Le secteur de l’agriculture en Afrique fournit environ 80% des emplois et contribue à peu près 35% au Produit intérieur brut (PIB), selon l’ONU. Mais cela pourrait être plus si les jeunes africains, sur qui repose l’espoir de demain, pourraient être préparés dès le bas âge à s’adonner massivement à ce secteur considéré essentiel pour lutter contre l’insécurité alimentaire.
ISSA SIKITI DA SILVA
Au Bénin, pays à faible revenu dont l’agriculture contribue le tiers des richesses du pays, six jeunes sur dix interrogés par l’Economiste ont totalement rejeté de faire carrière dans l’agriculture, rêvant plutôt de travailler pour une société multinationale et pour le gouvernement. Par contre, deux jeunes gens sur ces dix rêvent de quitter le Bénin un jour pour aller vivre en France.
« Moi ? Dans le secteur de l’agriculture ? C’est ridicule. Je suis un futur parisien. Dès que je termine mes études, je quitterai ce pays at tout prix, même à bord d’une pirogue », a indiqué Ghislain, un jeune “cool” vivant à Cotonou.
Les phénomènes de migration, vers les zones urbaines et vers l’étranger, risquent de priver les pays africains de la main d’œuvre jeune nécessaire afin de moderniser leur secteur agricole, étape essentielle en vue de stimuler la croissance et la prospérité, a souligné José Graziano da Silva, l’ancien directeur général de la FAO.
« L’agriculture c’est pour les villageois. Moi je suis né en ville, j’étudie en ville et je vais travailler en ville dans un bureau bien climatisé du gouvernement, probablement du ministère des finances », a affirmé Michel, un étudiant en gestion.
Bas âge
« Il faut préparer les gens dès le bas âge à aimer et apprécier cette carrière. Il faut aussi que l’agriculture devienne un sujet de classe en Afrique, obligatoire dans toutes les écoles et à tous les niveaux, même jusqu’à l’université », a déclaré Kakpovi François, un agriculteur.
« Peut-être cela va aider nos jeunes à comprendre l’importance de ce secteur qui a la capacité de mettre fin à l’insécurité alimentaire si les leaders africains le prenaient très au sérieux », a-t-il ajouté.
« Il faut sensibiliser les jeunes à s’accrocher à ce domaine. Et les motiver aussi en leur octroyant des crédits agricoles qui pourraient leur servir de fonds de démarrage. Ce n’est pas qu’il n’y a pas des jeunes, certains manquent parfois une terre cultivable, une houe pour cultiver leur terre, un arrosoir et aussi des fertiliseurs. Et lorsqu’il ne trouve pas ces choses, il se décourage et quitte le village pour chercher du travail en ville », a expliqué Kakpovi François.
Digitalisation
Dans un continent où l’agriculture se trouve encore au niveau des houes, pelles, machettes, râteaux et arrosoirs, bon nombre d’observateurs lancent des appels incessants à « intensifier » et à digitaliser le secteur, dans l’espoir que cela pourrait attirer les jeunes à l’embrasser.
« La digitalisation va attirer beaucoup de jeunes gens comme vous dans l’agriculture. C’est vraiment la place où vous voudriez être », a déclaré Akinwumi Adesina aux 450 jeunes qui ont participé au sommet du Global Youth Institute aux Etats-Unis.