Longtemps négligée par plusieurs ménages africains au profit de l’huile végétale, l’huile de palme est de retour sur la scène et est redevenue l’étoile montante des cuisines à cause des circonstances géopolitiques actuelles. Une opportunité pour les pays producteurs de redoubler d’efforts ?
Issa SIKITI DA SILVA
« Cela fait presqu’un mois que je ne prépare plus avec de l’huile végétale. C’est trop cher et chaque jour les prix augmentent. Heureusement que l’huile de palme nous a sauvé la vie », a déclaré Patricia, une mère de famille de cinq enfants.
« J’ai renoué avec mon ancien amour, l’huile de palme. Ceci est un produit purement africain qu’on avait négligé. En ces temps qui courent, on n’a pas le choix car l’huile végétale se fait de plus en plus rare », dixit Joyce, veuve et mère de trois enfants.
Selon la FAO, l’indice des huiles végétales a augmenté de 4,2% en janvier pour atteindre des niveaux record, sous l’effet conjugué de la réduction des disponibilités à l’exportation ainsi que d’autres contraintes liées à l’offre, notamment les pénuries de main-d’œuvre et les conditions météorologiques défavorables.
Catalyseur ?
L’invasion de l’Ukraine par la Russie semble avoir empiré la situation. L’Ukraine contribue à 50% de l’approvisionnement mondial en huile végétale.
Selon bon nombre d’observateurs, la situation en Ukraine pourrait être un catalyseur pour les gouvernements des pays producteurs africains de l’huile de palme de mettre la main à la pâte afin d’augmenter la production.
Selon les scientifiques, l’huile de palme (« Elaeis guineensis ») tire ses origines en Afrique de l’Ouest. Mais curieusement l’Indonésie est actuellement le premier producteur d’huile de palme de la planète, avec près de 60% du volume mondial.
Bien que la contribution de l’Afrique aux approvisionnements mondiaux en huile de palme se soit atrophiée de 77% en 1961 à 4% en 2014, le continent détient toujours 24% (4,5 millions d’hectares) de la superficie mondiale cultivée en palmiers à huile dans les régions climatiquement adaptées de l’Afrique de l’Ouest et du Centre, selon la FAOSTAT Statistics Database.
En outre, en dépit de l’augmentation de la production mondiale au cours des 40 dernières années, la production africaine de l’huile de palme est restée stagnante, n’atteignant que près de 15% chaque année.
A en croire Fitch Solutions, cité par le site CommodAfrica, les problèmes structurels continueront de contraindre la croissance de la production de l’huile de palme sur les cinq prochaines années en Afrique de l’Ouest. Parmi ceux-ci, la faiblesse des droits de la propriété foncière, la difficulté de répondre aux exigences des programmes de durabilité et la contrebande.
Un autre frein à l’investissement, ajoute CommodAfrica, sont les préoccupations croissantes sur la durabilité qui inciteront les grandes entreprises asiatiques à se concentrer sur l’Asie du Sud-Est.
« En outre, ce sont principalement les petits exploitants qui produisent de l’huile de palme en Afrique de l’Ouest ce qui rend plus difficile sa traçabilité, une des conditions de la durabilité. Enfin, la contrebande d’huile de palme reste un défi pour les producteurs et décourage les plantations », a renchéri Fitch Solutions.