La démocratie en Afrique est à la croisée des chemins et il faut un combat permanent pour lutter contre l’arbitraire, a déclaré Me Salami Ibrahim au Colloque international Mgr Isidore de Souza qui s’est tenu à Cotonou du 1er au 3 février 2019.
Issa SIKITI DA SILVA
La démocratie en Afrique est présentement mise à rude épreuve à cause de l’hypertrophie des chefs d’états et la fascination du pouvoir du chef (chef avec un grand C), a lancé Me Salami Ibrahim. « Parfois on a l’impression qu’il y a un seul pouvoir en Afrique et que les autres pouvoirs ne sont là tout simplement que pour l’accompagner. Nous avons maintenant à faire à des républiques de chefs d’états.Cela magnifie le pouvoir présidentiel et incite à la confusion du pouvoir », a vociféré l’agrégé de droit. Retraçant l’histoire de l’avènement de la démocratie africaine qui avait précipité le renversement du système autocratique et du monopartisme, l’intellectuel musulman a regretté que l’engouement généralisé qu’avait suscité la démocratie ait en fin de compte généré un désenchantement irréversible. La plupart des pays africains n’avaient fait que recopier les constitutions occidentales espérant instaurer la démocratie, l’état de droit et organiser les élections libres et justes, dit-il, avant d’ajouter : « Et cela redonna l’espoir aux peuples africains qu’une autre gouvernance politique était possible tant sur le plan économique que social. Les populations avaient donc commencé à rêver d’un lendemain meilleur ». Selon cet intellectuel musulman, la naissance de la démocratie qui comprenait, entre autres, la limitation des mandats présidentiels, avait aussi engendré un pluralisme associatif pendant lequel on avait assisté à la naissance des mouvements citoyens. Et ces mouvements, a-t-il souligné, ont conduit à l’éveil de la chose publique comme ‘touche pas à ma constitution’.« Balai Citoyen au Burkina Faso, Y en a Marre au Sénégal, et beaucoup d’autres. Ça c’était la révolution », renchérit-il. Malheureusement, ces édifices ont commencé à se fissurer, a déploré Me Salami Ibrahim. « On assiste actuellement à des pratiques monopolistiques et à des tentatives au recours à l’ordre autoritaire comme si on regrettait l’ancien ordre. Et puis l’actuelle démocratie est en train de se faire sans le peuple », a dit Me Ibrahim. Me Salami Ibrahim, qui a déclaré que Mgr Isidore de Souza a marqué sa vie publique, a à cet effet lancé un appel solennel aux peuples africains de rester éveillés. « Mgr Isidore de Souza a fait montre de patience, de générosité, d’intégrité, de tolérance, du dévouement et de l’esprit du service ».