.
Les cinq membres du jury composé du professeur Rock David Gnahoui (président), professeur Noël Gbaguidi (Directeur de thèse qui était en visioconférence), professeur Akuété Pedros Santos de l’Université de Lomé (membre de jury, également en visioconférence), professeur Moktar Adamou de l’UAC et professeur Abdou Assane Zeinabou, Maître de Conférence Agrégée de l’Université Abdou Moumouni du Niger (en visioconférence), ont repris ensuite la parole pour des apports à travers des critiques de forme et de fond du document. Aux questions des membres de jury, l’impétrant, très posé dans sa prise de parole, a apporté des éléments de réponse. A la délibération, les membres du jury, à l’unanimité, ont félicité le nouveau Docteur. Cerise sur le gâteau, Waïdi Akodjenou est fait docteur en droit privé avec une mention très honorable.
L’intérêt de la thèse pour la communauté scientifique
Cette recherche vise à apprécier l’efficacité de la répression du trafic illicite de drogue au Bénin en analysant les principales règles d’incrimination comme celles relatives aux procédures et au jugement. Mieux, l’étude a surtout pour objet de montrer comment le droit positif béninois organise la lutte contre le trafic illicite de drogues. Ce qui permettrait aux agents d’application de la loi de trouver des éléments de réponse à certaines de leurs préoccupations. Ensuite, analyser pourquoi les moyens accrus mis en œuvre pour mener à bien la lutte contre le trafic de drogues peinent-ils à produire les effets attendus. Enfin, explorer des pistes de solutions alternatives envisageables qui pourraient inspirer les pouvoirs publics. Le champ de recherche retenu à l’occasion de cette étude est le Bénin. Le principal ancrage juridique est donc le droit positif béninois avec des ouvertures sur le droit international à la lumière notamment des Conventions des Nations unies sur les drogues et substances psychotropes et du droit français en raison des liens historiques entre le Bénin et la France.
Par ailleurs, les législations et textes spécifiques d’États francophones d’Afrique de l’Ouest ont également été analysés pour deux raisons essentielles. D’une part, ces États partagent un même héritage juridique, et d’autre part leurs législations nationales sont inspirées d’un même modèle-loi occidental, en matière spécifique de drogues. L’étude sur l’efficacité de la répression du trafic illicite de drogues au Bénin présente un double intérêt : au plan théorique, l’étude analyse le recul des garanties offertes aux justiciables en raison d’une quête d’efficacité dans la lutte contre le trafic et l’abus de la consommation illicite de drogues. Il s’avère nécessaire donc que la tension entre les droits fondamentaux des accusés et les aspirations légitimes de l’État à lutter contre la diffusion de drogues soit atténuée.
Au plan pratique, en s’intéressant aux différents instruments de lutte contre le trafic illicite de drogues, cette étude participe à la réflexion et constitue ainsi une source d’intérêts aussi bien pour les chercheurs que pour les acteurs de la justice notamment les magistrats, les Officiers de police judiciaire (OPJ) et les avocats. Ceux-ci y trouveront un raisonnement intéressant les procédures encore pendantes devant les juridictions. La réflexion suggère des problèmes de pratiques judiciaires induits notamment par les nécessités de concilier l’efficacité répressive et la préservation des libertés fondamentales.
La thèse, un palliatif de lutte contre le cannabisme au Bénin
L’auteur de la thèse s’est plu à reconnaître que la répression contre les trafiquants de drogues par les outils juridiques et policiers (répression et jugement) a produit des résultats mais la méthode a ses limites. Par exemple, la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET), condamnait, il y a dix (10) jours seulement, dix (10) accusés à des peines allant jusqu’à 15 ans d’emprisonnement dans l’affaire désormais connue sous la dénomination de : « affaire 2,5 tonnes de cocaïne ».
« En dépit d’une guerre totale engagée contre le trafic illicite de drogues, jamais le Bénin n’a été aussi envahi comme il l’est depuis quelques années par des trafiquants de drogues, qui y ont trouvé une nouvelle route pour faire acheminer leurs marchandises en Europe », reconnaissait depuis le 26 juin 2022, le Ministre de l’Intérieur et de la sécurité publique lors de la journée internationale de la lutte contre la drogue. Comme solution pour le recul du phénomène au Bénin, L’impétrant propose la dépénalisation de la production des stupéfiants, l’éducation et la réinsertion sociale des producteurs ou des consommateurs de drogues.