Par peur de nouvelles inflations sur le prix de biens et services, le gouvernement zimbabwéen annonce la création de sa monnaie dénommée « ZiG ». L’émission de cette devise devrait enrayer une inflation galopante montée à 55% en mars et stabiliser l’économie du pays. Les quelque 16 millions de Zimbabwéens sont en proie à une pauvreté généralisée et à un chômage élevé
Belmondo ATIKPO
Le Zimbabwe indique la voie à suivre à la CEDEAO qui tarde à créer sa propre monnaie. Plongé dans une grave crise économique depuis une vingtaine d’années, le Zimbabwe annonce l’adoption d’une nouvelle monnaie, le « ZiG », pour remplacer l’actuel dollar zimbabwéen. » Les banques convertiront les soldes actuellement libellés en dollars zimbabwéens dans la nouvelle monnaie baptisée l’Or du Zimbabwe (Zimbabwe Gold), ZiG », a déclaré le 6 avril le gouverneur de la Banque centrale John Mushayavanhu lors d’une conférence de presse. Le pays connaît l’un des taux d’inflation les plus élevés au monde, officiellement à 55% en mars après avoir atteint des taux à trois chiffres l’an dernier lors d’un dernier épisode d’hyperinflation qui avait ravivé de mauvais souvenirs. L’inflation hors de contrôle qui anéantit l’épargne et terrasse l’économie avait atteint un pourcentage de 500 milliards. Les prix augmentaient si vite que les étiquettes dans les rayons des magasins devaient être changées plusieurs fois par jour. La monnaie locale a perdu près de 100% de sa valeur par rapport au dollar américain au cours de l’année écoulée. Le dollar zimbabwéen s’échangeait le 6 avril à environ 30.000 pour un dollar américain, 40.000 sur le marché noir, selon l’observatoire Zim Price Check. L’économie du pays est plombée depuis une vingtaine d’années, marquée par des pénuries d’argent et de nourriture. Le ZiG est soutenu par 2,5 tonnes d’or et 100 millions de dollars de réserves en devises étrangères détenues par la Reserve Bank of Zimbabwe. Son introduction constitue la sixième tentative du gouvernement de se doter d’une monnaie locale stable au cours des quinze dernières années. Au total, en valeur, les réserves du pays s’élèvent à 285 millions de dollars. « Il est évident que nous avons besoin de plus », a estimé l’économiste Prosper Chitambara, expliquant que d’autres pays comme le grand voisin sud-africain disposent de réserves bien plus importantes. « Plus les réserves sont importantes, plus la confiance et la capacité à défendre sa monnaie contre les chocs sont grandes », a-t-il expliqué, estimant que le pays doit arrêter de faire marcher la planche à billets pour juguler l’inflation.
« Quand on introduit de nouvelles mesures, on espère apporter de la stabilité et une inflation inférieure. Mais le processus nécessite discipline et sincérité. Le Zimbabwéen ordinaire n’a pas la capacité d’injecter la liquidité dans l’économie, cette possibilité incombe aux autorités qui doivent être sincères à ce sujet », affirme Happy ZENGENI, économiste. « Comme vous le voyez, là j’ai 15.000 RTGS qui ne me permettent même pas d’acheter des bonbons. Je ne sais même pas comment m’en débarrasser, car personne n’en veut. Le 30 avril est encore loin, mais tous les prix ont augmenté d’un dollar », déplore Tinashe MUREHW, changeur. Avant l’annonce de la nouvelle monnaie adossée à l’or, le zimdollar se négociait à 28.720 contre 1 dollar américain. « Je vends des fruits pour vivre et j’avais économisé le Dollar RTG pendant un certain temps afin de payer les frais de scolarité de mes enfants, mais on nous informe au réveil que notre argent n’a plus de valeur, je ne sais même pas quoi faire », se plaint, Mildred Mapfumo, vendeuse. « Vous ne pouvez plus rien acheter pour 50 centimes. Au besoin, il faut prévoir le double. Ils auraient dû faire circuler la nouvelle monnaie le jour de son lancement. Après tout, nous échangeons la monnaie zimbabwéenne contre le dollar américain », déclare, Arnold Magaya, membre du syndicat des changeurs. Ceux qui perçoivent leur salaire en monnaie locale se précipitent généralement dans les bureaux de change le jour de paie pour tenter de prendre de vitesse une prochaine dévaluation.