La production agricole est sujette à une pluralité de risques. On dénote, entre autres, les risques de production (climat, maladie des plantes), de marché (volatilité des prix des produits agricoles), institutionnels (modification de la réglementation) et personnels (accident de travail des travailleurs).
Ces dernières années, les dérèglements climatiques amplifient les risques de production. Ces perturbations génèrent des variations de revenus préjudiciables pour les petits producteurs, notamment dans les pays en développement. Les producteurs du monde entier font face à des incertitudes croissantes- liées au marché et aux aléas climatiques- en termes de revenus.
Face à ce facteur de risque grandissant, plusieurs stratégies permettent aux producteurs agricoles de renforcer la résilience de leurs exploitations. Ces stratégies comprennent des mesures au sein de l’exploitation, telles que la diversification ou la sélection de méthodes de production moins risquées. Les agriculteurs développent également des stratégies de mutualisation des risques. Il s’agit des fonds coopératifs, du métayage, des accords de mise en commun des prix, des contrats à terme sur les produits agricoles et la couverture des marchés futurs (Fonta et al. 2018). Dans les pays développés, l’assurance représente également un instrument important dans la gestion des risques en agriculture. En Europe, par exemple, l’assurance climat (MRC) permet d’assurer les producteurs contre les pertes des récoltes liées aux conditions météorologiques.
Toutefois, si l’assurance est très utilisée pour la gestion des risques agricoles dans les pays développés, il n’en est rien dans les pays du Sud. En effet, le marché de l’assurance agricole est marginal dans les pays en développement, notamment en Afrique, et englobe moins de 10% des agriculteurs. Il ne représente que 1% du marché mondial des assurances en Afrique contre + 60% aux États-Unis, près de 20% en Europe et environ 20% en Asie.
Bien qu’il existe quelques expériences d’assurances indicielles[1] sur le maïs, le riz ou encore sur la mortalité du bétail en Afrique de l’Ouest, cela demeure embryonnaire malgré une demande croissante de l’assurance agricole. En effet, certaines études montrent un désir des agriculteurs pour l’instauration des mécanismes assuranciels agricoles dans la sous-région (Fonta et al. 2018 ; Abebe et Bogale 2014 ; Ali et al. 2020 ; Abugri, Amikuzuno, et Daadi 2017).
En Afrique, où plusieurs pays subissent toute la variété observable de la manifestation des crises climatiques (les inondations, la sécheresse ou encore la baisse de la pluviométrie), l’agriculture est très vulnérable aux variations climatiques. Or, dans ces pays le secteur agricole est le pilier de l’économie. Il présente un enjeu économique crucial en termes de création de richesse (PIB), de valeurs d’exportation et d’entrées de devises. L’agriculture représente jusqu’à 30 % du PIB dans certains pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine. Qui plus est, le secteur agricole présente un enjeu de sécurité alimentaire et de perception des revenus de subsistance pour une part importante de la population, comme l’ont démontré les évènements lors de la pandémie de coronavirus et de la crise en Ukraine. En Afrique subsaharienne, environ un ménage sur deux dépend économiquement de l’agriculture de subsistance. Au Bénin, par exemple, le secteur agricole emploie plus de 70% de la population active et contribue à environ 28% du PIB (INSAE, 2020).
Le développement des mécanismes assuranciels permettrait de soutenir les revenus agricoles face aux chocs climatiques récurrents. En effet, ces mécanismes permettraient de garantir un revenu minimal aux agriculteurs en cas de dommages liés aux aléas climatiques. L’essor du big data et la précision des données satellitaires devraient favoriser la conception d’indice précis mieux adapté aux besoins des assurés. L’adoption massive des instruments mobiles devrait également faciliter la diffusion de l’information et une évaluation plus objective des dommages dans des délais courts via des applications mobiles (mobile index assurance).
Enfin, des actions des autorités publiques plus intenses pourraient accélérer la mise en place et l’adoption de tels mécanismes par la création d’un cadre réglementaire favorable au développement de ce type de produit d’assurance ainsi que le déploiement des mesures incitatives.
Auteurs : Beringer GloGlo, Fondateur CJEA
Max-Régis OGOUNCHI, économiste- environnement CJEA