Si les économies avancées ont été les premières bénéficiaires de la mondialisation et continuent à l’être, l’Afrique semble en être le grand perdant.
Issa SIKITI DA SILVA
Quand la première révolution industrielle avait entraîné une poussée du commerce international, l’Afrique est restée largement en marge de l’économie mondiale. Lorsque l’avènement des nouvelles technologies de l’information et de la communication dans les années 90 avaitcrée des chaines de valeurs qui stimulèrent la production industrielle dans les pays, entre autres, comme laChine, l’Inde, l’Indonésie, la Pologne, la Corée du Sud, Taiwan et Singapour, leur permettant de réduire l’écart avec les économies avancées, les pays africains étaient restés exclus de ce processus.
Ces observations ont été faites par Ngozi Okonjo-Iweala et BrahimaSangafowa Coulibaly, deux experts du Brookings Institution dans un papier de recherche publié récemment dans le ‘’Project Syndicate’’.
Toutefois, si l’Afrique a bénéficié de la mondialisation, les innombrables défis ont largement dépassé ces avantages, soulignent ces experts, qui énumèrent deux problèmes majeurs causés par la mondialisation en Afrique.
Désindustrialisation prématurée
Les économies avancées pouvant désormais produire des biens à moindre coût, les pays africains ont eu du mal à développer des industries locales créatrices d’emplois, affirment-ils.
« En outre, certaines sociétés multinationales opérant dans la région évitent les impôts grâce à des mécanismes comptables sophistiqués et légaux, tels que le transfert des bénéfices, privant les gouvernements de ressources indispensables au développement économique », se lamentent-ils.
Changement climatique
En dépit de la contribution limitée ducontinent à ce problème, le continent semble être durement touché. Les cyclones Idai et Kenneth, qui ont récemment dévasté le Malawi, le Mozambique et le Zimbabwe, sont un exemple tragique de ce qui va se passer, declarent-ils.
Le Bénin et la mondialisation
En l’an 2000, en plein processus d’adoption de la mondialisation, le Bénin avait déjà exprimé son scepticisme face à cette politique émergente, laquelle il avait qualifiéeà la tribune de la Commission économique africaine (CEA) de perfectionnement d’un système inique qui a conduit à l’accumulation des richesses par les pays déjà nantis et à l’accentuation de la paupérisation des pays faibles.Le Bénin semblait répondreaux experts qui recommandaient aux pays du Sud de saisir les opportunités de la mondialisation pour se développer.
Sans l’elimination de ses distorsions, la mondialisation ne peut devenir un moteur du developpement, estiment les pays du sud qui déclarent eprouverdes difficultéspour exporter leurs produits vers les marchés du Nord. Près de deux décennies après ce débat ‘’révoltant’’ sur la mondialisation, la présence de l’Afrique sur l’échiquieréconomique international a très peu amélioré car la part du continent dans le commerce mondial des marchandises stagne autour de 3%, ce qui est similaire à sa part de la production manufacturière mondiale.
Pour rendre la mondialisation plus inclusive, Ngozi Okonjo-Iweala et BrahimaSangafowa Coulibaly suggèrent trois points vitaux suivants.
Intégration régionale
Les gouvernements devraient promouvoir l’intégration régionale afin de rendre l’Afrique économiquement plus forte et plus efficace pour faire avancer son programme au niveau international. L’accord de libre-échange continental africain récemment ratifié qui va donner lieu à la libre circulation de biens et de personnes contribuera à libérer le formidable potentiel économique du contienent.
Infrastructures numériques
Améliorer l’infrastructure numérique et ses compétences en matière de technologie est nécessaire pour éviter d’être davantage marginalisé. Le coût de l’accès à l’internet en Afrique est le plus élevé au monde et le taux de pénétration de l’internet est le plus faible. En outre, la main-d’œuvre peu coûteuse et peu qualifiée sur laquelle l’Afrique s’est traditionnellement appuyée devient un avantage moins concurrentiel compte tenu de l’avènement de la quatrième révolution industrielle et des normes de production et des exigences d’infrastructure plus élevées.
Données numériques
L’Afrique, dont la population ne cesse d’augmenter, doit créer un système de propriété et de réglementation de ses données numériques. À l’ère moderne, le capital a fait de la terre le principal atout et le déterminant de la richesse. Mais dans l’économie numérique, les données joueront un rôle clé.