Onze ans après « Mon combat pour la parole », « Les défis d’une mobilisation citoyenne pour la promotion de la gouvernance démocratique » paru aux éditions l’Harmattan avec une préface de l’ancienne Garde des Sceaux française Christiane Taubira, Reckya Madougou reprend la plume. L’experte internationale en finance inclusive et plusieurs fois ministre, a achevé un nouveau livre fin 2019. Et une fois encore, l’opportunité et la pertinence de la problématique abordée ne manquent pas de tenir ses normes.
Falco VIGNON
L’ex ministre de la Justice, Reckya Madougou se prépare à procéder au lancement de son prochain ouvrage. « Soigner les certitudes » est le titre de ce livre-entretien avec l’écrivain béninois Stephens Akplogan. Il sera officiellement lancé la dernière semaine du mois de septembre 2020 à Cotonou et s’en suivra une série d’activités d’échanges notamment avec les jeunes et les femmes, principales cibles de l’ouvrage à travers diverses capitales et villes.
Sans pathos mais avec précision, l’auteure s’insurge contre les fausses évidences et les clichés construits pour légitimer une certaine fatalité du drame africain. Alors, elle s’engage à déconstruire ces certitudes qui maintiennent les pays africains, la jeunesse et les femmes dans l’assistanat. Sinon elle plaide pour les soigner. Les antidotes ? La formation, la citoyenneté économique, l’inclusion financière des populations, les dividendes de la digitalisation, l’autonomisation des femmes, la transformation structurelle de l’agriculture, l’entrepreneuriat, l’intelligence politique et la justice sociale. En somme, une nouvelle « dialectique d’inclusion et du minimum humain en Afrique », le sous-titre de l’ouvrage.
L’avantage est que l’auteure ne vend ni de simples théories, encore moins une fiction mais part de ses propres expériences sur ces sujets et jette un regard croisé analytique sur des options de développement en suggérant des mécanismes qui ont fait leurs preuves. Avec une riche préface du président de la République du Sénégal, Macky Sall, lui-même un adepte de l’association du libéralisme à l’inclusion sociale, le livre offre une grille de lecture plus objective des nouveaux enjeux de développement. Les anecdotes captivantes et les expériences pratiques se succèdent, tantôt sous forme pédagogique, tantôt sous forme inspirante, parfois avec un regard critique. Tout est signifiant et creuse des réalités qui s’irriguent et des solutions qui s’installent durablement. « Il y a une sorte de carence ambiante en méthodes à succès pour faire décoller notre société », a-t-elle écrit.
Au fil des pages, Reckya Madougou conseille, reformule, explique, enseigne, dénonce et surtout propose. Ici, la conviction d’une Afrique des possibles est peinte sans le risque de se laisser berner par les préjugés. Le continent est la région où l’investissement est le plus rentable au monde. Il faut le reconnaître et s’y préparer, semble dire l’auteure. En cela, elle invite à « tutoyer les sommets sans complexe” en misant sur ce qu’elle appelle une “spiritualité de l’effort” ou encore une « citoyenneté économique ». « Réduire l’horizon de la citoyenneté économique à la question d’employabilité est une méprise en ce siècle de grande technologie et de digitalisation des réflexes. Ce qui rend cette citoyenneté pleinement authentique, n’est pas tant l’emploi en lui-même surtout avec la menace de disparition de certains emplois », a écrit Reckya Madougou.