L’opération Epervier II coordonnée par Interpol a vu des centaines de personnes sauvées de la main des trafiquants d’êtres humains par la police au Bénin et au Nigéria. Un certain nombre de victimes a également été sauvé des locaux où elles ont été forcées à se prostituer.
Joël YANCLO
Coup de pied dans la fourmilière des trafiquants d’êtres humains. La police internationale (Interpol) avec l’appui de ses démembrements au Bénin et au Nigéria, annonce, jeudi 25 avril 2019, avoir démantelé un réseau de trafiquants et sauvé des victimes de trafic d’êtres humains. Plusieurs enquêtes étant en cours, la police a arrêté 47 personnes et saisi des véhicules, de l’argent, des téléphones portables et des ordinateurs. Les preuves dans la région montrent que les victimes de la traite sont recrutées et trafiquées à l’aide de tromperie et de coercition, et maintenues en esclavage dans diverses activités à forte intensité de main-d’œuvre. Un grand nombre des 157 mineurs secourus a été déplacé comme de la marchandise à l’autre côté de la frontière et amené à travailler toute la journée sur les marchés, colportant des marchandises, allant chercher de l’eau, cuisinant, portant de lourdes charges ou travaillant comme domestiques. Certains ont été victimes d’exploitation sexuelle. Les enfants avaient entre 11 et 16 ans. Le plus jeune a été sauvé à la frontière terrestre entre le Bénin et le Nigéria. La police a retrouvé un garçon qui avait été forcé de transporter clandestinement entre les deux pays des marchandises lourdes, telles que des sacs de riz pesant jusqu’à 40 kg. Les victimes sont originaires du Bénin, du Burkina Faso, du Niger, du Nigéria et du Togo. «La traite des êtres humains est un crime transnational dont les personnes vulnérables, en particulier les enfants, ne peuvent tout simplement pas s’éloigner» a déclaré Jürgen Stock, Secrétaire général d’Interpol pour qui cette opération souligne la nécessité d’une collaboration transfrontalière entre les services répressifs et toutes les parties prenantes « afin de garantir qu’ensemble nous pouvons renforcer nos efforts en matière de prévention, de protection et de poursuite», a ajouté le chef d’Interpol.
Sauvegarde des victimes
Selon Interpol, la plupart des mineurs ont été battus et maltraités psychologiquement, notamment par des menaces de mort et des avertissements qu’ils ne reverraient plus jamais leurs parents. Afin de s’assurer qu’ils recevaient les soins nécessaires après leur sauvetage, les services sociaux et les ONG ont procédé à des entretiens postopératoires et ont fourni des services de soutien aux victimes. Au Bénin, les mineurs ont été transférés dans des centres d’accueil, rendus à leurs parents ou pris en charge par les autorités nationales chargées des affaires sociales et des ONG. Houndé Seidou, Commissaire divisionnaire de la police du Bureau central pour la protection des mineurs et des familles et la prévention de la traite des êtres humains (OCPM) au Bénin, a déclaré que « personne ne doit appartenir aux marchés ou à la rue en tant que travailleur forcé ». L’on a le devoir de lutter contre la traite des êtres humains, en particulier lorsque des enfants sont impliqués. Au Nigéria, les mineurs ont été pris en charge par NAPTIP, l’Agence nationale pour l’interdiction de la traite des personnes qui travaille avec des ONG. Do Asogwa, contrôleur du service d’immigration du Nigéria dans la région frontalière de Semè, a déclaré que « nous devons coopérer les uns avec les autres pour lutter contre les réseaux de criminalité responsables de la traite et du trafic d’êtres humains. Ces crimes ne peuvent être combattus que collectivement et par le biais d’une coopération inter institutions. »
Renforcement de l’application de la loi
Renforcer la capacité durable des forces de l’ordre à enquêter sur les affaires de traite des êtres humains et de trafic illicite de migrants et à les traiter est au cœur de la stratégie d’Interpol sur les communautés vulnérables. À cette fin, l’opération Epervier II a été précédée au Bénin et au Nigéria d’exercices spécialisés de formation Interpol destinés à aider les fonctionnaires à améliorer leurs techniques d’enquête ainsi que leurs techniques d’interview des victimes et des délinquants. Le système de communications sécurisées I-24/7 d’Interpol a également été déployé dans des points chauds opérationnels, offrant à la police un accès en temps réel à des bases de données criminelles mondiales contenant des millions d’enregistrements, notamment des documents de voyage volés et perdus et des données biométriques. La réunion des ministres de l’Intérieur du G7 à Paris plus tôt ce mois-ci appelant à une coopération accrue avec Interpol contre des crimes tels que la traite des êtres humains, a été menée dans le cadre du groupe de travail mondial INTERPOL sur la traite des êtres humains. Il a été financé par la Fondation Interpol pour un monde plus sûr.
Interpol au Bénin
Les caractéristiques internationales des zones criminelles et leurs liens avec les groupes du crime organisé du monde font du rôle du Bureau central national (BCN) Interpol du Bénin un élément fondamental de la sécurité nationale. Le BCN Cotonou est la principale agence du Bénin chargée de mener les enquêtes pénales nationales au-delà des frontières nationales pour travailler avec les forces de police d’autres pays et continents. La BCN est composée d’agents de police spécialisés dans la lutte contre les problèmes de criminalité spécifiques à la région. La BCN fournit aux forces de police locales des renseignements provenant du monde entier pour les aider à détecter et à étudier le flux de marchandises illicites le long des itinéraires de trafic dans et autour du pays. Le BCN Cotonou est également un acteur actif des opérations d’enquête sur les fugitifs au niveau mondial menées par Interpol. Les services nationaux de maintien de l’ordre au Bénin sont fournis par la police républicaine (DGPR), qui associe et remplace l’ancienne police nationale et la gendarmerie. La DGPR est responsable de la sécurité nationale, de l’ordre public ainsi que de la protection des personnes et des biens. La DGPR comprend une force de police criminelle nationale appelée DPJ (Direction de la police judiciaire), qui enquête sur le crime organisé grave, le terrorisme et la criminalité transnationale. La BCN d’Interpol pour le Bénin fait partie du DPJ.