Après les 926 millions de dollars reçus du Fonds monétaire international (FMI) en 2015 au titre du programme de Facilité de crédit prolongé (FEC), dette qu’il devrait finir de rembourser le 20 mars dernier, date d’expiration du programme, l’Etat ghanéen sous l’impulsion de son chef, le président Nana Akufo-Addo s’est résolu de voler de ses propres ailes. Un pari qui s’est révélé jusque là tenu avec des performances que réalise le pays depuis lors avec une réduction de l’inflation et un PIB au faîte de sa forme.
Bidossessi WANOU
Devant l’Éthiopie, le Produit intérieur brut (PIB) du Ghana passera en tête en Afrique, soit de 3,4% en 2016 à 8,1% en 2018 et le déficit réduit de 3%, soit de 9, 3% à 5,6% du PIB cette même année contre une inflation passée de 15,4% à 9,5% entre 2016 et 2019. En effet, au cours des campagnes présidentielles de 2016, l’actuel chef d’Etat ghanéen, Nana Akufo-Addo, a décidé de couper les ponts avec le Fonds monétaire international et de jouer plutôt avec les potentialités internes du Ghana pour le développement du pays. Le pays est ainsi parti pour voler de ses propres ailes. C’est alors qu’après qu’à la fin du programme de Facilité de crédit prolongé (FEC) le 20 mars 2019, le Ghana s’est résolu de ne pas le renouveler comme l’a insinué le président Nana Akufo-Addo dans son adresse au Parlement en fin d’année 2018. S’il est vrai qu’une telle décision a paru tendancieuse et ambitieuse, tout convainc maintenant de ce que l’Etat ghanéen a pris en amont ses dépostions et a joué avec ses prospections. Et pour cause, « Pour la première fois depuis un long moment, notre économie est solide et tous les indices cruciaux sont au vert », croit savoir le chef d’État, un an après son accession à la magistrature suprême ghanéenne. Pour plusieurs, ce fut un risque, une décision historique mais difficile que venait de prendre le président qui lui, savait pourtant là où il allait. En fait, « Notre reprise économique va financer notre budget » soutenait Nana Akufo-Addo. Face aux élus du peuple, il a en effet, montré son engagement à changer de paradigme et à pouvoir gérer le Ghana sans attendre un seul instant le Fonds monétaire international grâce à la croissance de son pays. Cap fut alors mis sur l’exploitation des ressources internes avec une orthodoxie financière sans faille.
Des dispositions économiques prises
Du Conseil fiscal au Conseil pour la stabilité pour renforcer les actions des instances de régulation existantes notamment la Banque centrale, la Commission nationale d’assurance (NIC), l’Autorité en charge des pensions (NRPA) et le Régulateur des marchés financiers (SEC), l’Etat ghanéen a développé de nouvelles offensives pour atteindre ses objectifs. Ces instances ainsi créées, sont destinées à assainir le cadre macroéconomique tout en limitant le déficit et autres impacts politiques économiques à 5% du Produit intérieur brut (PIB). Tout ceci a en effet, permis de conjuguer au passé les dysfonctionnements budgétaires et tout le risque qui y est lié. Les acquis issus de la collaboration avec le FMI notamment ont été considérablement renforcés notamment, avec l’adoption de la loi sur la gestion des finances publiques, l’amélioration de la gestion de la dette et le renforcement du secteur bancaire. Des efforts qu’a particulièrement salués Christine Lagarde qui estime que dans tous les cas, le Fonds monétaire aura été l’instigateur de tous ces efforts grâce aux FEC même si le pays n’a pas jugé opportun le renouvellement. « Le programme soutenu par le FMI a été un point d’ancrage pour un ajustement économique ordonné et un signal positif pour le marché. Au cours de cette période, les autorités ghanéennes ont réalisé d’importants progrès en matière de stabilité macroéconomique, l’inflation étant tombée à un seul chiffre et se situant désormais dans la fourchette de la Banque du Ghana » a en effet confié la directrice du FMI. Ce n’est pourtant pas l’analyse d’un expert du bureau d’analyse londonien qui explique que le Ghana dispose d’une économie « plus diversifiée que beaucoup de ses pairs en Afrique ». Son essor est dû à l’exploitation pétrolière depuis 2010, combiné à celui de deux autres ressources que sont l’or et le cacao dont le Ghana est le deuxième producteur du continent africain. Les investissements ont par ailleurs été accrus pour développer l’agriculture vivrière, et Nana Akufo-Addo s’est engagé à faire émerger une industrie manufacturière. Il évoque même une usine par district, au nombre de 216 dans le pays. Aussi, le pays jouit de bonnes grâces auprès de certaines institutions, vue l’orthodoxie financière inculquée par l’actuel chef d’Etat. C’est du moins ce que soutient une économiste sud-africaine pour qui estime que « le Ghana se distingue à présent d’autres bénéficiaires d’aides internationales par son sérieux dans la gestion de ses finances et dans la redéfinition de ses politiques publiques. Sérieux qui lui a permis de réduire considérablement l’inflation. Ainsi, la Banque centrale du pays a pu baisser de façon accélérée les taux d’intérêt, donnant au crédit à l’activité la possibilité de décoller sainement ».
LE FMI, une limite à l’autonomisation des nations
Sans le FMI, le Ghana a pu lever 20 milliards de dollars, soit 20 fois l’offre que lui a toujours miroité l’institution, 1 milliard de dollar. Mieux, le taux d’intérêt s’avère des plus avantageux. S’il est vrai que la résilience ghanéenne s’est nourrie de l’expérience avec le FMI comme entend exprimer Christine Lagarde qui déclare,« Je ne doute pas que le programme en valait la peine quand je regarde les chiffres, mais la bonne question est de savoir si le Ghana aurait fait la même chose sans notre soutien» ? En clair, il importe, que chaque Etat notamment africain, parte de l’expérience du Ghana pour développer des offensives à l’interne et pouvoir assurer avec conviction, ses charges financières indépendamment de l’institution. D’ailleurs, ce brillant succès du Ghana, analysent certains économistes, fait du FMI une arme aux mains des puissants qui pendant longtemps, continueront à faire main basse sur l’essor de certaines nations avec un taux d’endettement qui va croissant et qui ne sont résolue que par des mesures d’effacement. Pire, il s’avère qu’aucune des nations qui bénéficient des appuis du Fonds monétaire internationale et pires des institutions de Breton Wood n’ont pu jusque là, atteindre un niveau de développement conséquent. Contrairement au Ghana, nombre de pays africains peinent encore à prendre conscience des limites qu’ils se donnent avec cette institution dont les aides sont toutes conditionnées et n’offrent aucune facilité aux nations sinon plutôt les enfonce dans la disette. Les ex colonies françaises passent en tête dans ce processus d’asservissement et il faille en prendre inévitablement conscience pour le rayonnement du continent.