Le ciel devrait s’assombrir sur le Mali avec l’embargo qui lui avait été infligé par les dirigeants des pays frères. Mais la nature est sis juste qu’elle sait régler ses comptes. En saisissant la Cour de justice de l’UEMOA, les autorités maliennes peut-être n’espéraient pas avoir gain de cause. Mais, à l’issue du contradictoire, le pays du colonel Assimi Goïta s’en sort vainqueur.
Jean-Claude KOUAGOU
Assimi Goïta et Choguel Maïga sont plus que jamais comblés avec cette ordonnance de la Cour de justice de l’UEMOA. Au lendemain de cette sévère décision qui tend à asphyxier le Mali, le Premier ministre n’avait cessé de déclarer qu’une plainte sera déposée au greffe de la Cour. En effet disait Choguel Maïga : « Une plainte sera déposée contre les sanctions économiques imposées par la CEDEAO et l’UEMOA. Ces sanctions sont illégales ». Le Premier ministre de transition estime que leur objectif réel est de « déstabiliser le Mali » et d’ « achever » « un peuple déjà à terre ». Remontant au début de l’intervention militaire française dans le pays, le chef du gouvernement accuse Paris d’œuvrer à « la désintégration » de l’État et réitère l’intention des autorités de transition de relire des accords de défense jugés « déséquilibrés ». Quant à la Cédéao, son « erreur est de tout ramener aux élections » qui ne sont « pas une fin en soi », juge Choguel Maïga. Qui rappelle les maux du pays – élections contestées, corruption, détournement d’argent public, impunité, insécurité – pour justifier la nécessité de réformer avant d’aller au vote. Les engagements pris par les autorités et par lui-même. « La mission est sacrée, mais c’est le terrain qui commande », soutenait Maïga. Comme si elles devraient particulièrement porter le fardeau de leur entêtement, en plus des sanctions infligées au pays, l’Union européenne sanctionne les plus hautes autorités du Mali. Le Premier ministre Choguel Maïga, ainsi que quatre autres responsables maliens, ont été sanctionnés par l’Union Européenne. Accusés de faire obstacle à la transition politique, ils sont interdits d’entrée sur le territoire de l’UE et leurs avoirs sont gelés. Des sanctions qui emboitent le pas de celles prises par la Cédéao. Seidik Abba, journaliste spécialiste du Sahel, analyse la portée de ces mesures prises contre la junte malienne.
Nous ne voulons pas « l’humiliation »
« Nous ne fermons pas la porte au dialogue », rappelle également le Premier ministre de transition, « mais ce que nous ne voulons pas », c’est « l’humiliation » et le retour « à l’esclavage ». Les Maliens sont restés droit dans leurs bottes. Depuis les sanctions adoptées par la Cédéao le 9 janvier 2022 à l’encontre de la junte au pouvoir au Mali, la population subit les hausses de prix et la vie chère. Une grande partie des habitants continuent toutefois à soutenir les autorités transitoires, qui se disent en résistance contre les organisations régionales et la France. Les voisins du Mali espéraient début janvier qu’un embargo économique ferait plier la junte à la tête de ce pays pauvre et enclavé. Mais un mois après, si de premiers signaux d’alerte sont là, les autorités dominées par les militaires font front. Elles ont par ailleurs fait savoir mercredi 9 février qu’elles étaient en discussion avec la Cédéao et d’autres partenaires pour trouver un « compromis » sur les échéances pour un retour des civils au pouvoir. Le ministère de l’Administration territoriale a indiqué dans un communiqué qu’un « groupe de dialogue » s’était réuni le 31 janvier au niveau ministériel. Il vise « à un rapprochement de positions et à la recherche de compromis ». Le groupe est constitué de la Cédéao, de l’Union africaine, des Nations unies et d’un certain nombre de pays, dont le Ghana – qui assure la présidence de la Cédéao -le Sénégal – qui exerce celle de l’UA – ou encore la Mauritanie, voisine du Mali. Malgré toutes ces mesures difficiles à supporter pour un pays sahélien, les autorités maliennes sont demeurées dignes. Aujourd’hui, elles doivent se sentir heureuses d’avoir mené un tel combat.