Le mercredi 28 juin 2023, les fidèles musulmans au Bénin ont célébré la fête de la Tabaski. Malgré les défis financiers auxquels fait face le pays, ils n’ont pas manqué de sacrifier une fois encore à la tradition, occasion de partage et de renforcement de leurs liens communautaires.
Loric ANAGONOU & Murielle ANGO (Stags)
La communauté musulmane au Bénin a célébré la Tabaski, mercredi 28 juin 2023, l’une des fêtes les plus importantes en Islam. Selon les règles religieuses, cette festivité est marquée par le sacrifice d’un mouton dont la viande sert généralement à l’aumône. Imam de la mosquée de Sikêcodji à Cotonou, Wabi Mouhamed approché, est revenu sur le symbolisme derrière le sacrifice du mouton lors de la fête de Tabaski. Selon lui, « le sacrifice du mouton lors de la Tabaski met l’accent sur la valeur de la solidarité et du partage. La viande obtenue à partir du sacrifice est traditionnellement partagée entre les membres de la famille, les voisins et les personnes défavorisées de la communauté. Cela favorise un sentiment de fraternité, de générosité et d’entraide, renforçant ainsi les liens sociaux et la cohésion au sein de la communauté… ». Cependant, cette année, les difficultés financières ajoutent un défi supplémentaire à la célébration de la fête. A la question de savoir comment les fidèles ont pu fêter malgré la morosité économique, l’imam adjoint de la mosquée centrale de Sikècodji, Sadikou Aboubou a affirmé : << malgré la morosité actuelle, chacun fait de son mieux pour sacrifier à la tradition. Ceux qui en ont les moyens, le font car il est dit dans la sainte écriture qu’il n’est jamais imposé à une âme une charge supérieure à sa capacité >>. Du côté des fidèles, si d’autres ont eu les moyens pour faire le sacrifice, face aux contraintes pécuniaires, certains rendent grâce dans l’espoir de sacrifier à la tradition les fois à venir. L’imam adjoint, Sadikou Aboubou a exhorté les fidèles qui en ont la possibilité, à la générosité, au partage et au pardon ainsi qu’au respect des recommandations divines. En effet, malgré les contraintes économiques, la solidarité est au cœur de la célébration de la Tabaski. Les familles musulmanes, conscientes des difficultés auxquelles sont confrontées d’autres personnes de leur communauté, font preuve d’une générosité remarquable. Elles partagent leurs ressources et leur nourriture avec ceux qui sont dans le besoin, afin que chacun puisse participer à la célébration de la Tabaski. Dans de nombreux quartiers du Bénin, des initiatives communautaires ont été mises en place pour faciliter la participation de tous à la Tabaski. Des collectes de fonds et de denrées alimentaires sont organisées, permettant ainsi d’aider les familles qui ont du mal à subvenir à leurs besoins pendant cette période. Des associations caritatives et des bénévoles se sont mobilisés pour distribuer des repas aux plus démunis, garantissant ainsi une célébration inclusive pour tous. C’est sans compter les dons de bœufs ou mouton d’âmes généreuses aux communautés musulmanes. La Tabaski au Bénin devient ainsi un symbole de partage. Il faut ajouter également que les familles béninoises ont fait preuve d’ingéniosité remarquable pour trouver des solutions alternatives aux défis financiers. Certaines optent pour de modestes festivités tandis que d’autres échangent des cadeaux à petite échelle. L’accent est mis sur la valeur spirituelle de la fête et sur la gratitude envers Allah, plutôt que sur les aspects matériels. D’ailleurs, plusieurs fidèles qui avaient l’habitude d’organiser une célébration grandiose ont réduit leurs budgets. C’est le cas de Mohamed Orou : » j’ai juste pris un petit mouton cette année. Je n’ai pas beaucoup de moyens. Allah a fait, on a la vie, les prochaines années, on fera des grande fête » a-t-il déclaré. La situation n’est pas mieux chez Djamilatou Assani qui explique : » j’ai fait l’effort de trouver de pagne aux enfants. Moi-même, je n’ai pas pu payer car, je n’ai pas beaucoup d’argent. On doit préparer aussi, vous voyez ! Donc, ce n’est pas facile ».
Une fête symbolique
<< Le sacrifice du mouton lors de la fête de la Tabaski revêt un symbolisme profondément ancré dans les traditions religieuses et les enseignements spirituels. Également connue sous le nom d’Aïd Al-kébir, cette fête commémore le sacrifice d’Abraham et revêt une grande signification spirituelle pour la communauté musulmane. Wabi Mouhamed Taofic, imam de la mosquée centrale de Sikècodji éclaire sur cette fête qui, dit-il, << tire ses origines : de l’histoire d’Abraham telle que décrite dans les textes sacrés de l’islam. L’événement central de la Tabaski remonte à des milliers d’années et incarne un récit de foi, de sacrifice et de dévotion. Selon le récit religieux, Abraham a reçu un commandement divin lui demandant de sacrifier son fils Ismaël. Se soumettant à l’ordre de Dieu, Abraham était prêt à accomplir le sacrifice. Au moment crucial, un ange intervint et substitua un bélier à la place d’Ismaël, préservant ainsi la vie de son fils >>. Entre autres symboles associés à cet acte figurent : l’obéissance à Dieu : le sacrifice du mouton est considéré comme un acte d’obéissance à Dieu, se référant à la soumission d’Abraham à l’ordre divin de sacrifier son fils. Cela met en avant l’idée de se soumettre humblement à la volonté de Dieu et de lui accorder une confiance absolue. Ensuite vient le sacrifice et le renoncement : (…) le mouton sacrifié symbolise l’idée de sacrifice et de renoncement matériel. Cela rappelle aux croyants l’importance de mettre de côté leurs désirs personnels et de se concentrer sur le service de Dieu et le bien-être des autres. Il encourage également la générosité envers ceux qui sont dans le besoin. A cela s’ajoutent la solidarité et le partage et enfin, la purification et le pardon : le rituel du sacrifice est également associé à la purification des péchés et à la recherche du pardon divin. Il rappelle aux croyants l’importance de se repentir de leurs erreurs, de demander le pardon de Dieu et de chercher à mener une vie vertueuse. >>. Cette célébration démontre la force et la solidarité d’une communauté face aux difficultés économiques. Malgré les contraintes financières, les Béninois s’unissent pour honorer l’Aïd Al-kébir avec générosité et créativité. La fête revêt une signification profonde, rappelant l’importance de l’entraide et du partage, et renforçant les liens communautaires dans le pays.