La gestion des déchets dans les villes bordant le lac Nokoué incombe désormais à la Société de gestion des déchets et de la salubrité (SGDS). Avec ses moyens modernes et sa stratégie de collecte, l’impact sur l’environnement et le cadre de vie, s’apprécie à l’aune de la célérité du ramassage des ordures et du traitement qui est fait de ces déchets solides.
Falco VIGNON
Fini avec les dépotoirs sauvages et les bas-fonds réceptacles des ordures ménagères dans le périmètre du Grand Nokoué. La Société de gestion des déchets et de la salubrité (SGDS) fait d’importants efforts dans le ramassage des ordures dans les villes de Porto-Novo, Sèmè-Podji, Cotonou, Abomey-Calavi et Ouidah qui ceinturent le Lac Nokoué. Cette société se charge par ailleurs de leur « transfèrement » vers des sites de décharge finaux sis à Takon dans la commune de Sakété et à Ouessè dans la commune de Ouidah. Pour exécuter cette mission, la SGDS s’appuie en partie sur des structures, notamment des Ong de pré-collecte des ordures ménagères. La SGDS a pris momentanément le relais au Centre de Valorisation des déchets en énergie renouvelable en agriculture (Valdera). En effet, c’est ce centre qui faisait la collecte, le tri et la transformation des déchets sur le campus de l’université d’Abomey-Calavi où sont nouvellement installés des bacs à ordures homologués par la SGDS. Avec les efforts de cette Société, le cadre de vie des citoyens du « Grand Nokoué » s’est nettement amélioré. En effet, renseigne la Responsable chargée de communication de la SGDS, Mme Assia LONGLADE, « avant 2016, la quantité d’ordures déversée dans la nature, notamment dans les bas-fonds et les dépotoirs sauvages était de 450.000 tonnes par année. Aujourd’hui, la donne a profondément changé. Car, à la charge de l’Etat, les ordures ménagères sont enlevées par des engins de différentes gammes suivant l’accessibilité ou non des zones ». De manière pratique, la quarantaine de camions bennes à ordures sont réparties les unes pour l’enlèvement des déchets dans 12 zones faciles d’accès et comprenant essentiellement les écoles, les institutions. Les autres camions bennes à ordures sillonnent les voies revêtues, les rues et espaces publics où sont installés 1200 bacs à ordures de 600L. Que ce soit dans les 12 zones faciles d’accès ou dans les rues et espaces publics, explique Mme LONGLADE, « les camions bennes à ordures se chargent des déchets et les transportent vers les sites des cinq (5) centres de transfert, l’un se trouvant derrière la clôture du camp Guézo en face du site qui abrite provisoirement le marché Gbégamey.
Intervention d’ONG partenaires
Des ONG dotées de tricycles par les bons soins de la SGDS, assurent la pré-collecte des ordures ménagères. Contrairement aux camions bennes à ordures qui chargent des déchets des lieux de production vers les centres de transfert, 600 tricycles interviennent dans 69 zones difficiles d’accès. Ils correspondent à 69 PME placées sous 35 superviseurs. La mission des tricycles consiste à parcourir leur zone d’intervention, enlever les ordures des ménages et les transporter vers 70 sites intermédiaires appelés points de regroupement. Ainsi du point de regroupement du quartier Agla-Hlazounto dans le 12ème arrondissement de Cotonou, au niveau des centres de regroupement se fait un tri. Après le tri, les camions Ampliroll de 15m³ prennent le relais des tricycles et acheminent les déchets au niveau des centres de transfert comme le font directement les camions bennes à ordures. C’est un travail à la chaîne qui fait intervenir 72 camions Ampliroll de double capacité que les premiers, soit 30m³. Ce sont ces derniers camions qui transportent les déchets des différents centres de transfert en direction de deux centres d’enfouissement technique. Il s’agit des centres d’enfouissement de Takon et de Ouessè où se fait un travail dit d’optimisation avec l’utilisation de géo-membrane, de gestion du lixiviat, de la gestion du biogaz et de la mise en œuvre de certains plans. Il convient de faire remarquer qu’après le tri sur les centres de transfert, les déchets sont répartis selon leur nature pour être valorisés. Dans cette optique certains déchets issus de tamisage sont destinés à produire du compost et d’autres sont destinés aux projets de recyclage et de sensibilisation. Le ministère du cadre de vie veille à l’application des directives qui le lient à la SGDS.
L’impact économique de la gestion des déchets
Avec la création de la SGDS en 2018, dix mille emplois directs et indirects sont programmés avec, un investissement de 57 milliards FCFA prévu sur 7 ans. Une seule hirondelle ne fait pas le printemps. Le Conseil des Béninois de France trouve pertinent d’accompagner le gouvernement béninois. Sur le Site fafrique.com, le CBF finance des projets dans ce sens. Ainsi, le projet ambitionne d’impacter 20 mille personnes sur les deux années à venir. Les femmes constituent plus de 95% des ressources humaines dans son opérationnalisation. La phase pilote en cours depuis quelques mois génère des revenus et favorise des partenariats avec plusieurs entreprises de la place. On peut donc dire qu’au-delà de l’aspect environnemental et sanitaire, cette réalisation présente un caractère social et de réduction de la pauvreté. Le CBF a financé à hauteur de 100.000 Euros, soit 65.538 168 FCFA les six méso-projets sélectionnés et a pu mobiliser 98,18% de financement dont est bénéficiaire le projet GBOBETO. A noter que les autres villes du Grand Nokoué vont accueillir les années à venir leurs unités de tri.
Historique du projet Grand Nokoué
Le Gouvernement du Bénin a initié le Projet de Modernisation de Gestion des Déchets Solides Ménagers pour adresser la problématique de gestion des déchets solides ménagers et de la salubrité dans le Grand Nokoué. Cette dernière se traduit premièrement par une augmentation permanente des déchets produits : plus de 400 000 tonnes de déchets à collecter et à gérer de façon durable sur un territoire d’environ 1 200 km2 soit 10% du territoire national en 2019 et, deuxièmement par un réseau routier pavé et bitumé du territoire du grand Nokoué de plus de 500 km en cours d’extension avec plus de 130 km de voies en cours d’asphaltage. La propreté de cette voirie et l’entretien des ouvrages de drainage des eaux pluviales constituent un impératif pour préserver la qualité de vie des populations et renforcer l’attractivité du territoire du Grand Nokoué. Ce projet fait partie des projets phares du Programme d’Action du Gouvernement (PAG 2016-2021) et s’inscrit dans l’opérationnalisation de l’axe stratégique 7 du Pilier 3 du PAG. A travers ce projet, le Gouvernement a décidé de pérenniser les investissements colossaux en cours depuis 2016 et ceux à venir, d’améliorer le cadre de vie des populations et de renforcer l’attractivité du territoire. Ce projet vise également à pérenniser les acquis du Projet d’Urgence de Gestion Environnementale en Milieu Urbain (PUGEMU) et à réduire la prévalence des maladies liées à l’insalubrité du cadre de vie. Pour la mise en œuvre du projet, le Gouvernement a créé en novembre 2018 la Société de Gestion des Déchets de la Salubrité du Grand Nokoué (SGDS-GN).
L’expérience de collecte du Centre Valdera de l’UAC
Avant la création de la SGDS, la collecte et le traitement des ordures à l’Université d’Abomey-Calavi étaient assurés par le Centre de Valorisation des déchets en énergie renouvelable en agriculture (Valdera) installé sur le campus. Professeur Placide Clédjo est le Directeur du Centre. Il fait l’historique du Centre Valdera. Le centre, dit-il, est né suite à l’insalubrité qu’on observait sur le campus d’Abomey-Calavi depuis la mandature du Recteur Brice Sinsin. Il a pour mission de collecter et de traiter les ordures de l’université. La collecte était organisée de sorte qu’on a placé des poubelles géo-référencées dans un ordinateur ce qui nous permet de les contrôler. Ensuite il y a des engins à deux roues communément appelés « pousse-pousse » qui font la collecte et les convoient vers le centre de traitement. L’université d’Abomey-Calavi produit entre 6 et 7 tonnes de déchets par jour. Mais, avec les prérogatives conférées à la SGDS, le Centre Valdera a momentanément perdu le contrôle de la collecte des ordures sur le Campus et ne peut donc les transformer. Or, le Centre Valdera s’identifie à un laboratoire universitaire et sert de centre d’application pour les étudiants en formation dans la gestion des ordures. Le Professeur Placide Clédjo et les nouvelles autorités rectorales verront avec l’Etat comment réhabiliter ce centre. Par ailleurs, l’objectif du centre Valdera est d’intervenir dans les 77 communes dans la collecte et le traitement des ordures. « Nous sommes déjà présents dans certaines communes comme Dogbo, Sèmè-Podji et plusieurs autres communes ont formulé des demandes », confie le Directeur du Centre Valdera. Il révèle que le centre a bénéficié de l’appui de Rotary International et a installé une branche à Allada où des jeunes sont formés à la valorisation des déchets. Les bénéficiaires de ces formations seront chargés de trier les déchets, de les valoriser, de prendre le compost et de commencer l’agriculture avec des projets dans le maraîchage.
Valorisation des déchets au Centre Valdera
Au campus de l’Université d’Abomey-Calavi, les déchets récupérés sont triés pour permettre d’enlever les sous-produits à valoriser. « Au nombre des sous-produits, nous avons en grande partie les feuilles mortes du fait d’une forte végétation sur le campus. Ensuite, il y a les feuilles de papier. Tout ce qui est biodégradable est récupéré et transformé en compost », déclare le professeur Placide Clédjo. Ce qui n’est pas biodégradable, poursuit-il, comme les sachets, les verres et les plastiques sont récupérés aussi séparément. Les plastiques et les sachets sont transformés en pavés. Les verres sont acheminés sur le site du Professeur Tchiwali qui fabrique les agglos (blocs de béton) pour la construction. Les verres sont broyés et mélangés avec du sable pour renforcer les agglos fabriqués. « En ce qui concerne les déchets liquides, notamment les boues de vidange, sont récupérés des cabines des étudiants, du centre de lagunage installé par l’EPAC que nous exploitons pour décanter les boues de vidange et obtenir de l’eau relativement claire qui permet d’arroser les plants », souligne le Directeur du Centre Valdera.
Biogaz et énergie renouvelable
Pour avoir suffisamment de la matière et produire du biogaz, il arrive que le Centre Valdera récupère les boues de vidange à l’extérieur du campus. Au centre Valdera, il y a 4 sections : la section des tris, la section de compostage, la section des plastiques et assimilés et enfin la section de bio-méthanisation qui fait le biogaz. D’après des services opérationnels du ministère en charge de l’énergie, les déchets ménagers notamment les restes de nourriture sont transformés par la technique de méthanisation pour produire de l’énergie. Il s’agit, explique-t-on, d’un système qui permet, par la fermentation, de convertir en énergie le gaz dégagé par la décomposition des déchets ménagers. C’est d’ailleurs un système qui est développé par le centre Songhaï. Les déchets ménagers peuvent donc être valorisés en biogaz pour la cuisson et par l’utilisation des bio-digesteurs.