Le Parc national de la Pendjari (PNP) est une aire protégée du Bénin, située dans le département de l’Atacora. Il fait partie de la réserve de biosphère de l’Unesco et du Complexe W-Arly-Pendjari (WAP). Ce parc qui constitue une destination touristique pour le Bénin bénéficie de l’attention soutenue du gouvernement béninois depuis 2016. Mais les questions sécuritaires et de pandémie de COVID-19 ont fait chuter les fréquentations de manière drastique impactant négativement les flux financiers que brasse le Parc.
Jean-Claude KOUAGOU
Faut-il soutenir que le Parc national de la Pendjari est en dépression économique ou en récession économique ? Les deux expressions valent, mais il est plus convenable de lui attribuer la récession économique. En effet, la dépression est une forme grave de crise économique induite par une diminution importante et durable de la production. En somme, la dépression économique désignerait une chute importante et durable de l’activité. Selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), une diminution de production sur deux trimestres consécutifs est considérée comme une récession qui se définit de deux manières. La récession est un phénomène de ralentissement du rythme de la croissance économique. En outre, la récession est une chute du produit intérieur brut (PIB). Ainsi, pour l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), un pays entre en récession quand son PIB se replie pendant au moins deux trimestres consécutifs. Aux Etats-Unis, la récession est définie comme « une baisse significative répandue dans l’ensemble de l’économie qui dure plus que quelques mois et qui affecte à la fois le PIB, les revenus, la production industrielle, l’emploi et le commerce de gros et de détail». Depuis 2019 les activités économiques dans le parc national de la Pendjari n’évoluent plus au rythme normal. Déjà, le 10 mai 2019, deux militaires français, commandos Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello ont trouvé la mort en tentant de libérer deux otages français après l’assassinat le 4 mai 2019 du guide touristique béninois Fiacre Gbédji. Cette situation regrettable avait entraîné aussitôt une première fermeture du parc de la Pendjari pour des raisons sécuritaires. Il fallait attendre 5 mois après pour voir rouvrir les portes du Parc le 15 octobre 2019. Il est à souligner que la période allant de mai à octobre est d’ordinaire une saison touristique morte du fait du pic de la pluviométrie. Depuis lors, le Parc a terminé la saison touristique au ralenti avec une fréquentation en baisse. Il a fait sa rentrée le 15 octobre 2019, avec de nouvelles mesures de sécurité, une collaboration avec le parc national d’Arly au Burkina et l’augmentation des effectifs des Rangers de African Park, l’ONG qui en a la gestion. Avec la pandémie de COVID-19, les activités dans le parc ont encore baissé en intensité. Les nombreuses mesures barrières édictées par l’Exécutif béninois ainsi que la progression des terroristes du Sahel vers le Bénin ont compliqué la situation. De sources concordantes, « le tourisme dans le Parc est provisoirement suspendu depuis fin janvier 2022 en raison du contexte sécuritaire dans les zones frontalières entre le Bénin et le Burkina Faso». Cette nouvelle suspension intervient après la rentrée touristique 2021 – 2022 effectuée le 15 novembre 2021 à Natitingou.
Des capitaux non captés
En haute saison touristique, le Parc de la Pendjari offre l’occasion de brassage de capitaux. Des acteurs directs et indirects tirent profit de la vitalité du Parc. Au 31 octobre 2021, le nombre de personnes ayant visité le Parc est de 6.293 dont 2.441 visiteurs payants, 3.852 non payants. 1.850 sont des visiteurs béninois résidents (payants), 05 agences agréés + 7 agences non agréées dont 1 du Ghana, 2 du Togo, 1 du Nigeria, 1 de la Côte d’Ivoire et 2 venant du Sud Bénin ont participé à la saison touristique 39 Guides ont travaillé avec le Parc national de la Pendjari pendant la saison touristique. Les prix et tarifs d’entrée au Parc national de la Pendjari sont définis en tenant compte de tranches d’âge. Ainsi, les adultes déboursent 10.000 FCFA, les jeunes, 5.000 FCFA, les enfants de plus de 7 ans sont assujettis à payer 3000 FCFA. Les frais de guide touristique s’élèvent à 5000 FCFA. Un calcul rapide sur 2.500 visiteurs payant chacun 10000 FCFA donne un net de 25 millions de francs FCFA issus des frais d’entrée au Parc. Ce montant peut être coefficié par 2 ou 3 suivant le nombre de jours passés dans le parc. Cela peut conduire à une recette variant entre 50 et 75 millions de francs. Les frais de Lodge et des chambres d’hôtel du complexe Tata Somba sont assez relevés. Les prix moyens sont de l’ordre de 25.000F la nuitée. En supposant que 2500 personnes ont payé le prix moyen de 25.000FCFA, le compte fait 62.500.000FCFA. Les prix de la restauration dans les réceptifs hôteliers du Parc varient de 7.500F à 25.000F. En multipliant une moyenne de 15.000F le plat par 2.000 visiteurs, les hôtels auraient engrangé 30.000.000FCFA. Par ailleurs, 39 guides ont travaillé avec le Parc national de la Pendjari pendant la saison touristique s’achevant en 2021, le montant des recettes issues du tourisme s’élève à 22.342.875 FCFA pour le tourisme de vision et 52.227.000 FCFA pour le tourisme cynégétique. Les lignes de recettes peuvent être multipliées. Car les taxes sur les voitures s’élèvent à 3.000F chacune. Par ailleurs, le nombre de jours passés dans le Parc peut être multiplié par 2, 3 ou 4 induisant pour chaque visiteur plus de dépenses et donc plus de recettes pour le Parc. En somme, pour une haute saison touristique qui s’étend raisonnablement d’octobre à mai, ce sont des centaines de millions de francs que mobilise le parc de la Pandjari. La contribution au PIB du tourisme béninois dont la Pendjari est un maillon important est d’environ 2%. Le gouvernement entend porter la contribution à 10% dans les années à venir. C’est donc autant de recettes qui ont échappé aux caisses de la Pendjari depuis que le parc est refermé en janvier 2022.
Historique de la création du Parc de la Pendjari
L’ancienne aire de chasse destinée à l’administration coloniale acquiert en 1954 le statut de réserve partielle de faune de la boucle de la Pendjari, avant de devenir réserve totale de faune de la Pendjari l’année suivante. En 1959 les zones cynégétiques de la Pendjari et de l’Atacora sont créées. La Réserve de faune devient le parc national de la Pendjari en 1961. Le 16 juin 1986, le statut de réserve de biosphère est accordé par l’UNESCO sous le nom de réserve de biosphère de la Pendjari (RBP). La réserve englobe, outre le parc, des zones de chasse et une zone tampon. Le 31 mars 2009, le ministère de l’Environnement et de la Protection de la nature du Bénin dépose auprès de l’UNESCO un dossier de candidature en vue de l’inscription du PNP sur la liste indicative du patrimoine mondial. Le 7 juillet 2017, le parc est inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO. En 2017, le gouvernement du Bénin et African Parks Net Work ont signé un partenariat pour réhabiliter le Parc national de la Pendjari, l’une des plus grandes et rares réserves protégées en Afrique de l’Ouest et du centre. L’objectif est de doubler la population sauvage du parc en une décennie, de développer un tourisme responsable et de rehausser le profil du parc en tant que destination, et assurer un développement économique et social axé sur la conservation au profit de la population béninoise. En janvier 2018, un partenariat de 23 millions de dollars Us a été annoncé pour protéger le parc avec des partenaires clés, notamment la Wyss Foundation, National Geographic, la Wildcat Foundation. En octobre 2020, la réserve de biosphère de la Pendjari (RBP) fusionne avec les deux réserves de biosphère frontalières appartenant au Burkina-Faso et au Niger pour donner naissance à une réserve de biosphère transfrontalière nommée réserve de biosphère transfrontière du Complexe W-Arly-Pendjari (WAP) et couvre une superficie de plus de 94.000 km². Par Arrêté année 2002 N° 2/109/P-SGD-CMSPAT du 29 juin 2020, le Préfet de l’Atacora a formalisé l’intégration de la zone de Séri à l’aire protégée du Parc national de la Pendjari. Il s’agit de la création de la forêt communautaire de Séri qui s’étend sur les territoires des communes de Tanguiéta, Kouandé et Kérou. Elle vise à maintenir l’intégrité de l’écosystème de la Réserve de Biosphère du Parc national de la Pendjari ainsi que le développement durable des communautés riveraines. La superficie du noyau central protégé est de 546,6 km² et celle de la zone tampon est de 668.66 km². Avec cette extension, la superficie du Complexe du Parc national de la Pendjari passse de 4.800 km² à 6.435 Km². Suivant le document stratégique relatif à l’extension, la composante Tanguiéta de l’aire centrale protégée de Séri sera classée en tant que zone cynégétique de Séri, et les composantes de Kérou et Kouandé seront classées comme des Ranchs de gibiers.
Des raisons de visiter le parc de la Pendjari
Le tourisme dans le parc de la Pendjari offre l’occasion de découvrir de paysages magnifiques et une faune abondante. Ces atouts font de la Pendjari un paradis pour les amoureux de la nature et les photographes. La Pendjari est la seule destination de safari en Afrique de l’Ouest qui offre la chance de voir au même endroit le lion et l’éléphant dans la nature. On y dénombre plus de 360 espèces d’oiseaux. Ces espèces ont été recensées, y compris des espèces rares comme le Pluvian Fluviatile et la Grue Couronnée. Isolée du tourisme de masse, la Pendjari offre une expérience de safari hors des sentiers battus et de la foule. Un safari en Pendjari peut être facilement combiné avec une baignade aux magnifiques chutes d’eau de Tanougou et des visites culturelles dans les maisons traditionnelles Tata Somba et les camps Peulh. En saison Sèche, d’octobre à avril, les températures oscillent entre 25°C et 30°C. Le parc est verdoyant et fertile. L’observation des oiseaux est particulièrement intéressante grâce aux cycles des migrations. Entre janvier et février, l’harmattan transportant le sable du Sahara pare le ciel d’un voile brumeux unique. L’herbe s’asséchant permet une meilleure visibilité. Mars et avril sont les mois les plus chauds de l’année et la meilleure période pour l’observation de la faune. L’herbe est rase et les animaux se rassemblent autour des derniers points d’eau que sont les marres hébergeant des hippopotames. La saison pluvieuse s’étend de mai à septembre. Pendant cette période, le paysage se transforme en une mer de végétation luxuriante. Le Parc National de la Pendjari, situé à 650 km de Cotonou et à 420 km de Ouagadougou dispose de 3 entrées : Porga au Nord-Ouest, Batia au Sud et Konkombri à l’Est. L’entrée principale étant celle de Batia dans la commune de Tanguiéta. L’entrée dans le parc peut se faire dès 6H du matin et au plus tard à 18H pour l’entrée de Batia et 17H pour les entrées de Porga et Konkombri. La conduite de nuit est interdite à l’intérieur du parc.