La corruption dans les passations de biens et services publics est un obstacle majeur à la croissance économique et au développement, selon la Commission économique des Nations-Unies pour l’Afrique (UNECA). Social Watch Bénin renchérit, soulignant que la corruption et l’inefficacité des marchés publics sont répandues en Afrique de l’Ouest et coûtent aux citoyens de la sous-région des sommes considérables qui auraient pu être dépensées pour fournir des biens publics et des services efficaces indispensables. Dans le domaine des infrastructures, qui est largement contrôlé par les pouvoirs publics, la corruption est tellement institutionnalisée que les Africains pensent qu’il est impossible de faire quoi que ce soit. Aux grands maux, de grands remèdes, dit-on.
Issa DA SILVA SIKITI
Dr Adam Elhiraika, Directeur de la division de la politique macroéconomique à l’UNECA, explique pourquoi la passation des marchés publics dans le secteur des infrastructures en Afrique reste vulnérable à la corruption. « Elle implique d’importantes sommes d’argent de l’État, des projets vastes et complexes, un contrôle direct par le gouvernement, de multiples acteurs et des liens contractuels, une fragmentation du secteur, une culture profondément ancrée du secret, et des lacunes en matière de capacités techniques aggravées par la multiplicité des processus et des procédures qui créent des possibilités d’abus. Ensuite, l’ingérence politique est plus importante dans les contrats liés aux infrastructures étant donné les sommes d’argent importantes en jeu, et enfin il existe des faiblesses dans les mécanismes de responsabilité et de transparence ».
Valérie, étudiante à l’université, se pose la question de savoir pourquoi en Afrique presque chaque gouvernement qui entre en fonction jure qu’il va entreprendre des réformes profondes pour enrayer la corruption dans la passation des marchés publics. « Tout le monde dit la même chose mais à la fin, la situation ne change pas. Quelques temps après, on entend à la radio que certaines personnes ont été arrêtées et écrouées pour des actes de corruption liés aux marchés publics. Et où en est-on avec ces réformes ? Qu’est-ce qui se passe réellement ? »
Mauvaise gouvernance
« Malgré une série de réformes, la corruption continue d’affecter les systèmes de passation de marchés en Afrique, principalement en raison de la mauvaise gouvernance », a déploré Dr Adam Elhiraika, dans un document de recherche.
Ce haut-fonctionnaire de l’ONU a appelé les États à adopter les meilleures pratiques rentables et durables (rapport qualité-prix et achats écologiques), à améliorer et renforcer les mécanismes d’application, à assurer la transparence dans les achats et la participation multipartite, à réviser les cadres réglementaires pour faire face aux formes émergentes et sophistiquées d’abus découlant de cycles de projets complexes. Il a aussi recommandé de combler l’énorme déficit de données sur les marchés publics.
Quant à Social Watch Bénin, il a plaidé à rendre obligatoire la déclaration de conflit d’intérêts par les responsables impliqués dans l’évaluation des offres. « Ces fonctionnaires devraient déclarer s’ils ont des conflits par écrit et que les fausses déclarations devraient équivaloir à un parjure devant un tribunal ».