De 2000 à 2022, la dette publique mondiale s’est multipliée par cinq (05), portant le taux à un niveau record. Dans le rapport « Un monde de dettes : fardeau de plus en plus lourd pour la prospérité mondiale », l’Organisation des Nations Unies (Onu) s’inquiète et propose des directives pour relever la pente.
S.T.
Avec plus de 92 000 milliards de dollars de dette publique, l’humanité a atteint cinq fois en 2022, son niveau d’endettement de l’an 2000. Et les pays en développement, se trouvent plus exposés avec plus de 7% de leurs recettes d’exportation consacrées à la dette publique extérieure, sacrifiant leur système éducatif et sanitaire. Ce, en raison des taux d’intérêts « onéreux » imposés par les créanciers privés qui détiennent 62% de la dette publique extérieure des pays en développement. Face à une telle situation, l’Organisation des Nations Unies (ONU) interpelle. Présentant, le 12 juillet dernier, le Rapport « Un monde de dettes : un fardeau de plus en plus lourd pour la prospérité mondiale », le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, a lancé un « sérieux avertissement » dans un contexte où la dette publique mondiale a atteint un niveau record de 92 000 milliards de dollars en 2022. Pour le Secrétaire général qui exige une action immédiate pour lutter contre l’escalade des crises touchant en particulier les pays en développement, « en moyenne, les pays africains dépensent quatre fois plus pour leurs emprunts que les États-Unis et huit fois plus que les économies européennes les plus riches. Au total, 52 pays, soit près de 40 % du monde en développement, connaissent de graves problèmes d’endettement ».
Des inégalités inhérentes au système
Selon l’ONU, environ 3,3 milliards de personnes vivent dans des pays qui dépensent plus en paiement des intérêts de la dette que pour l’éducation ou la santé. Ce fait qui est dû aux taux d’intérêts fantaisistes appliqués par les prêteurs, met en évidence l’inégalité inhérente au système financier international, qui pèse de manière disproportionnée sur les pays en développement. Selon le Rapport, la croissance rapide des paiements d’intérêts, qui dépassent les autres dépenses publiques, est particulièrement préoccupante. « Il est alarmant de constater que certains gouvernements sont contraints de dépenser davantage pour le service de la dette que pour des secteurs essentiels tels que la santé et l’éducation », note-t-on. Fait inquiétant, le rapport montre qu’au moins 19 pays en développement consacrent plus d’argent aux paiements de ces intérêts qu’à l’éducation, et que 45 pays consacrent plus d’argent aux paiements d’intérêts qu’aux dépenses de santé. Mieux, souligne le Rapport, la dépendance croissante à l’égard des créanciers privés, qui proposent des emprunts plus coûteux et des échéances plus courtes que les sources officielles, a également compliqué la restructuration de la dette des pays en développement. Actuellement, les créanciers privés détiennent 62 % de la dette publique extérieure, contre 47 % il y a dix ans. Il n’existe cependant aucun mécanisme permettant de déterminer comment restructurer la dette entre les différentes catégories de créanciers.
Des réformes urgentes s’imposent
Les Nations unies appellent de toute urgence à une réforme globale de l’architecture financière internationale, y compris de l’architecture de la dette, afin de favoriser un système plus inclusif qui permette aux pays en développement de participer activement à la gouvernance du système financier international. Selon António Guterres, il est de la plus haute importance de s’attaquer au coût élevé de la dette et au risque croissant de surendettement. La mise en place d’un mécanisme d’apurement de la dette est essentielle pour accélérer les progrès dans le cadre commun du G20 pour le traitement de la dette, qui a rencontré des difficultés en raison de problèmes de coordination entre les créanciers et de l’absence de clauses de suspension automatique du service de la dette.
Dans ces conditions, fait observer le Rapport, les pays en développement, en particulier ceux qui sont lourdement endettés, ont besoin de liquidités accrues en période de crise. « Sinon, une crise de liquidité risque de se transformer en crise de la dette. Il est possible d’y parvenir en développant le financement d’urgence. Le filet de sécurité mondial doit fonctionner. Des mesures telles que le renforcement de l’utilisation des droits de tirage spéciaux, la suspension temporaire des commissions additionnelles du FMI et l’élargissement de l’accès au financement d’urgence par l’augmentation des quotas doivent être poursuivies », souligne le Rapport. Dans la suite des propositions, l’ONU appelle à une augmentation substantielle de financements à long terme abordables. Pour y parvenir, « nous devrons transformer et élargir les banques multilatérales de développement afin de soutenir le développement durable à long terme et mobiliser davantage de ressources privées à des conditions plus équitables. En outre, il est urgent d’augmenter les financements concessionnels pour respecter les engagements en matière d’aide et de financement de la lutte contre le changement climatique », a insisté António Guterres.