Entre juillet 2020 et juin 2021, les africains ont reçu 105,6 milliards US de paiements en crypto monnaies, soit une augmentation de 1200% par rapport à l’année précédente, selon un dernier rapport publié par Chainalysis. Ces chiffres démontrent que lentement mais sûrement, les monnaies digitales gagnent du terrain en Afrique.
Issa SIKITI DA SILVA
Le Nigéria, le Kenya et l’Afrique du Sud figurent parmi les 10 premiers pays au monde pour l’utilisation de la cryptomonnaie, selon le rapport.
Bien que le continent africain ne reçoive que 2% de la valeur mondiale de toutes les crypto monnaies, leur croissance rapide transformera le financement dans une Afrique subsaharienne de plus en plus digitalisée et urbanisée.
Cette analyse afro-optimiste, contenue dans le récent rapport du « Foresight Africa 2022 » du Brookings Institution, émane d’Elijah Bitange Ndemo, professeur d’entrepreneuriat à la Faculté des sciences commerciales et de gestion de l’Université de Nairobi.
« Étant donné que les plateformes de cryptomonnaie contournent les services bancaires traditionnels en introduisant des services de prêt décentralisés d’égal à égal, elles peuvent aider à uniformiser les règles du jeu économiques et à étendre les options de financement aux marchés de clients mal desservis », a indiqué cet ancien secrétaire permanent des communications et technologies au ministère kenyan de l’information.
« En effet, les cryptomonnaies sont bien placées pour relever un certain nombre de défis économiques en Afrique subsaharienne, de la réduction des déficits de financement pour les secteurs des micro, petites et moyennes entreprises (MPME) à la facilitation du transfert de fonds ».
Malgré cette performance remarquable et une percée folle sur le continent, la majorité des états africains donnent l’impression d’être réticents à considérer la cryptomonnaie comme une monnaie légale. En février 2021, la Banque centrale du Nigeria (BCN) avait ordonné aux banques et autres institutions financières de fermer les comptes effectuant des transactions ou opérant sur des échanges de cryptomonnaie. Cependant, en octobre 2021 la BCN avait lancé la monnaie numérique appelée eNaira. Celle-ci ne fonctionne pas de la même manière que la cryptomonnaie (comme le Bitcoin) et est régulée par la BCN qui contrôle sa valeur, alors que les cryptomonnaies ne sont régulées par aucune banque.
Manque de connaissances
Selon les experts, le manque de connaissances approfondies sur la finance et surtout sur la monnaie digitale constitue un obstacle majeur pour l’adoption des cryptomonnaies en Afrique, d’où sa prohibition pure et simple par les gouvernements.
Elijah Bitange Ndemo a averti les gouvernements ne de pas « fermer la porte de l’écurie après que le cheval s’est enfui ».
« Les technologies de la blockchain constituent le futur, et tout effort pour les interdire – ou même intervenir de manière excessive dans leurs opérations – connaîtrait le même sort que les autres tentatives des États pour circonscrire les comportements.
A en croire ce spécialiste des TIC, restreindre les cryptomonnaies pour le moment, alors qu’elles facilitent les innovations et regorgent de potentiel, nuirait au financement de secteurs critiques tels que les MPME, le logement abordable et les envois de fonds au moment même où l’Afrique a le plus besoin de ces options.