En dépit des efforts engagés de part et d’autres, les inégalités entre les sexes persistent dans le monde. Dans une récente publication, la Conférence des nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced) a invité les Etats à améliorer les données sur le commerce et le genre.
S.T.
Si dans les pays développés, la lutte pour l’égalité a beaucoup progressé, permettant d’avoir une société plus égalitaire, dans les pays en développement, notamment en Afrique, le défi reste énorme en matière d’égalité des sexes. C’est ce qu’indique « L’indice de croissance inclusive » de la CNUCED. Selon l’indice qui est une mesure relative de l’égalité entre les sexes et qui prend comme référence le pays le plus performant, l’Islande, la position des régions les unes par rapport aux autres n’a pas beaucoup changé au cours des deux dernières décennies, bien que les économies développées en tant que groupe aient renforcé leur position de leader. Les pays nordiques, souligne la Cnuced, sont particulièrement performants. Ils sont en tête selon l’indice, de même que certaines économies d’Europe de l’Est comme la Slovaquie, la Slovénie et le Bélarus.
L’Amérique latine et les Caraïbes semblent être, en moyenne, la région en développement la plus égalitaire entre les sexes, avec le Chili, l’Argentine et le Mexique en tête. Les pays de la région ont tendance à se situer au centre de la répartition mondiale. L’Asie est la région où les écarts sont les plus importants. En tête, certains pays de la région, comme l’Azerbaïdjan, le Kazakhstan, Singapour et les Émirats arabes unis, font mieux que plusieurs nations développées. L’Afrique reste la région la moins égalitaire entre les sexes. Cependant, la moyenne de la région cache de grandes différences. Le Rwanda, l’Éthiopie et l’Afrique du Sud obtiennent des résultats supérieurs à la médiane de l’ensemble des pays. Une douzaine de pays en développement ont fait des progrès considérables, en remontant de plus de dix places. Sept d’entre eux se trouvent en Afrique subsaharienne.
Alléger le fardeau du travail d’assistance non rémunéré
L’édition 2022 de l’indice de croissance inclusive de la CNUCED comprend plus d’indicateurs d’égalité des sexes que les versions précédentes. Elle tient compte du rôle clé du travail d’assistance, que l’indice considère comme « l’ensemble des activités de soins rémunérées et non rémunérées utilisées comme intrants dans la production et dans le maintien de la main-d’œuvre ». Les activités d’assistance, quelle que soit leur forme, ont contribué à créer, aggraver et perpétuer les inégalités entre les femmes et les hommes. Partout, les femmes passent – ou ont passé jusqu’à récemment, plus de temps que les hommes à effectuer des travaux non rémunérés. Les recherches de l’ONU montrent que plus de femmes que d’hommes ont quitté le marché du travail en 2020 pour assumer le surcroît de travail d’assistance qu’impliquait l’obligation de se confiner en réponse à la pandémie de COVID-19. Cette année, dans la plupart des pays, la participation des femmes au marché du travail devrait rester inférieure aux niveaux pré-pandémiques, selon ONU Femmes.
Pour améliorer l’égalité des sexes partout dans le monde, la CNUCED appelle à investir davantage dans le secteur des soins dans tous les pays afin de soulager les femmes du fardeau historique que représente le travail non rémunéré – et pourtant essentiel, d’assistance, qui peut entraver leur instruction et leur épanouissement personnel et professionnel.
Améliorer les données sur le commerce et le genre
Les politiques commerciales peuvent être un outil puissant pour améliorer l’égalité des sexes. Mais comme les liens entre le commerce et le genre sont complexes et spécifiques au contexte, les gouvernements ont besoin de données nationales solides pour concevoir des politiques en réponse aux questions liées au genre. Or, la plupart des organismes gouvernementaux produisant des statistiques officielles ne disposent pas de données et d’outils nécessaires. Cela est particulièrement vrai dans les pays en développement et les économies émergentes, où, comme le montre l’indice, les inégalités entre les sexes sont plus prononcées.
La CNUCED et ses partenaires travaillent avec des gouvernements en Afrique, dans le Caucase et en Asie centrale pour renforcer leurs capacités à élaborer et utiliser des statistiques commerciales spécifiques aux sexes. Des études préliminaires dans des pays pilotes, comme la Géorgie, ont mis en évidence que l’écart entre les sexes en matière d’emploi est plus important dans les entreprises engagées dans le commerce international. Les femmes sont sous-représentées dans les secteurs nécessitant beaucoup de capital ou de technologie, comme l’industrie automobile, et sur-représentées dans les secteurs nécessitant une forte main-d’œuvre, comme l’industrie textile.
Dans de nombreux pays, les femmes et les hommes acquièrent donc des connaissances et des compétences diverses qui pourraient ne pas se transférer facilement d’un secteur à l’autre. Pour les femmes, cela signifie que, sans programmes de formation ciblés, elles ne bénéficieront probablement pas de salaires plus élevés ni de meilleures conditions de travail découlant de la progression des entreprises de ces pays dans les chaînes de valeur mondiales ; les décideurs politiques doivent en être conscients. Outre le renforcement des capacités statistiques dans les pays en développement et les pays émergents, la CNUCED reste déterminée à travailler avec les gouvernements et les partenaires afin de promouvoir de nouvelles recherches et de nouveaux cadres conceptuels sur les liens entre la parité et le commerce. L’organisation a contribué au premier Congrès mondial du commerce sur le genre en décembre 2022.