Une soutenance de thèse a mobilisé divers acteurs du monde scientifique et cadres à divers niveaux le samedi 08 juin 2019 à l’Université d’Abomey-Calavi. Il s’agit de la présentation de Orou Nikki Bio, de sa recherche sur « Le changement climatique dans les communes de Kérou, Kouandé et Ouassa Péhunco : Stratégies d’information et de sensibilisation des populations par les radios communautaires pour l’adaptation ».
Abdul Wahab ADO
Mention honorable avec félicitations des membres du jury, c’est la note qu’a obtenu, Orou Nikki Bio pour sa soutenance de doctorat. L’objectif principal visé par Orou Nikki Bio à travers sa recherche est d’analyser la contribution des radios communautaires à l’information et la sensibilisation des populations sur le changement climatique dans les communes de Kérou, Kouandé et Péhunco. De façon spécifique, il a été question, entre autres, de démontrer l’importance et la nécessité d’utiliser les radios communautaires pour informer et sensibiliser les populations rurales sur le changement climatique. Ce travail permet de comprendre que l’adaptation au changement climatique dans les communes du Bénin est un enjeu du développement. Au nombre des acteurs locaux pouvant contribuer à une réussite des stratégies d’adaptation, figure en bonne place les radios communautaires. Ce travail réalisé au niveau de trois communes de l’Atacora où il est implanté des radios communautaires peut être implémenté dans d’autres régions du Bénin dans lesquelles les radios communautaires peuvent apporter leur contribution à la compréhension et à l’adaptation du changement climatique par les populations locales. La thèse a été soutenue devant un jury international composé de M. Ahodekon S. Cyriaque, professeur titulaire (Benin), tM. Ahadzi N. Koffi, professeur titulaire (Togo) ; M. Gbaguidi Jean-Euloge, maître de conférences (Bénin) ; M. Napo Gbati, maître de conférences (Togo) et M. Soulé M. Issiaka, Journaliste-Communicant (Bénin). Il faut préciser que M. Michel Boko, professeur titulaire des universités du CAMES/FLASHS/UAC est le directeur de la thèse soutenue. Avec cette thèse, Orou Nikki Bio, devient le tout premier directeur de radio communautaire à avoir gravi cet échelon au Bénin. Pour le président du jury de la soutenance, c’est un sujet d’actualité, d’intérêt classique parce que les conséquences du changement climatique sur l’agriculture, la production, l’élevage… sont énormes. C’est une soutenance pour éduquer les populations. Pour le professeur Michel Boko, membre du jury, c’est un travail novateur, original. Désormais ces genres de soutenances doivent s’imposer comme objectif principal de cours du changement climatique. En effet, les questions du changement climatique constituent de plus en plus, l’un des grands problèmes d’environnement de l’époque contemporaine. Les populations rurales du Bénin sont les plus exposées au changement climatique par le fait que les activités agricoles sont inéluctablement dépendantes du climat. De ce fait, les activités rurales sont fortement impactées par les effets pervers du changement climatique. Dans ce contexte, les communes de Kérou, Kouandé et Péhunco ne sont pas épargnées. En somme, le changement climatique a un impact certain sur la pratique des activités agricoles et pastorales dans le secteur de recherche. Ainsi, pour y faire face en vue d’assurer la subsistance et les revenus, les agriculteurs ont développé des stratégies d’adaptation à la hauteur de leurs expériences empiriques. Le recours à une information climatique, fiable, accessible, diffusée en temps réel et adaptée aux besoins des producteurs agricoles et éleveurs s’avère indispensable pour cette cible. La disponibilité et la diffusion de cette information par les radios de proximité dans les langues comprises par les populations aux heures d’écoute les plus appropriées revêtent une importance et conditionnent une série d’actions bénéfiques pour la sécurité alimentaire, la santé, l’économie locale et la protection de l’environnement. La nécessité d’informer et de communiquer sur le changement climatique revêt une importance capitale afin de renforcer les capacités d’adaptation des populations rurales. Or, force est de remarquer qu’après nos investigations sur le terrain, le constat de l’inaccessibilité des populations rurales à l’information climatique demeure une préoccupation. Au Bénin, sur les 67 radios qui composent le paysage radiophonique, trente-six (36) sont des radios communautaires. S’agissant du secteur d’étude, les communes de Kérou, Kouandé et Péhunco, disposent chacune d’une radio communautaire. Toutefois, les radios communautaires au Bénin ne se sont pas appropriées de la thématique du changement climatique dans leur mission quotidienne d’information, d’éducation et de sensibilisation du public. Face aux risques et effets redoutés du changement climatique, les auditeurs des radios communautaires sont plus réceptifs et exigeants quant à la qualité de l’information climatique. C’est pourquoi, le déficit de la diffusion de l’information climatique dans le contexte du climat de plus en plus changeant constitue un défi à relever non seulement par les radiodiffuseurs communautaires mais également par les acteurs locaux du développement ainsi que les chercheurs sur le changement climatique. L’utilisation des radios communautaires pour la compréhension et l’adaptation aux changements climatiques relève de la gouvernance climatique et de l’importance de l’information climatique dans l’aménagement du territoire et dans les politiques locales de développement dans un territoire d’intercommunalité en l’occurrence dans les communes de Kérou, Kouandé et Péhunco.
Pourquoi le choix de la radio pour l’adaptation au changement climatique ?
La prépondérance de la radio en matière de communication pour le développement, la radio s’impose par sa prépondérance dans les pays en développement comparativement aux autres médias de diffusion de masse. L’utilité de la radio constitue dans les pays africains un outil complémentaire de communication renforçant les autres formes de communication sociale. De par ses atouts, la radio reste et demeure le média leader dans les sociétés africaines. Cette position de média leader a été confirmée par la plus récente enquête d’Afrobaromètre sur le Bénin parue dans la dépêche 269 du 4 janvier 2019, qui déduit que la radio demeure encore l’outil prééminent de réception de l’information qui touche l’ensemble de la population. En effet, 51% des béninois sont propriétaires d’un poste récepteur et 26 % vivent avec quelqu’un qui en possède. En outre, comme source d’information, la radio vient en tête. Car, plus de six béninois sur 10 soit 61% s’y abreuvent chaque jour ou quelques fois par semaine. En définitive, la radio est le média le plus prisé des béninois. Ces derniers lui vouent un attachement particulier, car plus de 77% de la population y ont régulièrement accès.
Les résultats obtenus de la recherche scientifique
Les résultats obtenus de la recherche se présentent en deux parties. Il s’agit du changement climatique dans le secteur de recherche et la contribution des radios communautaires. Concernant, la première partie, qui est basé sur le changement climatique dans le secteur de recherche, dans le cadre de l’étude, les facteurs locaux amplificateurs de la variabilité climatique dans le secteur d’étude sont : la culture itinérante sur brûlis, les défrichements incontrôlés pour des fins de culture cotonnière, l’exploitation forestière, l’élevage bovin extensif. Les manifestations du changement climatique dans le secteur d’étude se traduisent par : le retard dans le démarrage de la saison pluvieuse, les poches prolongées de sécheresse pendant la saison des pluies, le caractère erratique des précipitations, la répartition spatiotemporelle imprévisible des précipitations
Toutes ces manifestations contribuent à la modification des calendriers culturaux et influent sur les rendements agricoles et la disponibilité des pâtures et ressources en eau. S’agissant des effets du changement climatique sur les activités agricoles et pastorales sont ressentis en termes de : perte de la fertilité des sols, baisse des rendements agricoles, réduction des aires de pâturage et raréfaction des ressources en eau pour le bétail.
Les stratégies locales d’adaptation
Les solutions développées par les agriculteurs et éleveurs ont porté sur : les semis précoces, semis répétés ou échelonnés, l’abandon progressif du calendrier agricole empirique, la modification des calendriers culturaux, l’adoption de nouvelles variété culturales (adaptation variétale), la rotation culturale (avec le coton ou l’igname), la pause des coussins sur les buttes d’igname, la transhumance. Les stratégies d’adaptation développées sont purement passives.
Défis à relever pour la recherche scientifique
Les défis relatifs à l’insuffisance de production d’émissions thématiques sur le changement climatique par les radios communautaires du secteur d’étude peuvent être relevés. Il s’agit du renforcement des capacités des journalistes ; de l’accès aux sources d’information sur le changement climatique ; des échanges de programmes et de la coproduction. Il faut également préciser qu’il y a quelques recommandations qui ont été formulées. Etablir une passerelle de coopération entre l’Université et les réseaux de radios communautaires pour la dissémination des résultats des travaux de recherche sur les changements climatiques dans les différentes localités du Bénin, constitue une des recommandations de la recherche.
Qui est docteur Orou Nikki Bio ?
Originaire des 2KP, Orou Nikki Bio est un professionnel des médias. Depuis 2003, il est le Directeur de la Radio communautaire Naanè FM de Péhunco. Il est titulaire d’un Master en management des médias du Centre Africain de Formation et de Perfectionnement des journalistes (CAFPJ). En tant que journaliste radio, Orou Nikki Bio s’est spécialisé sur les questions purement liées à l’environnement. D’ailleurs pour l’obtention de son Diplôme d’Etudes Approfondies (DEA) en Géographie, option Géosciences de l’environnement et aménagement du territoire, il a travaillé sur le sujet intitulé : « Changements climatiques et médias communautaires au Bénin : Etudes de cas dans l’Atacora ». Le sujet de sa thèse de Doctorat n’est que la suite logique de son travail de DEA et porte sur le sujet : « Le changement climatique dans les communes de Kérou, Kouandé et Péhunco : Stratégies d’information et de sensibilisation des populations par les radios communautaires pour l’adaptation ». Amoureux de la nature et de la culture, le désormais docteur Orou Nikki Bio s’intéresse aussi aux questions juridiques, notamment le Droit de l’environnement. Il est titulaire d’un diplôme de Maîtrise ES-Sciences juridiques, option droit des affaires et carrières judiciaires, à la Faculté de Droit et de Sciences Politiques (FADESP) de l’Université d’Abomey-Calavi et d’un Diplôme en droit international de l’environnement de l’Université des Nations Unies pour la Recherche (UNITAR).