Bien que leur continent soit doté d’intarissables ressources naturelles capables de générer des richesses incalculables, la majorité des africains vit dans une souffrance extrême plus de 60 ans après le soleil des indépendances. Presque toutes les promesses faites par des gouvernements et des leaders de toutes sortes – semi-démocratiques, autoritaires, corrompus, léninistes-marxistes, anti-impérialistes et pro-occidentaux sont restées lettre morte. A qui profitent toutes ces richesses ?
Issa DA SILVA SIKITI
« En Afrique, nous vivons comme si nous étions des orphelins qui doivent fournir des efforts surhumains pour se nourrir, se vêtir, se soigner et rester vivants. C’est ce qui se passe lorsque la distribution des richesses est inexistante ou existe mais se fait seulement parmi un groupe restreint de personnes. Et pourtant, tout le monde est censé profiter des richesses de leurs pays », se lamente Hervé, un étudiant.
« Dans la plupart des pays africains, les ressources disponibles ne profitent pas à leurs peuples. Une bonne partie des revenus tirés de ces ressources est transférée à l’étranger de façon licite ou illicite. [Par exemple], l’Afrique aurait transféré aux pays riches quelque 1 400 milliards US$ entre 1980 et 2009, soit un transfert annuel net de 47 milliards par an dans le cadre de flux illicites de capitaux. On voit ainsi que ce qu’on appelle « aide publique au développement » (APD) reçue des pays du Nord et des institutions multilatérales est tout à fait dérisoire en comparaison de cette hémorragie financière. Ainsi les flux illicites et licites de capitaux dépouillent-ils l’Afrique d’immenses richesses et de précieux moyens d’investir dans l’éducation, l’agriculture et la santé – des secteurs essentiels pour le développement du continent », explique Demba Moussa Dembélé, dans un document d’analyse publié sur Cairn.info.
Le cas de l’Afrique de l’Ouest
Dembélé indique que les énormes ressources minières, foncières et halieutiques de la sous-région ont tendance à profiter à d’autres plutôt qu’aux populations ouest-africaines, qui auraient pourtant pu y trouver les moyens nécessaires à leur subsistance.
« Le point commun de ces secteurs est qu’ils sont tous insérés dans un modèle d’exploitation extraverti dans lequel les grands groupes étrangers dominent en amont et en aval. Ces groupes importent l’essentiel de leurs intrants et exportent la quasi-totalité de leurs produits sans les transformer. Les recettes tirées de cette exploitation n’alimentent que trop rarement les économies nationales, ou y contribuent à des niveaux beaucoup moins importants que ce qu’ils auraient pu atteindre », souligne-t-il.
Dans une autre analyse publiée sur le site de Statista, Tristan Gaudiaut, journaliste de data, renchérit : « Les ressources africaines et la manne financière qu’elles génèrent entraînent d’importants problèmes de gouvernance et de corruption, impliquant à la fois les gouvernements, mais aussi des multinationales ou des puissances étrangères ».
Mark Curtis et Tim Jones ont écrit dans « Honest Accounts 2017 – How the world profits from Africa’s wealth » : Ceux qui prétendent aider l’Afrique doivent repenser leur rôle. Leur priorité devrait d’abord être ne pas nuire. Pourtant, beaucoup de mal est fait. En particulier, des milliards continuent d’être volés aux citoyens africains en raison d’une action mondiale insuffisante pour lutter contre l’évasion fiscale ».