Le système de paiement international, ces « routes, voies ferrées, ponts et tunnels » financiers qui permettent aux devises d’être échangées et aux capitaux de circuler entre les pays est aujourd’hui confronté au risque croissant de fragmentation, selon le Fonds monétaire international (FMI).
Issa SIKITI DA SILVA
L’invasion de l’Ukraine par la Russie a causé non seulement d’énormes souffrances humaines, mais aussi un choc économique mondial et une forte augmentation du risque d’une « nouvelle guerre froide », a déclaré la Directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, la semaine dernière.
« Un monde qui pourrait se fragmenter en « blocs économiques », créant des obstacles au flux transfrontalier de capitaux, biens, services, idées et technologies », a-t-elle indiqué, ajoutant que cela ne ferait qu’aggraver l’impact de « blocs économiques » plus larges, créant de nouvelles inefficacités et imposant de nouveaux coûts, et nuirait à la productivité et au niveau de vie dans tous les pays.
Déjà en décembre 2021, les médias d’État russes avaient rapporté que la Russie et la Chine avaient convenu de développer des structures financières partagées pour approfondir les liens économiques d’une manière qui ne serait pas affectée par la pression des pays tiers.
Selon le Global Times, un média contrôlé par le gouvernement chinois, cette décision aiderait les deux pays à dissuader la menace de la juridiction à bras longs du gouvernement américain basée sur le réseau de paiement international libellé en dollars américains.
Si la proposition avait quelque peu refroidi jusqu’en janvier 2022, elle semble être revenue sur la table après les sanctions imposées par l’Occident à la Russie, des sanctions qui ont rapproché les deux pays et qui les ont poussés à réfléchir pour faire bloc contre l’Occident.
Risques géopolitiques
« Il y a des risques géopolitiques : certains pays peuvent envisager de développer des systèmes de paiement parallèles et disjoints pour atténuer le risque de sanctions économiques potentielles », a déploré la DG du FMI, sans pourtant citer la Russie et la Chine.
« Face à ces risques, nous pouvons soit céder aux tendances qui rendront le monde plus pauvre et moins stable ou nous pouvons travailler encore plus dur pour trouver des moyens d’empêcher la fragmentation du système monétaire international, tout comme nous devons travailler ensemble pour faire face aux menaces mondiales telles que le changement climatique », a renchéri le leader numéro un du FMI.
Kristalina Georgieva invite les pays à travailler ensemble pour construire de nouvelles « routes, voies ferrées, ponts et tunnels » – en utilisant des plateformes numériques publiques pour connecter les systèmes de paiement.
A en croire le FMI, il est nécessaire de développer une nouvelle infrastructure publique pour connecter et réguler les différents systèmes de paiement, afin de contrer la fragmentation du système monétaire international.
« Cela rendrait les paiements internationaux plus efficaces, plus sûrs et plus inclusifs. Surtout, cela réduirait le risque de fragmentation. C’est un défi de taille, mais pas insurmontable. L’escalade de cette montagne en vaut la peine », a-t-elle réitéré.