Si l’Afrique pourrait légaliser le cannabis, juste pour la recherche médicinale et les exportations, elle pourrait gagner 7 milliards de dollars US par an d’ici 2023. Ces chiffres publiés par l’African Cannabis Report, démontrent la puissance financière d’un secteur dont le continent produit 38 000 tonnes par an mais qui pourrait faire mieux s’il pouvait opérer dans la légalité.
Issa SIKITI DA SILVA
Au Bénin, un pays qui a un potentiel fort en agriculture mais dont la culture du cannabis se fait en secret, le produit est interdit et personne parmi les experts n’ose recommander sa légalisation malgré l’apport qu’il pourrait fournir à l’économie et les emplois qu’il pourrait créer.
« Le grand problème que nous avons au Bénin est que quand on évoque la légalisation du cannabis, tout le monde pense que les gens seront libres de le fumer en public, notamment dans les rues, dans les écoles ou même dans les stades », a déclaré un médecin sous couvert de l’anonymat par peur de représailles.
La légalisation devrait se faire seulement sur base de l’usage médical car certains composants du cannabis ont le pouvoir de traiter la douleur chronique et l’épilepsie et le THC (Tétrahydrocannabinol), qui est la principale partie psychoactive du cannabis, peut être prescrit pour augmenter l’appétit et prévenir les pertes musculaires associées à certains cancers et au sida.
« Comme le Bénin n’a pas la capacité d’entreprendre toutes ces recherches médicales, il pourrait exporter de vastes quantités du cannabis vers les pays développés qui l’ont légalisé et sont présentement dans le processus de faire des recherches approfondies et même fabriquer des médicaments à base du cannabis. Imaginez l’impact de ces millions de dollars sur l’économie et les emplois que ce secteur pourrait créer », a-t-il affirmé.
Décriminalisation
Entre 20 et 25 pays dans le monde ont déjà décriminalisé le cannabis, y compris le Lesotho et le Zimbabwe, et ce dernier a même octroyé une licence à la compagnie ‘’Precision Cannabis Therapeutics Zimbabwe’’ pour démarrer la production du cannabis à des fins commerciales.
Au Bénin, la police procède souvent à la destruction de champs de cannabis et à des arrestations de cultivateurs. Parfois, des importations du cannabis en provenance des pays voisins, comme le Togo et le Nigeria, sont saisies par la police qui garde un œil vigilant sur le commerce de ce produit considéré comme dangereux par la loi.
« Bien que largement cultivé à travers le continent, le cannabis est illégal dans la plupart des pays africains. Cependant, la région possède une riche expérience dans la culture du cannabis; malgré son illégalité, de nombreux travailleurs agricoles se sont tournés vers la culture du cannabis comme le seul moyen de gagner suffisamment d’argent pour subvenir aux besoins essentiels de leur famille », a indiqué l’African Cannabis Report dans son rapport publié le mois dernier.
Un travailleur agricole qui a pour nom Felix a confirmé les propos du rapport en disant que la tentation des fermiers de cultiver le cannabis dans les milieux ruraux est très forte. « Le cannabis est facile à planter et à entretenir car il n’exige pas beaucoup de choses contrairement à d’autres plantes. Il peut pousser dans toutes sortes de climats tout au long de l’année. Et le fait qu’il soit aussi interdit fait qu’il soit très attractif et très recherché. Quand les temps sont durs, la vente du cannabis peut sauver les meubles », a expliqué Felix.
« Avec des terres abordables, une main-d’œuvre bon marché et une main-d’œuvre agricole expérimentée, l’Afrique offre d’énormes possibilités aux jeunes pousses locales et aux sociétés étrangères qui souhaitent se développer », a poursuivi l’African Cannabis Report 2019.
Pour sa part, le Cannabis Consumer Research Team du Seaport Global Securities a estimé que le marché du cannabis va atteindre 630 milliards de dollars d’ici 2040.
Interdiction du cannabis photo
Légende : Les exportations du cannabis pourraient faire gagner l’Afrique 7 milliards de dollars par an.