(La Chine investit 300 milliards US en Afrique en 2024)
Pékin, la capitale chinoise accueille ce mercredi 04 septembre 2024, les travaux du 9e Forum Chine-Afrique. Plusieurs pays venus du continent dont le Bénin prennent part à ses assises sur les enjeux des partenariats économiques. La Vice-présidente de la République, Mariam Chabi Talata, représentant le chef de l’Etat, le ministre d’Etat en charge de l’économie et des finances, Romuald Wadagni et le ministre des Affaires étrangères, Olushegun Adjadi Bakari représentent le Bénin à ce forum.
Belmondo ATIKPO
Pendant 3 jours, du mercredi 04 au jeudi 06 septembre 2024, les dirigeants africains et chinois croiseront leur regard sur les sujets communs de développement à travers le thème du forum intitulé “rejoindre la main pour faire progresser la modernisation et construire une communauté sino-africaine de haut niveau avec un avenir partagé”. Le Bénin représenté par une forte délégation à cette rencontre entend tirer meilleur parti des travaux. La Vice-présidente de la République, Mariam Chabi Talata, le ministre d’Etat en charge de l’économie et des finances, Romuald Wadagni et le ministre des Affaires étrangères, Olushegun Adjadi Bakari vont multiplier des rencontres avec des hommes du pays de la Grande Muraille. En ligne de mire, la délégation béninoise veut décrocher de nouveaux débouchés pour faire prospérer son économie. La Chine s’est engagée à importer pour 300 milliards de dollars de marchandises en provenance d’Afrique entre 2022 et 2024. Elle a également offert 10 milliards de dollars pour améliorer la qualité des exportations africaines et une ligne de crédit de 10 milliards de dollars pour aider les petites et moyennes entreprises à exporter des produits de haute qualité sur les marchés chinois. Cependant, le suivi de ces engagements est difficile, et il n’est pas certain que ces objectifs soient atteints, ni quand ils pourraient l’être. Si le (Forum on China-Africa Coopération ou FOCAC) s’est imposé comme un forum unique, il est encore largement façonné par une dynamique donateur-bénéficiaire, dans laquelle les pays africains restent en retrait tandis que la Chine prend l’initiative d’une grande partie de l’ordre du jour.
Cela s’explique en partie par les faiblesses de la planification stratégique du côté africain. Alors que la Chine publie régulièrement des documents stratégiques complets sur l’Afrique, tels que les livres blancs de 2006, 2015 et 2021, les pays africains n’ont pas de stratégies cohérentes à l’égard de la Chine. Une grande partie du FOCAC se déroule à huis-clos et sans la présence d’experts indépendants. Cela exclut de nombreux acteurs africains de premier plan. Cela empêche également un contrôle efficace. C’est l’une des raisons pour lesquelles les résultats du FOCAC sont difficiles à quantifier, à suivre, à évaluer et à améliorer. Les citoyens africains demandent de plus en plus aux gouvernements africains de remédier à ces lacunes et à d’autres afin de garantir que les Africains ordinaires tirent le maximum de profit d’une initiative qui aime se présenter comme un modèle de « coopération gagnant-gagnant ».
FOCAC pour un partenariat gagnant-gagnant
Le sommet du FOCAC se réunit tous les trois ans, alternativement en Chine et en Afrique. Le seul autre sommet africain auquel participent des acteurs extérieurs et qui se réunit aussi régulièrement est la Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (Tokyo International Conference on African Development ou TICAD), qui s’est également réunie huit fois depuis son lancement. Le neuvième FOCAC aura une structure légèrement différente des précédents puisqu’il sera organisé autour de comités thématiques coprésidés par la Chine et un pays africain. La représentation chinoise proviendra très probablement du comité de suivi du FOCAC, composé de 37 agences chinoises. La réunion du FOCAC est le point culminant d’une série d’engagements visant à établir l’ordre du jour, en commençant par le corps diplomatique africain à Pékin, une réunion de hauts fonctionnaires qui rassemble les propositions, une conférence ministérielle pour les affiner, et enfin le sommet du FOCAC. La Chine avait publié sa Vision 2035 de la coopération sino-africaine peu après le sommet de Dakar. Élaboré avec les contributions des pays africains, ce document reprend les priorités de l’Agenda 2063 de l’Union africaine (UA), notamment en ce qui concerne les partenariats de développement, le commerce et l’investissement, la croissance verte, le développement des ressources humaines et l’industrialisation. Curieusement, les pays africains n’ont pas rédigé leur propre document exprimant les intérêts de l’Afrique et expliquant comment la Vision 2035 pour la Chine et l’Afrique pourrait faire progresser leurs plans de développement nationaux.
Les premières retrouvailles
En marge du sommet, le président chinois a reçu en audience le lundi 02 septembre 2024 trois présidents africains. Il s’agit des chefs d’Etat du Kenya, Afrique du Sud et Mali. La Chine, sur la « Vision 2030 » du Kenya, a créé un centre interconnecté et un corridor de développement industriel en Afrique de l’Est et en renforçant la coopération dans les domaines de l’économie numérique, des nouvelles énergies, du commerce, de la lutte contre la pauvreté et de l’agriculture. Ils ont souligné vouloir améliorer la coordination sur les questions internationales et régionales, en sauvegardant conjointement les intérêts communs du « Sud global » et en promouvant la paix et la stabilité régionales. lundi 2 septembre, Xi Jinping avait déjà bien lancé sa semaine en rencontrant une série d’homologues : c’est l’entretien avec Cyril Ramaphosa qui a marqué la journée. Le président sud-africain a tenu à évoquer la nécessité de remédier au déséquilibre commercial entre les deux pays et a appelé à des investissements plus durables qui créeraient des emplois et soutiendraient la reprise économique du pays. Le président chinois s’est également entretenu avec le président de transition malien afin de parler de coopération sur l’agriculture, l’énergie et les mines, ainsi que la sécurité. Assimi Goïta espère davantage consolider son amitié avec Pékin, et n’a pas hésité à souligner qu’il n’y avait qu’une seule Chine dans le monde et que son pays adhérait fermement à ce principe. Ce neuvième forum sur la coopération sino-africaine va aussi aborder le rôle de la Chine en tant que principal bailleur de fonds de l’Afrique, où de nombreux pays sont aux prises avec un endettement croissant.
Renforcer l’agencement africain
La dépendance du FOCAC à l’égard du dialogue d’État à État persiste malgré le développement de l’expertise des relations Afrique-Chine dans les universités, les groupes de réflexion et la société civile. Des voix africaines indépendantes pèsent sur les débats politiques entre l’Afrique et la Chine, notamment au sein de l’UA, qui reste ouverte à la recherche de perspectives extérieures. Le projet à but non lucratif intitulé « China-Global South Project » organise des podcasts hebdomadaires avec d’éminents leaders d’opinion pour discuter des questions politiques pertinentes entre l’Afrique et la Chine. Le Projet d’information Afrique-Chine s’efforce quant à lui d’améliorer la qualité de l’information délivrée sur les relations entre l’Afrique et la Chine. Le Centre afro-chinois des relations internationales et les centres de recherche « Development Reimagined » suivent et interrogent le processus du FOCAC. En outre, le groupe de travail indépendant Afrique-Chine rassemble des universitaires et des professionnels de haut niveau pour explorer de nouvelles façons de penser les relations sino-africaines et façonner les stratégies africaines. L’un des résultats notables de ces efforts est une étude novatrice intitulée « Vers une politique africaine à l’égard de la Chine », publiée comme ressource pour les négociateurs africains par l’Institute for Global Dialogue (Institut pour le dialogue mondial) d’Afrique du Sud avant le sommet du FOCAC de 2018. Une initiative dirigée par des Africains à l’École d’administration Blavatnik de l’Université d’Oxford rassemble des négociateurs africains de différents pays pour partager des notes et identifier des leçons pour négocier plus efficacement avec les responsables chinois. Le réseau de recherche sur les Chinois en Afrique et les Africains en Chine, qui compte 600 membres, est la plus grande plateforme indépendante de chercheurs et de leaders d’opinion sur l’Afrique et la Chine ; il coordonne des séminaires, de nouvelles recherches et des engagements en matière de politique publique. Le réseau gère également une base de données d’universitaires et d’experts ayant une expérience de la Chine. Ces ressources sont pertinentes car l’une des raisons pour lesquelles l’Afrique a toujours été en retrait dans ses engagements avec la Chine est l’incapacité des gouvernements africains à exploiter la vaste expertise culturelle et linguistique africaine de la Chine qui existe sur le continent. Avant la pandémie du COVID, 60 000 étudiants africains désireux d’obtenir un diplôme se rendaient chaque année en Chine pour y poursuivre leurs études. Pourtant, les gouvernements africains n’ont généralement pas utilisé ces ressources pour améliorer la compréhension globale du continent et son engagement vis-à-vis de la Chine.