Les Occidentaux s’honorent des innovations technologiques d’un compatriote africain dans le secteur de la santé. Il s’agit du Franco-béninois Bertin Nahum, qui a révolutionné la chirurgie médicale grâce à l’invention d’un robot. Le Franco-Béninois n’a pas fini de bousculer le secteur de la robotique médicale. Visionnaire, persistant, combatif, c’est aussi un entrepreneur inlassable comparable à Steve Jobs ou à Mark Zuckerberg.
Bertin Nahum fait la fierté de l’Afrique et du Bénin en tant que nègre qui a percé les secrets de la médecine moderne. Il est, pour sa contribution au progrès technologique dans le secteur de la médecine, revendiqué par les Occidentaux qui lui octroient gracieusement les privilèges de citoyen français en dépit de la couleur de sa peau. Le parcours de Bertin Nahum est hors norme. Né à Dakar de parents béninois, il est ce qu’on appelle un visionnaire. Propulsé sur le devant de la scène internationale en septembre 2012 lorsqu’il est classé quatrième entrepreneur hightech le plus révolutionnaire du monde par la revue canadienne Discovery Series, il n’est spécialisé ni dans les réseaux sociaux, ni dans l’informatique, contrairement aux autres lauréats, mais dans l’assistance robotique à la neurochirurgie. Fondateur de Medtech, racheté en 2016 par l’américain Zimmer Biomet, Bertin Nahum crée dans la foulée Quantum Surgical, start-up montpelliéraine, au sein du parc d’activités Eurêka. Il est ancré dans le secteur de la fabrication de matériel médicochirurgical. Son objectif : Continuer à explorer le potentiel de la robotique chirurgicale mini-invasive, à même de fiabiliser les actes des praticiens et en apportant précision et répétabilité. Avec conviction, l’ingénieur franco-béninois va toujours au bout de ses intuitions. Avec Quantum Surgical, il explore le domaine du traitement du cancer, notamment du foie. Un challenge pour cet homme d’affaires qui n’en est pas à son coup d’essai. Avec Medtech, il a déjà créé BRIGIT, dédié à la chirurgie du genou, puis ROSA, un robot à guidage laser qui assiste les praticiens pour les opérations du cerveau et de la colonne vertébrale. Décoré des insignes de Chevalier de la Légion d’honneur en 2013, il n’en fait pas étalage. Et mène sa vie en véritable artisan de son destin.
Source d’inspiration
L’on peut se demander comment Bertin Nahum a-t-il eu l’inspiration pour donner corps à son projet ? Dans un entretien accordé à afriquemagazine.com, Bertin Nahum répond à la préoccupation. C’est à la fin de son cursus à l’INSA (Institut national des sciences appliquées) de Lyon, lors d’un projet de fin d’études en collaboration avec l’hôpital de neuro-cardiologique, que l’immersion dans le milieu médical s’est révélée à lui. « Nous devions développer un logiciel d’intelligence artificielle pour faire le diagnostic automatique de lésions crâniennes. Jusque-là, mes choix se faisaient plutôt par défaut. L’ambition de pouvoir contribuer à soigner les gens a donné du sens à mon diplôme d’ingénieur en génie électrique et électronique est née. Et j’ai voulu consacrer mes compétences et mes connaissances aux technologies dédiées à la santé ». Dès lors souligne M. Nahum, il a commencé par repérer toutes les offres d’emploi dans le secteur de la santé et a été recruté dans une start-up pour y faire de la recherche et du développement. Une fois sur le terrain, il a installé les machines, formé les équipes avant de changer de société. Sur la durée, il a accumulé des expériences en assistant à des centaines d’opérations chirurgicales au bloc, dans différentes spécialités. « Là, c’était du concret. On voit travailler les infirmières, les chirurgiens, les anesthésistes, les brancardiers. On voit pourquoi ça ne fonctionne pas, les limites, les difficultés, ce que le matériel apporte ou non. J’ai commencé à en tirer un certain nombre d’enseignements », se souvient l’ingénieur Nahum. « Un jour, dans la dernière société où j’ai travaillé en tant que salarié, j’ai fait part de mon point de vue. Je disais que compte tenu de tout ce que j’ai vu, je pense qu’il faudrait développer une machine avec telle et telle fonctionnalité, car cela correspond aux besoins ». Cette petite PME toulousaine dont l’activité principale était l’instrumentation en aéronautique avait développé une activité de robotique médicale. Ils avaient tout en interne pour faire des prototypes, des projets spéciaux. Les moyens, la volonté, tout y était. Mais les choses ne se sont pas passées comme je le pensais », se désole M. Nahum. Cependant l’ingénieur était convaincu d’une chose : l’innovation, d’une manière générale, est une activité risquée à plus forte raison celle d’une aventure robotique. Il faut savoir qu’il faut se lancer à fond parce que « il n’y a pas de demi-mesure en médecine. Le problème des gens dont ce n’est pas l’activité principale, c’est qu’ils bricolent. Si on ne prend pas de risques, on ne peut pas se développer ». Alors afin de prendre ce risque avec assurance, il se réfère d’abord à son supérieur qui lui fait savoir : « On a le temps. » Bertin Nahum réplique : « Ce n’est pas… un jour, c’est maintenant. Et j’ai compris que la seule façon de faire, c’était de le faire tout seul. J’ai donc donné ma démission. On ne peut aborder le risque qu’après avoir mesuré le risque que l’on prend. J’ai décidé de vendre ma voiture, alors que je venais d’avoir un premier enfant, et je me suis dit qu’au pire, j’aurais perdu quelques économies et qu’il suffirait de repartir à zéro. J’étais prêt à perdre, mais je m’en serais toujours voulu de ne pas avoir tenté l’aventure », se satisfait celui qui fait aujourd’hui la fierté des Béninois dans le monde de la médecine robotique.
Le prix du risque et de la passion
Après avoir démissionné de la PME toulousaine et affronté les péripéties qui en découlaient, il fallait reconsidérer sa vie. A partir de ce moment, Bertin Nahum se lance dans la prospection. Le marché américain était tellement stratégique qu’il a décidé de s’y rendre en personne avec son épouse et ses deux fils. « Je me suis d’abord installé à Montréal pensant trouver un bon distributeur, puis à New York, premier marché mondial, où je démarche les hôpitaux directement. Et ça marche. Fin 2012, Medtech commence à avoir de la visibilité, mon classement par le magazine Discovery Series [qui l’a nommé 4e entrepreneur high-tech le plus révolutionnaire du monde] fait couler de l’encre et je me dis qu’on a fait nos preuves. Il faut accélérer, donc investir », fait savoir le jeune entrepreneur. Il s’inspire de l’attitude des agriculteurs dont les récoltes sont proportionnelles à la capacité de semer. Ainsi, il estime qu’il faut investir beaucoup pour espérer des moissons abondantes. « Si on ne sème rien du tout, il n’y a rien à récolter. Je rentre donc en France et me concentre sur mon troisième « bébé » : l’invention de ROSA Spine. Ce robot est homologué depuis 2014 en Europe et janvier 2016 aux États-Unis. Il est encore plus sophistiqué que ROSA Brain car, contrairement au crâne fixé pendant toute l’intervention, la colonne vertébrale, elle, bouge avec la respiration du malade et les mouvements du praticien. Entrée en Bourse en 2013, Medtech privilégie la croissance plutôt que la rentabilité à court terme. « Notre chiffre d’affaires, dont les États-Unis représentent plus des trois quarts, double chaque année, ainsi que les effectifs. On commence à vendre en Chine, au Moyen-Orient, en Europe. En 2015, notre chiffre d’affaires est de 6,5 millions d’euros, avec 65 collaborateurs à Montpellier et à New York. Je décide de faire entrer la société au Nasdaq. Un fonds américano-hongkongais entre au même moment dans l’affaire, avec 15 millions de dollars », déclare l’homme dont le génie a révolutionné la médecine chirurgicale. Il poursuit en faisant savoir qu’au printemps 2016, Zimmer, qui a fusionné avec Biomet propose d’acheter la société, avec une vraie stratégie de développement. « Je réalise que si j’entre au Nasdaq, je lèverais des fonds, mais je serais dilué au profit de fonds étrangers. J’accepte. Depuis, ils ont doublé les effectifs, projettent d’embaucher 80 personnes d’ici à la fin de l’année, avec 6 000 m² de bureaux, et veulent faire de Montpellier leur centre de recherche pour les applications de chirurgie », raconte Bertin Nahum.
Création de Quantum Surgical pour le cancer du foie
Bertin Nahum fait une mise au point. « Ce qui est clair, c’est que je ne travaille ni pour l’argent, ni pour les honneurs ou les titres. Cela ne m’intéresse pas. Ce qui compte, c’est ce qui me fait vibrer. Mes associés historiques m’ont suivi et nous avons créé Quantum en 2017 en nous lançant dans le secteur de la chirurgie abdominale, en particulier le cancer du foie. », précise-t-il. L’établissement compte 8.000 nouveaux patients par an en France, et 800.000 dans le monde dont 50% en Chine. C’est le 6e cancer le plus répandu au monde et le 2e le plus mortel. « La solution innovante que nous proposerons viendra comme une alternative aux traitements actuels : l’oncologie médicale (chimiothérapie), la radiothérapie et la chirurgie sur l’organe atteint », renseigne le professionnel de la santé. L’outil ne se résumera pas à un robot mais proposera une plateforme numérique dotée d’un logiciel d’aide à la décision et de réalité virtuelle. « Mon objectif est de créer une ETI (entreprise de taille intermédiaire). Un leader. C’est ma constante : toujours aller plus loin. Franchir un nouveau cap. Ce qui fait la richesse de cette aventure, c’est tout ce que nous faisons au quotidien. Ce qui nous marque, ce sont souvent des détails, des instants. Tout ce qui peut paraître anecdotique, mais qui fait la différence. Le secret du bonheur, c’est de vivre au jour le jour.
Jean-Claude KOUAGOU
Encadré : Bertin Nahum : Une révélation béninoise !
Le patronyme de Bertin Nahum ne fait l’ombre d’aucun doute sur ses origines. Il est Béninois de souche ayant partagé son enfance entre Dakar où il naquit et Lyon. Il a eu un parcours atypique. Orphelin à 14 ans, il est confié à la direction départementale des Affaires sanitaires et sociales, plus connue sous l’acronyme DDASS. C’est une administration déconcentrée française de l’État intervenant dans le champ des politiques sanitaires, sociales et médico-sociales. Peut-être que ce séjour l’a inspiré aussi. « J’ai perdu ma mère à l’âge de 9 ans, mon père à 14 ans, mais je n’ai pas le recul nécessaire pour savoir ce qu’aurait été ma vie si j’avais vécu différemment », relativise l’homme. Si c’était un facteur de réussite de traverser ce genre de difficultés, cela se saurait. Mon moteur, c’est la conviction. Je vais toujours au bout de mes projets. Au bout de ma vision. Même si je ne suis pas certain d’avoir raison, je ne lâche pas.
JCK