Initié au profit du secteur privé de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa), en vue de redynamiser les Petites et moyennes entreprises (PME), à travers de nouveaux partenariats et surtout l’accès au crédit, le Salon des Banques et PME de l’Uemoa a enregistré sa 7ème édition en 2021. De la mise en relation entre PME de l’Union, aux conseils et orientations pour un meilleur accès au financement, l’initiative n’est pas des moindres. Ici, le Secrétaire Permanent (SP) du Salon, Youepene Hermann Nagalo, s’agissant de la compétitivité du secteur privé dans l’Uemoa, présente le bilan et les perspectives du Salon des Banques et PME, notamment les retombées de l’édition 2021 et donne les visions de la 8ème édition prévue du 1er au 05 novembre 2022.
L’économiste du Bénin : Bonjour Monsieur le SP/SBPME. Le Salon des Banques et PME de l’Uemoa a connu sa 7ème édition en 2021. Qu’est-ce qui fait la particularité de cette édition et quel bilan en tirez-vous ?
Hermann Nagalo : Je vous remercie de me donner l’opportunité de faire un peu le bilan de la 7ème édition du Salon des Banques et PME de l’Uemoa (SBPME/UEMOA) qui s’est tenu du 02 au 05 novembre 2021 à Ouagadougou au Burkina-Faso sous le thème : « Transformation des économies africaines : contribution et impacts des PME de l’Uemoa ». Il faut noter que cette 7ème édition avait pour objectif, dans un premier temps, de pouvoir apporter des réponses aux questions que se posaient les PME. Vous savez, depuis 2020 avec la pandémie du coronavirus qui perdure toujours, il y a beaucoup de questions : à quand la relance économique ? Comment redynamiser nos PME ? Quelle est la vision que les PME peuvent avoir et quelle doit être leur contribution pour aider à transformer nos économies ? Pour ces questions, beaucoup d’experts étaient présents autour de trois (03) thèmes notamment sur la « digitalisation des économies », « la gouvernance des PME », mais également sur « l’économie verte et l’économie circulaire ». Ensuite, nous avons, au-delà de ces débats, eus des échanges avec des institutions de financement afin de découvrir quels sont les dispositifs, les solutions innovantes proposées pour le financement de nos entreprises. Vous savez, lorsque les PME sont réunies dans un cadre donné, il est aussi important de faire en sorte que ça soit un carrefour d’affaires, d’où cette exposition qui a été faite sous format de village dédié aux différentes activités des PME.
Et le bilan que nous pouvons faire, c’est que tous les pays de l’Uemoa ont été représentés, notamment le Bénin, la Côte-d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Burkina Faso, le Sénégal et le Togo ; et au-delà de l’Uemoa, nous avons eu des participations d’autres pays africains et européens. Cela montre qu’effectivement, le Salon, à sa 7ème édition, est un cadre dédié, un cadre où les acteurs peuvent se retrouver pour véritablement échanger et apporter des réponses tout en partageant les meilleures pratiques et aussi les meilleures expériences.
Avez-vous le sentiment d’un devoir accompli quant à cette édition ?
Le devoir accompli, non ! Mais d’avoir été utile. Le secrétariat permanent du Salon des Banques et PME de l’Uemoa que j’ai l’honneur de diriger travaille effectivement afin de pouvoir contribuer aux efforts des Etats pour mieux accompagner les PME. Aujourd’hui, sur les huit (08) pays de l’Uemoa, cinq pays ont déjà abrité le Salon. C’est un chemin déjà parcouru avec des thématiques différentes. Et à l’issue de chaque édition, nous avons formulé des recommandations et des résolutions. Nous avons également encouragé des Managers avec des trophées et des récompenses pour les amener à mieux faire. Nous avons aussi félicité les différentes institutions et les partenaires qui ont des politiques pour accompagner les PME. C’est déjà quelque chose que nous avons pu apporter. Mais, il reste encore à faire. Pour nous, la satisfaction viendra lorsque l’ensemble des acteurs, je parle des Etats, des PME, des organisations professionnelles, des communautés, etc., vont se réunir pour effectivement faire de la PME le véritable moteur de la croissance de notre économie ; c’est-à-dire à travers ce Salon qui est un cadre, ils vont se retrouver pour débattre davantage, apporter des partenariats, développer la coopération entre ces PME dans nos différents pays et faire en sorte que nous puissions contribuer à développer le commerce intra-communautaire.
De la 1ère à la 7ème édition, pouvez-vous nous présenter l’opportunité de marché qu’offrent les PME ?
Nous avons eu Madame Loys Koffo Ballé qui a été primée au Salon. Elle est venue du Bénin spécialement dans un contexte où les frontières étaient fermées, pour participer au Salon (7ème édition). Madame Ballé a un réseau d’entrepreneurs qui l’a mandatée de le faire. En faisant ce déplacement, d’abord elle avait un premier objectif : promouvoir les activités, les services et les produits de ses mandants. Deuxièmement, développer son réseau d’affaires et troisièmement, avoir des commandes et des partenariats. Elle vous l’a dit, c’est chose faite. Tout comme elle, vous avez des centaines de PME qui ont pu conclure des contrats, qui ont pu avoir des réponses concrètes avec les établissements de crédit, sur des besoins de financement. D’autres ont pu avoir des conseils, des orientations, surtout, ont pu découvrir ce qui se passe dans d’autres pays ; qu’est-ce qui faisait effectivement le secret de ceux qui ont réussi ? Découvrir le management dans d’autres entreprises, mais aussi savoir quels sont les dispositifs au niveau national et au niveau communautaire pour les accompagner en termes d’accès au financement, d’accès au marché mais aussi en termes de bonne gouvernance de leur propre entreprise. Et cela, ce sont des éléments qui nous convainquent aujourd’hui de ce que le Salon apporte déjà des réponses. Mais nous ne sommes pas dans la dynamique de dire nous-mêmes voici concrètement ce que cela a fait, parce que ce n’est pas le moment de faire ce bilan. Lorsque chacun des huit (08) pays de l’Uemoa va abriter le Salon, nous aurons l’occasion à travers une grande étude et une grande enquête, de pouvoir ressortir le bilan. Du reste, il faut dire qu’à chaque édition, lorsque nous faisons l’évaluation, nous sommes à un taux de 90% de satisfaction et nous sommes également félicités par plusieurs organisations et même par des structures étatiques.
Quels sont les principaux obstacles à l’investissement dans les PME de l’Union ?
Il faut dire aujourd’hui que les choses ont beaucoup évolué. La PME d’hier a peut-être une grande différence avec la PME d’aujourd’hui, parce que avec le numérique, les compétences, nos PME ont amélioré leur gestion, ont développé des astuces pour être compétitives. Nous pensons que cela contribue énormément à les rapprocher davantage des banques et des SFD. Mais il faut noter que la PME d’aujourd’hui peut devenir la grande entreprise de demain. Par conséquent, c’est un combat permanent, un plaidoyer permanent puisque chaque année vous avez des PME qui se créent et qui sont toujours dans la quête de financement pour agrandir leur entreprise. Donc, nous pouvons dire qu’au-delà de ces réponses apportées à l’occasion du Salon, vous avez effectivement des Banques et des SFD qui sont là, vous avez des structures de financement, des « Business Angels » qui participent également ; et vous avez des fonds d’investissement. Cette année, nous avons le Fonds africain de garantie et de coopération économique (FAGACE) qui souscrit aux objectifs du Salon et qui a décidé de présider le Salon pour la deuxième fois. Sa participation visait essentiellement à apporter sa contribution pour le financement des PME, en se positionnant comme garant au niveau des banques, mais aussi en faisant en sorte que les Banques partagent effectivement le risque avec le garant. Cela a beaucoup contribué, et cette façon de faire montre que le garant d’un côté, la banque de l’autre, et les PME, nous allons certainement vers un taux de financement beaucoup plus élevé que ce que nous connaissions. Mais il y a encore beaucoup à faire en ce sens que nos banques méritent davantage d’avoir des guichets entièrement dédiés aux PME. Bien que ça existe, le reproche que les PME font aujourd’hui, c’est que parfois, certains guichets n’ont pas une bonne connaissance des projets spécifiques dans certains domaines. Il faut que la banque renforce aussi les compétences de son personnel sur certains besoins et certains projets des PME pour permettre effectivement de mieux analyser les projets des PME pour qu’il n’y ait pas de mésentente ou de quiproquo.
Chaque année, la question de la surgarantie revient sans doute dans vos échanges avec les PME. Quel mécanisme doit-on mettre en place pour que l’institution sous régionale puisse accompagner ces entreprises qui présentent, pour la plupart, un bon potentiel ?
Il faut dire qu’aujourd’hui, ce que l’Union peut faire, dans un premier temps, c’est la sensibilisation. Vous savez qu’il y a des initiatives comme le Bureau du Crédit qui a été mis en place, parce que la question de crédit, c’est une question de confiance. Lorsque la banque vous connaît, lorsqu’elle a votre historique, lorsqu’elle suit votre activité, c’est évident que vous pourrez facilement bénéficier de la confiance de la banque. Donc, en continuant de sensibiliser, en continuant à partager les bonnes pratiques de ceux qui ont réussi, qui sont devenus de bons partenaires avec les banques, à l’occasion de ce Salon, ça peut aider d’autres personnes à adopter des bonnes pratiques pour aussi réussir. L’autre chose, c’est que comme nous l’avons dit, continuer à former les agents des banques sur la spécificité des PME et les contraintes liées aux PME dans notre environnement pour qu’elles soient beaucoup plus réceptives aux projets des PME et savoir comment mieux les accompagner. Egalement, comme nous l’avons dit, le fait qu’il y a le FAGACE qui s’est montré disponible et qui a participé au Salon sur les quatre (04) journées avec l’animation des stands, pour orienter les PME, discuter avec les Banques sur comment les accompagner, cela montre aujourd’hui une volonté des institutions communautaires de pouvoir accompagner les PME à accéder au financement. Du reste, il est important pour nos PME de savoir qu’il y a d’autres formes de financement. C’est le fait que nous pouvons avoir des partenariats entre PME. On n’a pas forcément besoin d’avoir de l’argent pour financer des projets, nous pouvons avoir besoin qu’une PME qui a ce dont vous avez besoin puisse aussi travailler avec vous sous forme d’accompagnement et ça peut se faire.
Quelles sont les perspectives pour l’édition 2022 du SBPME ?
Déjà, nous travaillons pour la 8ème édition du Salon des Banques et PME de l’Uemoa qui est prévue pour se tenir du 1er au 05 novembre 2022. Et comme vous le savez, nous commençons très tôt les démarches pour éventuellement présenter l’initiative aux autorités et éventuellement solliciter l’adhésion au projet pour que nous puissions l’annoncer officiellement. En ce qui concerne les perspectives, c’est que nous allons consolider les acquis, mais nous souhaitons également, dans le cadre de la dynamisation des économies africaines, faire en sorte que le Salon soit aussi une porte d’entrée pour les investisseurs au niveau régional. Parce qu’il est important aujourd’hui que notre espace communautaire qui est un espace apprécié en termes d’organisation, de développement, puisse être mieux valorisé pour que les investisseurs viennent aussi apporter leurs contributions dans le financement des projets et même le financement de nos Etats. Donc le financement de l’économie tout court. Cette édition, la particularité, c’est que nous allons aussi orienter la communication vers l’extérieur pour éventuellement attirer d’autres entreprises, d’autres investisseurs qui viendront participer au Salon et tirer les meilleurs partenariats avec nos PME.
Quel message avez-vous à l’endroit aussi bien des PME, des autorités et d’autres acteurs intervenant dans la promotion du secteur privé dans l’Union ?
Ce que nous voulons dire, c’est que c’est la 8ème édition du Salon des banques et PME de l’Uemoa qui va se tenir cette année. Nous souhaitons tout simplement que cette initiative bénéficie du soutien de tous les acteurs. C’est un cadre qui est mis à la disposition de tous les acteurs, étatiques, PME, ainsi que tous les partenaires des PME comme les Banques, les assurances, les fonds d’investissement. C’est en discutant des problèmes que vivent nos PME dans le cadre du développement des entreprises, de leur financement, de leur internationalisation, de la compétitivité dans un contexte de libre-échange continental, que nous pouvons apporter tous des réponses. Et ces réponses peuvent aider à trouver des PME qui vont effectivement contribuer à créer de la richesse et à créer des emplois. Nous ne sommes pas du tout fermés, nous souhaitons vivement que toutes les structures intéressées prennent attache avec nos comités locaux, nos points focaux pour éventuellement discuter de quelle place elles peuvent occuper. Parce qu’une activité dans huit (08) pays ce n’est pas chose facile. Même en huit (08) ans, ce n’est pas évident que nous ayons pu toucher tout le monde pour présenter le Salon et les sensibiliser sur le bien-fondé. Mais nous pensons que toutes les personnes qui entendront ce message et qui souhaitent être avec nous pour que nous puissions travailler ensemble et atteindre les objectifs, nous sommes disposés à les recevoir.
Interview réalisée par Sylvestre TCHOMAKOU