Face à la récurrence des conflits entre les agriculteurs et éleveurs, on assiste à un déplacement des éleveurs de Bembèrèkè de leurs localités d’origine vers des destinations lointaines comme le Ghana par exemple. Cet exode massif de ces acteurs pastoraux entraîne des conséquences néfastes sur l’animation du marché à bétail de Gamia dont les ressources permettent non seulement d’améliorer les revenus des usagers de ce marché (éleveurs, commerçants, restauratrices, transporteurs, vendeurs de corde, de vélos et de motos, etc.) mais aussi de contribuer considérablement à l’économie locale. C’est pour répondre à ces préoccupations et à la politique de sédentarisation promue par le Ministère de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche que le Fonds National de Développement Agricole (FNDA) a apporté son appui à la mairie et à l’Union Communale des Organisations Professionnelles d’Eleveurs de Ruminants (UCOPER) de Bembèrèkè. C’est à travers l’appel à projets sur son guichet 1.1, Subventions aux investissements structurants.
Long de 32 kilomètres, le couloir de passage de Gamia a été matérialisé par 336 balises d’une hauteur de 2 mètres chacune. Les balises sont implantées à intervalles de 100 mètres et recouvertes d’une couche de peinture indélébile de couleur blanche chapotée de rouge. Elles s’établissent en deux rangées qui matérialisent les limites gauche et droite du couloir de passage dont la largeur est de 50 mètres linéaires. Le couloir de passage de Gamia compte 3 centres de vaccination, 2 aires de pâturage et des retenues d’eau qui jalonnent son parcours.
La réception de cet ouvrage ce mercredi 23 octobre 2024 dans la localité de Takou-Gando, a réuni les parties prenantes au projet à savoir la Coopération suisse, le FNDA, la DDAEP Borgou, l’ATDA du Pôle 4, la Mairie de Bembèrèkè l’UDOPER, l’UCOPER autour des bénéficiaires venus des 14 villages de l’arrondissement de Gamia, notamment Ganro, Bouri, Bèrèkè, Gando, Takou, Basso, Biga.
Un outil de développement économique et d’inclusion sociale
Le couloir de passage de Gamia est un véritable outil de développement économique et d’inclusion sociale. En effet, l’élevage occupe une place centrale dans l’économie locale de Bembèrèkè avec un cheptel de 17 650 têtes de bovins pour un nombre total de 27 595 bénéficiaires dans le seul arrondissement de Gamia. De ce fait, l’élevage a une part considérable dans l’abondement en ressources de la commune. Mieux, le marché de Gamia est un important centre d’échanges de bétail dans le département du Borgou. De par sa position, il accueille des acheteurs venus de toutes les localités du département, et parfois au-delà du territoire national. En ce qui concerne l’inclusion sociale, le couloir de passage de Gamia facilite la mobilité du bétail tout en réduisant les conflits entre agriculteurs et éleveurs. Ainsi, cette infrastructure permet de sécuriser la mobilité pastorale surtout en saison des pluies et durant les périodes de petites transhumances, de faciliter l’accès aux points d’eau et aux aires de pâturages pour les animaux, de limiter l’occupation des espaces pastoraux par les champs de cultures et de prévenir par ricochet, les conflits entre agriculteurs et éleveurs devenus récurrents avec des dégâts matériels et des pertes en vies humaines.
Ils ont dit…
Orou Boun MANSA, Chef d’arrondissement de Gamia
Je remercie la Coopération Suisse, le FNDA, la DDAEP, l’ATDA, l’UDOPER, l’UCOPER, les élus ainsi que toutes les populations venues d’ailleurs. Aujourd’hui, nous exprimons notre joie après l’obtention de ce couloir de passage. Je voudrais remercier l’UCOPER Bembèrèkè qui a décidé que ce couloir arrive dans l’arrondissement de Gamia, c’est le fruit de nos efforts consentis depuis 2015 grâce à la contribution des agriculteurs et éleveurs de la commune. Il faut reconnaitre qu’entre ces derniers, il y a toujours eu des tiraillements et à un moment on a envie d’abandonner mais grâce à la participation des uns et des autres, nous avons pu tracer ce couloir. Un adage populaire dit que rien n’est fait tant qu’il reste à faire. Il reste donc beaucoup à faire dans l’arrondissement de Gamia car il n’y a plus de terre cultivable. Je prends l’engagement au nom des bénéficiaires de bien entretenir cette réalisation.
Demmon DJEGGA, Président de l’Union Départementale des Organisations Professionnelles d’Eleveurs de Ruminants (UDOPER) du Borgou et de l’Alibori
Je voudrais au nom des éleveurs et des agriculteurs remercier tous ceux qui ont permis la réalisation de ce couloir. C’est un besoin ressenti par tous parce que de nos jours, nous constatons malheureusement qu’une bonne partie de nos troupeaux sont partis dans l’Atacora, au Togo et au Ghana. A l’heure actuelle, les éleveurs qui sont partis ont constaté que cela n’en valait pas la peine parce qu’ils sont allés créer ou rencontrer les mêmes problèmes ailleurs. Nous sommes tous concernés, du propriétaire du bétail à son éleveur car il n’est pas aisé de savoir son bien hors du territoire national alors qu’on est au Bénin. Aux agro-éleveurs, je dirai que nous avons tous intérêt à bien entretenir et enrichir cet ouvrage, le seul que nous avons actuellement car nous sommes tous sensibilisés déjà par ce qui se passe dans notre sous-secteur. Et si nous entretenons bien cet existant, les bailleurs pourront encore se rappeler de nous.
Damien HOUNKPEVI, Directeur Départemental de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche du Borgou
Je voudrais remercier le FNDA, le consortium Swisscontact-LARES et la Coopération Suisse qui nous ont permis d’avoir ce couloir de passage. Il faut dire que c’est vraiment une joie pour nous parce que ce que nous enregistrons chaque jour comme répétition en termes de conflit entre agriculteurs et éleveurs est important. Et je crois que ce couloir de passage va limiter les conflits entre ces acteurs. C’est pourquoi je remercie les bailleurs qui ont permis la réalisation de cet ouvrage. Mon mot de fin, c’est de demander aux bénéficiaires de respecter l’utilisation de ce couloir. Ce faisant, j’invite les éleveurs à rester dans le couloir afin de limiter tout conflit. Je profite pour dire que la politique actuelle de l’Etat dans l’élevage, c’est surtout la sédentarisation et avec le tracé de ce couloir, nous verrons avec la mairie les possibilités de mettre à votre disposition suffisamment d’aliment au niveau des pâturages et d’eau au niveau du barrage. Et lorsque vous aurez cela, vous n’avez plus besoin de quitter le couloir et vous exposer aux problèmes avec les agriculteurs. Au nom du Ministre de tutelle, je voudrais vous témoigner notre disponibilité à vous accompagner.
Salihou ALIDOU, Chef Programme à la Coopération Suisse
La Coopération suisse salue le bon résultat auquel nous sommes parvenus avec cette réalisation du couloir de passage de Gamia et se réjouit de l’adoption à l’instant du projet sur l’assurance agricole en Conseil des ministres (ce mercredi 23 octobre 2024, ndlr) car nous prenons en charge entre autres les éleveurs de ruminants pour cette phase pilote. Au nom de la Directrice résidente empêchée, je voudrais exprimer ma gratitude au Chef d’arrondissement pour le travail préalable ayant facilité le balisage du couloir de passage et au Président de l’UDOPER la collaboration et la contribution significatives. Je voudrais rappeler que la Coopération Suisse finance aussi le FADEC Agriculture qui dispose de ressources utilisables pour les besoins supplémentaires. Réduire les conflits est l’une des préoccupations de la Suisse, c’est pourquoi un nouveau programme est lancé avec le Haut-Commissariat à la Sédentarisation qui va travailler sur les initiatives dans le secteur de l’élevage avec des infrastructures à ériger dans le sens de la cohésion sociale.