Née depuis 2012 dans l’objectif d’associer la doctrine en finances publiques à l’action et à la réflexion sur la question de la gouvernance financière en Afrique de l’Ouest, la Société Ouest Africaine de Finances Publiques (SOAFIP) joue sa partition pour l’émergence durable des Etats ouest africains en matière de performance financière. Le Professeur des universités et Enseignant à l’Université d’Abomey-Calavi, Nicaise MEDE et président (depuis décembre 2021) de la SOAFiP présente le bilan de la Société et ses perspectives pour les prochaines années.
L’économiste du Bénin : C’est quoi la Société Ouest africaine de Finances publiques ?
Professeur Nicaise MEDE : Comme son nom l’indique, la Société Ouest africaine de Finances publiques est une société savante et un think tank orienté vers la production scientifique de niveau universitaire sur les questions de finances publiques en Afrique et dans le monde.
C’est une société qui a une envergure régionale comme son nom le suggère et concerne l’ensemble des pays membres de l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA) avec un regard tout à fait intéressé sur les pays anglophones et lusophones de notre sous-région et donc, en conséquence, sur tout l’espace de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO).
Que fait concrètement la Société ouest africaine de finances publiques ?
La Société Ouest africaine de Finances publiques regroupe des universitaires et des chercheurs impliqués dans les travaux de finances publiques et notamment de la gouvernance financière dans nos Etats à travers ses productions novatrices pour impacter la vie de nos Etats en matière de performance financière.
Ce que nous faisons fondamentalement en tant que chercheur de haut niveau, c’est que nous mettons en perspective la pratique de la gouvernance financière de nos Etats et que nous portons un regard intéressé sur les recherches fondamentales en matière de finances publiques dans notre espace de prédilection et ceci nous conduit à faire des publications dans les revues scientifiques. Je note au passage que le dernier numéro (février 2022) de la Revue Française de Finances Publiques (revue dirigée par le Professeur Michel Bouvier et paraissant à Paris) a été consacré à l’examen de la notion de « faute de gestion » dans les pays membres de l’UEMOA. Cette série d’articles a été écrite par les membres de la task force de SOAFiP. Il y a également des publications d’ouvrages. Toute une série d’ouvrages ont été publiés par les membres de la SOAFiP dans les domaines aussi divers que les questions de comptabilité publique, l’évaluation du cadre normatif des finances publiques au sein de l’UEMOA depuis 2009, la question de la comptabilité des matières et du bilan patrimonial des Etats qui sont maintenant des exigences au niveau communautaire, un peu comme cela est demandé aux entreprises privées. La SOAFiP a en ligne de mire, en lien avec ses partenaires opérationnels, c’est-à-dire les centres de recherche universitaire, la conduite de travaux de haut niveau sur les lois organiques relatives aux lois de finances, la question de la performance dans la gestion financière des organismes publiques que sont l’Etat, les collectivités territoriales locales et les établissements publics.
La SOAFIP a également co-organisé des colloques scientifiques regroupant aussi bien des universitaires que des chercheurs des administrations publiques. Ce qui a conduit au sortir de ces colloques à des publications qui reflètent les soucis et l’exigence de coller aux impératifs de progrès dans la recherche d’une plus grande performance dans nos Etats.
La SOAFiP est née en 2012 et elle a déjà 10 ans aujourd’hui. Quel bilan peut-on faire des dix ans de la SOAFiP ?
Pour parler d’acquis, comprenez que la SOAFIP en tant que société savante, a, à son actif plus d’une dizaine de publications d’ouvrages de niveau universitaire sur les questions de finances publiques. La SOAFiP a eu à conduire également de grandes rencontres internationales dans les capitales des principaux pays couverts par notre société, en co-intelligence avec nos partenaires opérationnels au niveau des universités nationales. De Bamako à Lomé en passant par Dakar et Ouagadougou, des rencontres internationales de grand niveau et des thèmes pertinents ont été débattus dans une double perspective de recherche fondamentale et aussi de problem solving. Au demeurant, la SOAFiP s’occupe également et se donne comme devoir d’encadrer l’émergence des jeunes chercheurs qui s’intéressent aux questions de finances publiques. En ce sens, SOAFiP est un vivier de directeurs de thèses de doctorat en finances publiques. In fine, je peux dire que la SOAFiP se déploie un peu sur tous les compartiments de la chaîne opérationnelle des finances publiques et également de la chaîne stratégique des finances publiques en étant aussi bien avec les chercheurs qu’avec les actifs de l’administration des Etats tout en servant de référents aux jeunes pousses qui sont un peu l’avenir aussi bien de la recherche que de la gestion de finances publiques dans l’ensemble des pays de l’espace CEDEAO, et, pour l’instant, de manière plus évidente dans les pays membres de l’UEMOA.
Professeur, vous avez été élu à la tête de la SOAFiP récemment. Dites-nous vos priorités et perspectives ?
J’ai été élu président de la SOAFiP en décembre 2021 au cours de l’Assemblée générale extraordinaire de la SOAFiP qui s’est tenue à Bouaké en Côte d’Ivoire. Vous me demandez ensuite ce que sont les perspectives de la SOAFiP, à moyen et long termes. Je vous répondrai en disant que les perspectives correspondent à ce qu’on pourrait appeler la tradition. La tradition opérationnelle de la SOAFiP c’est-à-dire ce que nous faisons habituellement. Mon rôle en tant que président, c’est d’amplifier un peu cette tradition dans les années à venir et de donner une plus grande visibilité à la société, son implication dans les stratégies des organisations d’intégration régionale, la CEDEAO, l’UEMOA et une prise de participation plus évidente à ce qui se fait dans le domaine des finances publiques dans toute l’Union Africaine. Il est donc évident que les perspectives de cette nature nous amènent à nous intéresser à ce qui se passe en dehors de l’Afrique et à être une partie prenante du renouveau des finances publiques dans le monde étant entendu que depuis la décennie 1970, avec la double crise pétrolière de 1973 et 1979, les Etats ont appris à compter leurs sous, et qu’une oreille plus sollicitante est accordée aux questions de performance des finances publiques, lesquelles performances sont juridiquement consacrées par des textes officiels comme les directives portant cadre harmonisé des finances publiques au sein de l’UEMOA. Le conflit ukraino-russo-occidental remet tout ça au goût du jour ; malheureusement pour les contemporains et heureusement pour la postérité.
Que direz-vous pour conclure cet entretien ?
Je dirai simplement que, d’abord Albert Einstein a raison quand il dit que la pratique et la théorie sont complémentaires. Le père de la relativité générale disait ceci : « La théorie, c’est quand on sait tout et que rien ne fonctionne. La pratique, c’est quand tout fonctionne et que personne ne sait pourquoi ». La SOAFiP s’intéresse aux questions de finances publiques et travaille avec des théoriciens, des fondamentalistes des finances publiques. La SOAFiP intègre aussi en son sein, de grands praticiens des finances publiques. Ce qui fait de notre organisation, un ensemble complet qui marche sur ses deux pieds à savoir, la prise en compte des questions pratiques mais également la célébration des fondamentaux en matière de discours rationnel sur les finances publiques : la pensée financière prise comme objet de pensée et la praxis financière sublimée par les codes de la raison spéculative.
La SOAFiP qui a, entre autres, pour missions de soutenir et de développer la recherche en finances publiques et fiscalité en Afrique et à l’étranger, regroupe des individus, des chercheurs et des enseignants chercheurs d’une part et les sociétés nationales de finances publiques et assimilés d’autre part.
Le Conseil d’administration | |||
Président | Professeur Nicaise MEDE | Bénin | |
1er vice-présidente | Professeur Pélagie THEOUA, épouse N’DRI | Côte d’Ivoire | |
2è vice-président | Professeur KEBE DABAKH Abdelaziz | Sénégal | |
3è vice-président | Dr. ISSIFOU Adamou | Niger | |
4è vice-président | Dr. TOURE Cheickna | Mali | |
Le Conseil des Elders | |||
Elder | Professeur Eloi DIARRA | Mali | |
Elder | Professeur Salifou YONABA | Burkina-Faso | |
Elder | Professeur Félix TANO | Côte d’Ivoire |
Quelques productions scientifiques
Titres | Editeurs | Années |
Finances publiques | L’Harmattan | 2016 |
La LOLF dans tous les Etats |
Centre de production Universitaire (Université d’Abomey-Calavi) |
2016 |
Constitutions et documents financiers | L’Harmattan | 2018 |
Les nouveaux chantiers de finances publiques en Afrique |
L’Harmattan |
2019 |
Les grandes décisions de la Cour Constitutionnelle du Bénin |
L’Harmattan |
2020 |
Les recettes publiques en débats | L’Harmattan | 2020 |
Les finances de l’Etat burkinabè |
Presses Africaines |
2006 |
Les finances publiques entre globalisation et dynamique locale |
L’Harmattan |
2021 |
La mobilisation des ressources publiques dans le contexte du plan Sénégal Emergent (PSE) |
L’Harmattan |
2021 |