L’Afrique, en particulier la région subsaharienne à l’exception de l’Afrique du Sud, pourrait bientôt faire face à une nouvelle hausse des prix à la consommation, cette fois en raison de l’augmentation persistante des coûts de transport maritime.
F.V.
Depuis quelque temps, le coût de transport d’un conteneur de 40 pieds, autrefois fixé à 1 320 $, a connu une hausse constante. Le 30 mai 2024, ce tarif a atteint 4 200 $, son plus haut niveau depuis le 12 janvier 2023, selon les données de la plateforme Statista. Bien que le grand du public africain ne perçoive pas encore ce phénomène de manière évidente, s’adaptant aux crises récentes, les conséquences potentielles sur le pouvoir d’achat sont préoccupantes. En effet, si la situation ne s’inverse pas, l’augmentation des coûts de fret maritime pourrait directement affecter les prix à la consommation en Afrique, un continent où une grande partie des biens, notamment en provenance d’Asie, sont importés. Les économies africaines peinent à réagir rapidement aux dynamiques mondiales, qui incluent des congestions portuaires post-COVID-19, une pénurie de conteneurs et le conflit russo-ukrainien. Ces facteurs ont collectivement contribué à l’augmentation des prix de certains produits de consommation, en particulier les denrées alimentaires. La hausse actuelle des coûts de transport maritime est attribuée à des congestions dans les ports et à des modifications de régulations, incitant les importateurs à stocker des biens en prévision de nouvelles charges. Par exemple, les véhicules électriques chinois feront l’objet de restrictions tarifaires au Brésil et au Mexique à partir de juillet 2024. Lors d’un webinaire organisé le 12 juin par la plateforme The Economist Intelligence Unit, des analystes ont souligné d’autres complications qui perturbent le transport maritime mondial. La crise dans la mer Rouge, avec les attaques des Houthis du Yémen, oblige de nombreux navires à contourner l’Afrique par le sud, allongeant ainsi les délais et les coûts de livraison. En outre, les effets du changement climatique réduisent le niveau des eaux dans le canal de Panama, limitant le passage des navires.
Ces défis mondiaux ont des répercussions significatives sur les économies africaines. Le fret maritime constitue une part essentielle des dépenses de services importés par les pays africains, impactant directement leur balance commerciale globale. Pour contrer les précédentes vagues de hausse des prix, de nombreuses économies d’Afrique subsaharienne ont recours à des politiques monétaires restrictives pour limiter la masse monétaire en circulation. Parallèlement, les gouvernements ont tenté de soutenir la consommation, en particulier celle des ménages les plus vulnérables. Cependant, en raison d’un décalage entre l’impact des chocs et le temps nécessaire pour que les politiques publiques produisent des effets, peu d’initiatives ont été prises pour renforcer l’autonomie de la consommation intérieure. En conséquence, la dépendance aux biens et services importés persiste, surtout dans les zones urbaines. Actuellement, les taux d’intérêt des banques centrales sont à des niveaux élevés, limitant leur marge de manœuvre pour utiliser des outils monétaires. Les gouvernements, quant à eux, ont accru leurs déficits à des niveaux jugés « excessifs » par des bailleurs de fonds tels que le FMI et les agences de notation. La question qui se pose est donc la suivante : l’Afrique peut-elle résister à une nouvelle vague de hausse des prix ?