Dans une Afrique qui ne cesse de s’urbaniser à un rythme infernal et dont la population accroit rapidement, la jeunesse devient le centre d’attraction de ces deux nouvelles tendances. Il y a donc urgence à la rendre utile et productive.
Issa SIKITI DA SILVA
Environ 40% de la population africaine, soit 472 millions d’habitants, vivent dans les villes, contre 20 millions en 1950 et le taux d’urbanisation est de 4% par an, selon UN Habitat. Et plus de 43% de la population africaine est âgée de moins de 14 ans, selon le ‘’World Development Indicators’’ de 2016.
L’urbanisation et la transition démographique en Afrique appellent à un changement de paradigme en faveur d’un développement durable axé sur les jeunes étant donné que la jeunesse africaine est un moteur essentiel du développement durable, martèle un document de recherche publié par le Brookings Institution en janvier 2019.
Ces tendances démographiques représentent à la fois des opportunités et des défis pour les décideurs politiques et les partenaires de développement de l’Afrique, affirme la chercheuse Eyerusalem Siba.
« D’un côté, l’abondance de la population jeune offre à l’Afrique une main-d’œuvre dynamique, collaborative, flexible et tournée vers l’avenir, qui est la prémisse du don démographique de l’Afrique. Dans le même temps, l’urbanisation a un potentiel immense pour catalyser les efforts d’autonomisation des jeunes et de transformation structurelle », poursuit-elle.
Le cas du Bénin
Le taux de croissance de la population du Bénin est d’environ 2,7 % par an et le taux d’urbanisation était estimé à 44 % en 2015, selon l’INSAE. Avec un taux de pauvreté de 40% et de 70% de sous-emploi, force est de constater que bon nombre de jeunes béninois, qualifiés et semi-qualifiés, s’adonnent à des activités décrites par les observateurs comme un ‘’moyen sur’’ pour échapper à la pauvreté et au vice.
« Ça fait trois ans depuis que j’ai terminé mes études mais je peine à trouver un emploi décent qui pourrait me permettre de construire mon avenir. Je suis vraiment fatigué de vendre l’essence de la contrebande qui ne me rapporte que l’argent de manger. Bientôt j’aurai 30 ans et je suis encore pauvre », se lamente Gabriel Djossou.
Au Bénin, le taux des jeunes opérant dans le secteur informel est de 94,9%, tandis que la proportion des jeunes dans l’auto-emploi est de 62,3%, et 15,4% exercent des emplois précaires, selon l’INSAE.
« Le marché du travail ne joue pas pleinement son rôle de réduction de pauvreté. Ceci est sans doute le résultat d’un secteur informel prépondérant et du fort taux de sous-emploi », renseigne l’INSAE dans son rapport ‘Emploi et chômage’’.
L’urbanisation présente également une opportunité pour les jeunes qui quittent les milieux ruraux de trouver des emplois en ville, surtout dans le secteur informel.
Inégalités urbaines
L’Afrique doit se préparer à tirer parti des avantages socio-économiques de son dividende démographique et des forces de l’urbanisation pour créer la création d’emplois et la transformation structurelle dont nous avons tant besoin, de ses économies, déclare le Brookings Institution.
En revanche, prévient la chercheuse Eyerusalem Siba, si elles sont mal gérées, les forces combinées du chômage des jeunes et de la croissance des inégalités urbaines et de la pauvreté menacent le développement social en Afrique, rendant les jeunes plus vulnérables aux fléaux sociaux tels que le crime et le terrorisme et encourageant l’exode des jeunes africains en Europe, au risque de leur vie à la recherche de meilleures opportunités économiques.