C’est en Afrique que se trouve la Silicon Valley de la banque parce que c’est sur ce continent que la banque de détail est en train de se réinventer.
Avec 80 à 90% de la population hors du système bancaire et 100% de la population active équipée d’au moins un téléphone mobile, il est naturel que la banque mobile digitale se construise et se déploie pour servir ces populations. L’inclusion financière est un formidable Eldorado pour les banquiers africains qui vont utiliser les toutes dernières technologies informatiques pour conquérir ce nouveau marché.
L’Europe et les US sont à la traîne car ils sont bloqués par un marché totalement saturé. Les banquiers occidentaux mettront donc plus de temps que les banquiers africains à rentrer dans l’histoire de la banque digitale.
Avec l’arrivée du digital, nos vies ont changé et nous ne nous rappelons plus comment nous gérions nos itinéraires, nos mails, nos photos, nos rendez-vous et nos alertes dans le monde d’avant. C’est donc des banquiers africains que nous attendons la création de cette banque réinventée et qui va enfin correspondre à nos nouvelles vies.
Ceci est d’autant plus stratégique que l’économie africaine ne pourra pas émerger tant que la population ne sera pas bancarisée et restera dans l’informel. Il s’agit évidemment de sécuriser et de faciliter les échanges et les mouvements d’argent mais il s’agit surtout de mobiliser l’épargne locale afin de financer l’économie. Avec cette double responsabilité, les banquiers africains sont au cœur du développement de leur pays.
Mais attention, la question n’est pas de savoir s’il faut bancariser la population. La question est de savoir qui va le faire. Il est maintenant évident que les opérateurs télécoms s’attaquent à une partie de la chaîne de valeur bancaire. Le succès d’Orange, Vodacom et MTN avec leurs services de mobile money sont autant de signes inquiétants pour les banques. Jusqu’à présent, le contrôle des technologies mobiles leur permettait de se réfugier derrière cette barrière qui semblait infranchissable. Maintenant, la technologie est disponible pour tous les banquiers et indépendamment des opérateurs télécoms. Comme le prouvent la Société Générale avec YUP !, TMB avec Pepele mobile ou encore Coris avec Coris Money, la banque peut déployer des activités rentables pour viser l’inclusion financière avec succès et de façon autonome.
Là aussi, la responsabilité des banques face au développement socio-économique du continent est centrale, parce que l’objectif des opérateurs télécoms n’est évidemment pas de financer l’économie. Et que dire des GAFA et autre géants californiens ou chinois, en embuscade pour emporter la mise du futur système bancaire continental si les banquiers africains ne bougent pas. À bon entendeur…
Yves Eonnet, PDG et co-fondateur de TagPay