Le Laboratoire d’étalonnage des masses (LEMA) du Bénin et trois autres structures ivoiriennes sont les quatre organismes à recevoir les premières attestations d’accréditation délivrées par le Système ouest africain d’accréditation (SOAC).
Joël YANCLO
Le Système ouest africain d’accréditation (SOAC) a délivré, courant février 2019, ses premières attestations d’accréditation à quatre laboratoires, dont trois du domaine agroalimentaire basés en Côte d’Ivoire à savoir BIOTITIALE, VAGNY LAB et Le Laboratoire National de Santé Publique (LNSP)) et un du domaine de l’étalonnage des masses, le LEMA du Bénin. Ce résultat ouvre donc de nouvelles perspectives, notamment la possibilité pour les opérateurs économiques de réaliser leurs analyses dans des laboratoires compétents accrédités SOAC et proposant des coûts accessibles. Car, jusqu’à récemment, les laboratoires, les organismes d’inspection ou de certification accrédités en Afrique de l’ouest proposaient leurs services aux opérateurs économiques de la région, à des tarifs jugés onéreux, obligés de répercuter à leurs clients les coûts de leur accréditation délivrée par des organismes étrangers. Cet état de fait constituait un frein au développement de plusieurs secteurs d’activités, dont le commerce. Par exemple, il faut rappeler que pour être acceptés sur plusieurs marchés, notamment à l’export, les produits doivent être nécessairement accompagnés de certificats d’analyse émis par des laboratoires accrédités. Dans le cadre de la mise en œuvre de leurs politiques industrielles et commerciales, les Commissions de l’Union économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) et de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) ont fait confiance à l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), à travers les programmes qualité financés par l’Union européenne depuis 2001, pour mettre fin à cette situation en appuyant l’essor d’organismes d’accréditation locaux. Ainsi, dans une perspective de mutualisation des ressources et d’efficacité, l’une des solutions apportées par l’ONUDI était la mise en place du Système ouest Africain d’accréditation (SOAC), un organisme multi-économies couvrant les Etats membres de l’UEMOA, le huit pays de l’Afrique de l’Ouest.
Des coûts inférieurs de 30% à 55%
Aujourd’hui, le SOAC, modèle atypique d’organisme d’accréditation avec moins de cinq organismes multi-économies recensés dans le monde, est pleinement fonctionnel. En effet, la proximité du SOAC, ainsi que l’implication financière des deux commissions (UEMOA et CEDEAO) et du gouvernement ivoirien sur ses charges de fonctionnement, permet aux laboratoires de bénéficier de coûts inférieurs de 30% à 55% à ceux de différents organismes d’accréditation étrangers présents dans la région. Pour la Côte d’Ivoire, l’opérationnalité du SOAC coïncide avec l’entrée en vigueur le 1er janvier 2019 de l’Accord de partenariat Economique intérimaire signé avec l’Union européenne (UE). L’Accord prévoit en effet un libre accès de certains produits alimentaires au marché européen, à condition qu’ils respectent les normes sanitaires et phytosanitaires UE. L’opérationnalité du SOAC arrive donc à point nommé. Les laboratoires intervenant sur la gamme des produits concernés par l’APE pourront requérir une accréditation auprès du SOAC afin, à leur tour, d’offrir leurs services aux opérateurs économiques impliqués. Pour l’UEMOA et la CEDEAO, c’est une réponse concrète et positive d’accompagnement au développement du secteur des produits agroalimentaires une des priorités de la région. Au-delà du commerce, l’accréditation SOAC s’avère utile pour d’autres secteurs telle la santé. Le LNSP a été accrédité pour l’analyse de l’iode dans le sel. La carence en iode est un problème majeur de santé publique au niveau mondial avec environ 2 milliards de malades recensés en 2014 dans pas moins de 130 pays. Les couches sociales les plus touchées sont la femme enceinte et le jeune enfant avec des maladies telles que le goitre, le crétinisme, le faible poids à la naissance, la déficience mentale endémique et le taux de mortalité périnatale. Certes, l’Afrique de l’Ouest enregistre des progrès encourageants dans le traitement de cette maladie. Cependant, l’une des faiblesses du système était la disponibilité de laboratoires compétents pour évaluer la teneur en iode du sel écoulé sur les marchés. Avec son accréditation SOAC, le LNSP vient participer à combler ce gap. Par ailleurs, deux autres laboratoires sont en cours d’accompagnement par le Programme système qualité de l’Afrique de l’ouest (PSQAO) (Burkina et Ghana) en vue d’être accrédité. Ils seront ainsi, avec le LNSP, et le Laboratoire national d’analyse et de contrôle (LANAC) du Sénégal (accrédité avec l’appui du PSQAO), les références dans la région pour l’analyse de ce paramètre clé.
Quelques impressions
« La présence du SOAC sous notre horizon est un réel soulagement, il est désormais possible d’être accrédité en Afrique de l’ouest et à des coûts avantageux », a déclaré Dr. Ganou Leguet. Chef Département Technologie Alimentaire. IRSAT/DTA. Pour Amadou Diop, Point Focal National d’Accréditation du SOAC au Mali, Chef du Service Accréditation, Agence Malienne pour la Normalisation et la Promotion de la Qualité (AMANORM) « le SOAC offre une réelle opportunité de promouvoir la qualité grâce à l’accréditation, dont les avantages profitent aux consommateurs et aux opérateurs économiques maliens. En effet, l’accréditation est un gage de protection du consommateur qui sera désormais exposé à des produits et services certifiés par des organismes d’évaluation de la conformité (OEC), dont les compétences seront régulièrement vérifiées par le SOAC. De même, les opérateurs économiques disposeront à un coût abordable de certificats délivrés par des OEC accrédités par le SOAC, attestations requises sur les marchés internationaux, qui attestent de la conformité de ses produits ». Quant au béninois Marcel Gbaguidi, directeur Général du SOAC, il dira que « sans le soutien des programmes qualité UEMOA-CEDEAO, financés par l’UE et exécutés par l’ONUDI, la progression rapide du SOAC au cours des dernières années n’aurait pas été possible. » Une cérémonie de remise officielle aux récipiendaires est prévue en avril 2019, en marge de la 3ème Assemblée Générale du SOAC.