Face aux défis économiques auxquels sont confrontés les Pays à revenu intermédiaire, la CNUCED, par la voix de son Secrétaire général adjoint, Pedro Manuel Moreno, plaide pour une nouvelle dynamique mondiale. C’est lors d’un discours prononcé à l’occasion d’une conférence de haut niveau à Rabat, au Maroc, le 06 février 2024.
Falco Vignon
Alors que les pays à revenu intermédiaire représentent environ 75 % de la population mondiale et abritent 62 % des personnes vivant dans la pauvreté, ils font face à un manque de soutien international crucial pour répondre aux besoins de leurs citoyens. Confrontés à une dette croissante et vulnérables sur le plan climatique, ces États peinent à obtenir le soutien nécessaire. La Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) appelle à un engagement renforcé envers ces pays. M. Moreno, chef adjoint de la CNUCED, souligne : « Si nous aspirons à créer un monde de prospérité partagée, ces pays ont besoin de notre soutien ». Peu de pays à revenu intermédiaire ont réussi à rattraper les économies avancées au fil des décennies, et certains ont même connu une diminution de leur revenu par habitant. Cette tendance décourageante résulte de la complexité des changements structurels et de la croissance, en particulier lorsque les avantages initiaux du passage de la main-d’œuvre de l’agriculture à l’industrie manufacturière s’amenuisent. Avec le déclin de la main-d’œuvre rurale sous-employée à mesure que ces économies se développent, il devient essentiel pour elles d’acquérir les capacités nécessaires pour innover et éviter le « piège du revenu moyen ».
Le rôle essentiel des politiques industrielles
Moreno a souligné l’importance cruciale des politiques industrielles pour aider certains pays à éviter le piège de la stagnation économique, en citant des exemples de succès en Asie de l’Est, notamment en République de Corée. Ces nations ont capitalisé sur leurs compétences industrielles existantes pour diversifier et étendre de nouveaux secteurs de production et d’exportation, en se tournant vers des domaines plus sophistiqués et à plus forte valeur ajoutée tels que l’acier et l’électronique. M. Moreno a déclaré : « Au cœur de ces réussites se trouvaient des politiques industrielles ciblées. » Il a également noté que bien que ces politiques aient été délaissées il y a quelques années, elles suscitent désormais un regain d’intérêt, et ce pour des raisons valables.
Nécessité d’alléger le fardeau croissant de la dette
Le vice-président de la CNUCED a toutefois souligné que la mise en œuvre de ces stratégies nécessiterait une marge budgétaire, actuellement restreinte dans les pays à revenu intermédiaire en raison du poids croissant de la dette et de l’accès limité au financement. Actuellement, 3,3 milliards de personnes vivent dans des pays où le remboursement de la dette dépasse les dépenses consacrées à la santé ou à l’éducation. La majorité de ces personnes résident dans des pays à revenu intermédiaire, qui ne sont pas éligibles à un allègement de la dette via le cadre commun du G20. Le responsable a réaffirmé l’appel de la CNUCED en faveur d’un mécanisme efficace d’allègement de la dette, permettant la suspension des paiements, l’extension de la durée des prêts et la réduction des taux d’intérêt. Il a également plaidé en faveur d’un financement d’urgence abordable et à long terme pour favoriser l’investissement dans ces pays, soulignant que la recapitalisation des banques multilatérales de développement constitue une solution viable. Il a précisé que la CNUCED soutient pleinement l’appel du Secrétaire général de l’ONU en faveur d’un soutien financier annuel d’au moins 500 milliards de dollars pour atteindre les objectifs de développement durable.
Le potentiel des technologies vertes
Moreno a souligné l’importance cruciale des politiques industrielles pour exploiter le potentiel « vert » des pays à revenu intermédiaire. Il a affirmé que les énergies renouvelables et la transition énergétique offrent des opportunités considérables dans ces nations, citant le Maroc en exemple. Actuellement doté de l’un des plus vastes parcs éoliens d’Afrique, le Maroc pourrait également devenir un acteur majeur dans l’exportation d’énergie solaire. Cependant, la réalisation de ce potentiel dépend d’un accès rapide aux technologies propres. Moreno a souligné que la transition énergétique est inenvisageable sans une large diffusion des technologies vertes, ajoutant que leur accès rapide et généralisé est dans l’intérêt commun de tous.