La place de la femme dans le processus de développement d’une nation n’est plus chose à dire. Au Bénin, elles sont nombreuses qui, depuis quelques années exercent dans les mêmes conditions que les hommes pour l’essor de l’économie quel que soit leur secteur. C’est le cas de la cheffe de la cellule genre et développement du ministère de l’Energie, avec rang de Directrice technique, Anne-Marie Gnancadja Bonou. A travers cette interview, elle nous permet une incursion dans sa vie, son travail et les réalités de son quotidien.
Lire ci-dessous, l’intégralité de ladite interview.
L’économiste du Bénin : Comment pouvez-vous présenter votre travail ?
Anne-Marie Gnancadja Bonou : Mon travail consiste à veiller et assurer l’intégration du genre dans les actions, activités, projets et programmes du secteur de l’énergie au Bénin en vue de la réduction des inégalités sociales dans l’accès à l’énergie et aux services. De même, je suis appelée à veiller à la prise en compte de la dimension ou de l’approche genre de façon transversale aux niveaux institutionnel, programmatique et partenarial.
Donnez-nous un bref aperçu de votre cursus scolaire jusqu’à l’université.
Je suis titulaire du CEFEB, du BEPC et CAP/EB, d’un baccalauréat G1, d’une maîtrise en Sociologie-Anthropologie, d’un Diplôme d’Etudes Supérieure et Spécialisée en Gestion des Projets et Développement Local (DESS GPDL) et d’un Diplôme d’expert en Genre et Développement : Institut des Hautes Etudes Internationales et du Développement (Genève, Suisse)
Pourquoi avoir choisi de faire carrière dans les métiers liés à l’énergie solaire/énergie ?
J’ai commencé ma carrière professionnelle au ministère de l’Energie. Et je m’y plais bien vu la diversité de ce secteur.
Qu’est-ce qui vous a motivé à avancer malgré tous les préjugés auxquels font face les femmes dans la société béninoise ?
Je reconnais que dans un passé récent le secteur de l’énergie était fortement masculin donc réservé aux hommes. Mais beaucoup de choses ont changé, des lignes ont bouché ces années derrières où les femmes sont représentées dans ledit secteur. Je peux aujourd’hui, compter des femmes professionnelles du métier de l’énergie, ingénieures etc, des femmes actrices, para énergéticiennes, des entrepreneures qui ont une connaissance certaine du domaine. Le secteur de l’énergie est très passionnant pour moi, c’est un secteur de développement, porteur d’activités et de plus-value. J’ai compris en réalité que quand bien même qu’il est masculinisé, le principal utilisateur de l’énergie sous toutes ses formes est la femme.
Par exemple : dans certaines de nos cultures, aller chercher du bois énergie est une tâche réservée à la femme qui en est l’utilisatrice ; la transformation du bois de chauffe en charbon, on voyait plus les femmes dans cette activité, du moment où les hommes ont compris que c’est une activité, source de revenus important, ils s’y sont investis, etc.
Quels sont les avantages dont bénéficie une femme qui travaille dans le secteur solaire/énergie ?
Les avantages sont énormes aujourd’hui, car elles ne sont pas nombreuses pour le moment. Les femmes sont très encouragées pour travailler dans le secteur, à travers le monde entier et au Bénin en particulier, des mesures d’accompagnement et d’encouragement sont mises à leur disposition pour les motiver à travailler ou entreprendre dans l’énergie. Il y a par exemple des bourses de formations professionnelles ou autres formations pour leur autonomisation, des accompagnements financiers, des prêts à taux réduit, etc.
Des activités visant à orienter et encourager les jeunes filles dans le secteur de l’énergie sont organisées. Il y a une confiance et une volonté manifeste de la part des partenaires techniques au développement à accompagner, soutenir et appuyer les femmes du secteur de l’énergie à développer leurs aptitudes, leurs initiatives dans les énergies renouvelables et la biomasse…. En d’autres termes, de nos jours il y a plusieurs opportunités pour la femme à s’investir dans le secteur de l’énergie.
Quelles difficultés avez-vous rencontrées lors de votre formation ?
Personnellement aucune. Mais le constat fait est que certains hommes techniciens du secteur ne sont pas encore prêts à accepter qu’une femme du même niveau qu’eux ou plus soit leur cheffe.
Comment arrivez-vous à cumuler les responsabilités professionnelles et professionnelles ? Vous est-il déjà arrivé de partir au travail le cœur serré parce que vous auriez voulu rester à la maison pour vous occuper de votre progéniture ?
J’arrive à cumuler aisément mes responsabilités professionnelles et matrimoniales avec complexité et la complémentarité de mon époux.
A vrai dire, il m’est arrivé une fois d’avoir le cœur serré…. pour m’occuper de ma progéniture. Seulement que la réalité est là, il faut que je travaille pour subvenir à leur éducation, besoins en complémentarité à mon époux. Et surtout pour avoir mon autonomie économique et une indépendance financière.
Quel regard portez-vous sur la femme au sein de la société béninoise ?
C’est un regard positif, car la femme béninoise aujourd’hui a atteint une certaine maturité de pensée pour son autonomisation dans tous les domaines. Elle travaille pour.
L’émancipation de la femme est quelque part un frein à son épanouissement au sein de sa famille car on remarque que plus la femme est évoluée plus elle a des difficultés à s’équilibrer sur le plan matrimonial.
C’est discutable, parce que la femme émancipée qui se voit affranchir d’une autorité, d’une domination… doit faire l’effort de concilier les rôles qui lui sont dédiés à savoir : femme émancipée, femme au foyer et mère. Certes ce n’est pas facile mais la tête sur les épaules, elle peut parvenir à faire l’équilibre sur le plan professionnel et matrimonial en faisant la part des choses. Car l’époux reste l’époux. A moins qu’elle opte pour une vie de célibat…, nos réalités socio culturelles sont là.
Quelle est la responsabilité des femmes dans cet état de choses puisqu’elles ont des difficultés à se soumettre à leurs époux quand elles assument des responsabilités professionnelles ?
C’est vrai, c’est une réalité mais c’est discutable, je pense que c’est un complexe de la part de certains hommes d’avoir une femme d’un niveau moins élevé que eux. Ils pensent qu’ils ne seront pas respectés au même titre que si c’était le contraire. C’est l’esprit d’avoir le pouvoir de dominer la femme étant donné que nous sommes dans une société patriarcale où l’homme est le chef, les hante toujours.
Quelle est la responsabilité des femmes dans cet état de choses puisqu’elles ont des difficultés à se soumettre à leurs époux quand elles assument des responsabilités professionnelles ?
La responsabilité de la femme est de donner toujours à son mari la place qui lui revient, de le respecter en tant que mari et de le mettre en confiance. La femme doit nécessairement faire la part des choses. Assumer ses responsabilités professionnelles ne sont pas synonyme de abandonner ses responsabilités matrimoniales. Il faut toujours et en tout temps faire la part des choses pour vivre une vie harmonieuse. Mieux la femme gère sa vie matrimoniale, mieux elle est performante dans sa vie professionnelle.
Quels conseils avez-vous à l’endroit des femmes pour leur émancipation ?
Je conseille aux femmes pour leur émancipation d’être présentes sur le marché du travail, dans les activités dites masculines, gagner en autonomie et en reconnaissance. Dans cette affirmation qu’elle pense à leur rôle d’épouse et de mère pour la paix et l’harmonie au sein du foyer.
Avez-vous une préoccupation particulière à aborder ?
Je m’engage à travailler pour une meilleure représentativité des femmes du secteur de l’énergie sur le marché du travail et des affaires. Merci Interview réalisée par Nafiou OGOUCHOLA