Les remises migratoires vers les pays à revenus faibles et intermédiaires sont en déclin en raison de la pandémie du Covid-19 et les mesures de confinement. En Afrique subsaharienne, la chute des envois de fonds est de 23,1 % selon un nouveau rapport de la Banque mondiale.
Félicienne HOUESSOU
Les envois de fond, plombés par la crise économique induite par la pandémie de Covid-19, devraient chuter dans toutes les régions où œuvre le Groupe de la Banque mondiale. Ce déclin sera plus marquant en Europe et en Asie centrale avec un taux de 27,5 % ; vient ensuite l’Afrique subsaharienne avec 23,1 %. Au plan mondial, le repli est d’environ 20 %. Les études de la Banque mondiale ont démontré que les transferts d’argent dans les pays à revenus faibles et intermédiaires permettent l’allégement de la pauvreté, l’amélioration de la situation nutritionnelle, la hausse des dépenses d’éducation et la diminution du travail des enfants dans les familles défavorisées. « Une chute de ces envois affecte la capacité des familles à assumer ces dépenses puisqu’une part accrue de leur budget sera consacrée à éviter les pénuries alimentaires et, subvenir aux besoins immédiats du ménage », peut-on lire dans le communiqué de l’institution financière. Dans les pays à revenus faibles et intermédiaires, le repli des remises migratoires est chiffré à 445 milliards de dollars, avec à la clé, la disparition d’une planche de salut financière vitale pour de nombreux ménages vulnérables. Pour David Malpass, président du Groupe de la Banque mondiale, les remises migratoires sont une source vitale de revenus pour les pays en développement et, la récession économique causée par la pandémie de COVID-19 met sérieusement à mal la capacité des migrants à envoyer de l’argent chez eux et, rend d’autant plus importante la nécessité d’accélérer la vitesse de rétablissement des économies avancées. « Les envois de fonds des migrants aident les familles à assurer leurs dépenses alimentaires et de santé et à subvenir à leurs besoins essentiels. Alors que le Groupe de la Banque mondiale déploie des mesures rapides et d’envergure pour soutenir les pays, nous nous efforçons de maintenir les canaux de circulation de ces fonds pour préserver l’accès des communautés les plus démunies à ces biens vitaux», a-t-il annoncé. La communauté internationale et les pays du G20 exécutent un travail conjoint avec la Banque mondiale en vue de réduire les coûts des transferts et d’améliorer l’inclusion financière au profit des populations pauvres.
Un possible redressement en 2021
L’année 2019 avait enregistré un niveau record de transferts d’argent vers les pays à revenus faibles et intermédiaire évalué à 554 milliards de dollars, soit environ 334315 milliards FCFA. Les remises migratoires étant une étape importante dans le suivi des flux de capitaux vers les pays en développement, l’effondrement engendré par le Covid-19 a fait dégringoler des chiffres de 2020. Mais 2021 promet de relever la pente. Si l’on s’en tient aux experts de la banque mondiale, les transferts d’argent pourraient atteindre 470 milliards de dollars (plus de 283624 milliards FCFA) l’année prochaine, soit une progression de 5,6 %. Néanmoins prévient l’étude, « Faute d’éléments précis pour mesurer l’impact de la pandémie de COVID-19 sur les perspectives de la croissance mondiale et des mesures prises pour enrayer la propagation du virus, l’évolution des envois de fonds est difficile à anticiper. D’habitude, ces flux ont tendance à être contracycliques, les travailleurs émigrés envoyant davantage d’argent en période de crise et de difficultés chez eux. Mais cette fois-ci, parce qu’elle touche toute la planète, la pandémie crée des incertitudes supplémentaires ». Notons qu’en Afrique subsaharienne le coût moyen d’un transfert reste élevé, à 9 %, au premier trimestre de 2020.
La région la plus chère en matière de transfert d’argent
En 2019 les envois de fonds vers la région de l’Asie de l’Est et Pacifique ont progressé de 2,6 %. La région Europe et Asie centrale sont restées solides en 2019, progressant d’environ 6 %. Dans la même année, la région d’Amérique latine et Caraïbes ainsi que la région du Moyen-Orient et l’Afrique du Nord ont augmenté respectivement de 7,4 % et 2,6 %. De même, les envois de fonds vers l’Asie du Sud ont enregistré une hausse de 6,1 %. Alors que les migrants intrarégionaux constituent les deux tiers de toutes les migrations internationales en provenance de la région, l’Afrique subsaharienne continue d’être la région la plus chère. L’Afrique subsaharienne est la seule région ayant connu de repli. « Les envois de fonds vers l’Afrique subsaharienne ont connu un léger repli de 0,5 % en 2019, à 48 milliards de dollars », a relevé la Banque mondiale. En raison de la crise du coronavirus, ce déclin devrait être nettement plus marqué en 2020, à 23,1 % pour atteindre 37 milliards de dollars, avant un redressement de 4 % attendu en 2021. « Des mesures rapides pour faciliter l’envoi et la réception de cet argent pourraient apporter une aide particulièrement bienvenue aux migrants et à leurs familles. Cela implique notamment de considérer les services de transfert comme essentiels et, de les rendre plus accessibles aux migrants », indique Dilip Ratha, auteur principal de la note et chef du programme KNOMAD. En plus des conséquences de la pandémie, les experts de l’institution financière pointent du doigt les invasions majeures de criquets pèlerins qui attaquent les cultures et, menacent la sécurité alimentaire des habitants.