Le retrait du Mali, du Burkina Faso et du Niger de la CEDEAO continue à faire réagir la classe politique, les experts, les citoyens ordinaires, ainsi que bon nombre des concitoyens de ces pays qui vivent à l’étranger. Si certains évoquent l’illégitimité de ceux qui ont pris cette décision majeure, normalement reconnue aux gouvernements démocratiquement élus, d’autres en revanche pensent que les juntes devraient organiser un référendum pour demander à l’électorat s’il était indispensable de quitter le bloc régional, comme ce fut le cas pour le Brexit.
Issa DA SILVA SIKITI
« Ce retrait n’est aucunement une décision réfléchie car elle a été prise à l’unanimité par les dirigeants sans consulter les populations. Dans des circonstances politiques actuelles de nos trois pays, je pense que la chose la plus importante à faire, c’était d’organiser un référendum pour laisser le peuple décider si c’était avantageux de continuer à être un Etat membre de la CEDEAO ou quitter ce bloc », a déclaré Abdoulaye, un homme d’affaires résidant au Bénin.
Sans peut-être le savoir, Abdoulaye faisait allusion aux principes de gouvernement ouvert et de participation citoyenne qui sont définis par l’OCDE comme « une culture de gouvernance qui promeut les principes de transparence, d’intégrité, de responsabilité et de participation des parties prenantes à l’appui de la démocratie et d’une croissance inclusive.
« Le concept repose sur l’idée selon laquelle les citoyens et le public devraient pouvoir voir, comprendre, contribuer, suivre et évaluer les décisions et les actions publiques. Un gouvernement ouvert peut accroître la légitimité de la prise de décision publique et améliorer ses résultats, en informant et en impliquant les citoyens – y compris ceux habituellement sous-représentés et en répondant aux besoins réels des citoyens », a souligné un récent rapport de l’OCDE intitulé « OECD Guidelines for Citizen Participation Processes ».
Répression et souveraineté nationale
Cependant, dans une Afrique de l’Ouest où la répression monte en flèche, les décisions des cours et tribunaux sont ignorées par les gouvernants et la vraie démocratie telle que pratiquée par les pères fondateurs – semble s’évaporer au nom de la souveraineté nationale et de la lutte contre l’impérialisme, les intérêts des populations sont relégués au second plan et leur avis est considéré comme l’eau qui coule sous le pont.
Comme dans toute situation dans laquelle les populations n’ont pas été consultées, le retrait a engendré une sorte de confusion parmi certains concitoyens de ces trois pays vivant à l’étranger. C’est le cas d’Ousmane, qui s’inquiète de son sort, lui qui vit au Bénin mais fait des affaires entre ici, Lomé, Lagos et parfois à Accra.
« S’ils disent que nos trois pays quittent le bloc dans l’immédiat, quelle solution ont-ils proposé pour le mouvement des biens et des personnes pour les gens qui voyagent librement à travers la région ? Et la monnaie ? Qu’ils communiquent ces décisions pour qu’on puisse prendre des précautions. Cette décision ne ressemble vraiment pas du tout à quelque chose de mûrement réfléchie », s’est-il plaint.