Le représentant résident du département Afrique au Fonds monétaire international (FMI), Karim Barhoumi, a livré, le vendredi 24 mai 2019, le résultat des études économiques et financières menées par l’institution internationale en Afrique au sud du Sahara. C’était dans la salle de conférence du ministère de l’Economie et des finances.
Nafiou OGOUCHOLA
La reprise économique se poursuit en Afrique subsaharienne, mais les taux et les perspectives de croissancesuivent deux trajectoires distinctes. En effet, selon le FMI, le taux de croissance global devrait passer de 3 % en 2018 à 3,5 % en 2019 et se stabiliser à un peu moins de 4 % à moyen terme, ou autour de 5 %, si l’on exclut les deux plus grandeséconomies de la région, l’Afrique du sud et le Nigéria.
Les chiffres énoncés, a précisé le représentant résident du FMI en Afrique, occultent des disparités considérablesen matière de perspectives de croissance entre deux groupes de pays. Environ la moitié des pays de la région, essentiellementdes pays pauvres en ressources naturelles, devraient connaître une croissance d’au moins 5 %, ainsiqu’une hausse de leur revenu par habitant plus rapide que la moyenne mondiale à moyen terme. En revanche,les autres pays, riches en ressources naturelles pour la plus grande part, devraient enregistrer une croissance pluslente.
Par ailleurs, étant donné que ces pays, dont font partie l’Afrique du sud et le Nigéria, abritent plus desdeux tiers de la population de la région, le FMI a jugé important de lever les incertitudes relatives aux politiques économiquesqui freinent la croissance afin que la majorité des habitants de l’Afrique subsaharienne jouissent d’un meilleur niveau de vie.
Les influences des perspectives de croissance
La croissance de l’Afrique au sud du Sahara est impacté par des situations diverses. Selon le FMI, l’expansion mondiale s’essouffle, y compris chez les principaux partenaires commerciaux de la région, comme la Chine et la zone euro. A ceci, s’ajoutent d’autres faits. Il s’agit de : les tensions commerciales restent fortes ; les conditions financières mondialessont volatiles et se sont quelque peu durcies par rapport aux prévisions établies en octobre 2018, et lesprix des produits de base devraient rester faibles.
Sur le plan intérieur, des chocs climatiques risquent de fairediminuer la production agricole dans le sud de l’Afrique, tandis que les incertitudes relatives aux politiqueséconomiques assombrissent les perspectives de croissance dans plusieurs pays ; les vulnérabilités liées à la dette restent élevées dans certains pays.
Les faiblesses des bilans publics pèsent égalementsur les positions extérieures : les réserves sont inférieures aux niveaux généralement jugés adéquatsdans plus de la moitié des pays de la région.Dans le même temps, le niveau élevé de prêts improductifs continue d’exercer de fortes tensions sur les systèmesfinanciers, tandis que les insuffisances des systèmes de gestion des finances publiques se traduisent par d’importantsarriérés intérieurs, qui pourraient avoir une incidence sur la croissance et les systèmes financiers intérieurs.
Il est actuellement plus difficile encore qu’à l’habitude de répondre aux besoins d’investissement en capital humainet physique en raison de la compression de la marge de manœuvre budgétaire et d’un environnement extérieurmoins porteur. Pour y parvenir, il est essentiel de reconstituer une marge de manœuvre budgétaire, d’accroîtrela résistance de l’économie aux chocs et de favoriser l’émergence d’un environnement propice à unecroissance durable, élevée et inclusive. Il serait encore plus ardu de mener cette tâche à bien si les risques de ralentissementde la croissance venaient à se matérialiser. Par exemple, si la croissance mondiale s’avérait plus faibleque prévu dans le scénario de référence. Ce constat souligne la nécessité d’accélérer les réformes et de calibrerl’ampleur et le rythme des ajustements de façon à garantir la compatibilité entre, d’une part, l’inflexion des politiqueset, d’autre part, la crédibilité des objectifs macroéconomiques à moyen terme, le montant des financementsdisponibles et la viabilité de la dette.
Les mesures à prendre pour une croissance durable
Si les divergences entre pays riches et pays pauvres en ressources naturelles transparaissent dans leurs perspectivesde croissance, leurs priorités économiques et le poids de leurs contraintes budgétaires, ces pays ont les mêmes besoins,à savoir accroître leur résilience et générer une croissance durable, élevée et inclusive. Pour relever ces défis,il serait nécessaire de prendre les mesures suivantes : accroître les recettes, assurer l’efficience des investissements publics, consolider la gestion des financespubliques, maîtriser les risques budgétaires liés aux entreprises publiques, améliorer les cadres de gestion et derésolution de la dette et accroître la transparence.
Il serait également important d’assouplir davantage les tauxde change dans les pays qui n’appartiennent pas à une union monétaire, et d’améliorer la politique monétaireet les systèmes financiers. Pour finir, le Fonds monétaire international a renseigné qu’il faudrait accroître la productivité et l’investissement privé, tout en assurant un partage plus équitable des bienfaits d’uneplus grande prospérité. Pour cela, il faudra appliquer des mesures visant à rendre les marchés plus contestableset à créer un environnement propice à l’éclosion d’un secteur privé dynamique, notamment en supprimant lesprincipaux freins aux activités des entreprises et à l’approfondissement de l’intégration commerciale, surtoutdans le cadre de la Zone de libre-échange continentale pour l’Afrique (ZLECAF) et en améliorant l’accès auxservices financiers et services de base, dont la santé et l’éducation, ainsi que leur prestation.
Le rapport sur les perspectives économiques régionales pour l’Afrique subsaharienne estpublié deux fois par an, au printemps et à l’automne, et rend compte de l’évolutionéconomique de la région. Les projections et considérations de politique économiquequ’il présente sont celles des services du FMI, et ne représentent pas nécessairementles points de vue du FMI, de son conseil d’administration ou de sa direction.