Le drame récent du rapt intervenu au sein du Parc de la Pendjari a révélé une fois encore, l’impact de la sécurité des biens et des personnes sur l’économie du Bénin. Dans le but d’en savoir plus sur cet aspect de la matière, nous sommes allés à la quête de l’information. C’est ainsi que nous avons recueilli les avis d’un expert sur la question. Le Président directeur général (PDG) de l’Agence privée d’investigations et d’analyses stratégiques (Apias), promoteur de l’Ecole internationale de détective et de stratégie (EIDS), l’ex chef de la Brigade économique et financière (Bef) et contrôleur général de Police à la retraite, Clovis Adanzounon, est encore dans le domaine de la sécurité.
L’économiste du Bénin : La sécurité des biens et des personnes devient un peu plus préoccupante au rythme de l’exode rural incessant. Quelles sont les opportunités qui s’offrent au béninois désireux de se protéger ?
Clovis Adanzounon: Il est d’une évidence que tout le monde veut se protéger. Le besoin de sécurité pour soi, ses enfants, sa famille et son entreprise a toujours existé. Mais des circonstances surviennent dans la vie pour diminuer le besoin ou l’aggraver.
Notre pays dispose de plusieurs atouts pour la sécurité des personnes et des biens. Il s’agit des forces de sécurité républicaines et les sociétés privées de sécurité. Si l’accès aux agences de sécurité privée est à la portée de tout le monde, cela n’est pas le cas pour les forces de sécurité publique.
Quels sont les atouts et faiblesses de chacune de ces sources de protection ?
Les forces de sécurité républicaines disposent comme atout, la force de coercition. Leur faiblesse réside dans leur déploiement. En effet, ces forces républicaines sont déployées pour assurer la sécurité de toute la population sans distinction de sexe, de moyens de coercition. C’est dans des cas rares qu’on voit le déploiement des forces républicaines pour assurer la sécurité de personnes privées. Quand ces cas surviennent, ils sont souvent liés à des risques évidents sur la vie de l’individu en question.
Pour ce qui concerne les agences de sécurité privées, elles ont l’opportunité de servir directement les populations, individuellement. Ainsi, toute personne qui se sent en danger et qui a les moyens pour les rémunérer peut le faire. Mais, ces agences ne disposent pas de la force de coercition. Elles sont donc limitées.
Quels sont les systèmes ou modèles de sécurité qui sont utilisés au Bénin ?
Quand nous parlons de système de sécurité, il faut y entendre un ensemble d’éléments mis en place permettant de détecter une situation de danger potentiel et d’en prévenir les conséquences. Il existe donc plusieurs types de système en raison des composantes qui y sont implantées. L’homme est parfois et très souvent intégré dans les différents systèmes de sécurité.
Les systèmes de sécurité sont donc fonction des besoins ou des cibles que l’on veut sécuriser. On convient donc qu’un système adopté pour sécuriser une maison en banlieue, sera différent de celui d’une maison en ville ou de celui déployé pour un individu. Dans le contexte qui est le nôtre au Bénin, on peut dire sans risque de se tromper que la Police assure la sécurité publique, les militaires la sécurité des institutions et des frontières du pays, les agences privées et les cabinets de détectives assurent quant à eux la sécurité des privés.
Quel regard portez-vous sur le système sécuritaire dans son ensemble ? Quels résultats donne la synergie des actions entre toutes ces sources de protection ?
Le système sécuritaire dans son ensemble fonctionne du mieux qu’il peut. Déjà l’initiative de la fusion de la gendarmerie et de la Police est un premier pas. Il reste que s’établissent durablement entre les forces de sécurité publique, les agences privées de sécurité, les détectives privés et les populations, une coordination, un modus d’échanges de renseignements afin de renforcer le dispositif dans son ensemble. Car, aussi vrai qu’il est dit que les forces de l’ordre ne font pas de la magie pour conduire leurs enquêtes, il importe qu’elles bénéficient du soutien des populations et surtout des agences privées de sécurité et les détectives privés qui sont de potentiels informateurs.
Donc, si population, agences privées de sécurité, forces de sécurité publique, les détectives privés peuvent travailler ensemble, le système sécuritaire sera d’avantage renforcé.
Quelles sont les dispositions à prendre pour être en sécurité au Bénin ?
La sécurité commence par soi-même. Ce n’est pas l’action extérieure qui détermine notre sécurité. Même s’il est vrai que l’Etat central a des responsabilités vis-à-vis de notre sécurité, il faut savoir que c’est le citoyen qui se protège d’abord lui-même. Il est nécessaire pour chaque citoyen épris de sécurité de se former aux attitudes qui peuvent le préserver du danger.
Quelles sont les conséquences de l’état de la sécurité sur l’économie béninoise ?
Une situation d’insécurité impacte négativement les activités économiques formelles donc nationales. En effet, quel opérateur voudra ouvrir et maintenir ses activités dans une rue en proie à l’insécurité ? Aucun.
La sécurité est déterminante pour la prospérité de l’économie, du développement des activités économiques.
Quelles sont les actions que doit poser l’Etat central pour combler les attentes des citoyens en matière de sécurité ?
Pour combler les attentes des citoyens en matière de sécurité, il requiert que l’Etat renforce la formation des agents commis à la sécurité. L’Etat doit veiller aussi à fournir à ces agents les matériels de travail pour exceller dans leur travail. L’Etat doit également organiser voire intensifier les patrouilles de sécurité. Enfin, l’Etat doit veiller à éduquer les populations à la dénonciation, à la collaboration avec les forces publiques pour l’atteinte des objectifs de sécurité totale.
Quelles sont les zones où l’insécurité est un peu plus présente à Cotonou, Porto-Novo et Parakou ? Sans oublier les axes routiers les plus insécurisés.
Il n’y a pas de zone plus sécurisée que d’autres. Toutes les zones connaissent l’insécurité selon le temps et l’espace. Il appartient à tout le monde de prendre sa responsabilité pour limiter les risques. Par exemple, un citoyen qui consciemment héberge des criminels augmente le risque d’insécurité tant sur la zone qu’il habite que les autres espaces nationaux.
La responsabilité citoyenne est grande pour réduire les risques d’insécurité dans nos différentes localités.
Pourquoi les différentes sources de sécurité qui existent n’arrivent pas à maîtriser ces régions et zones où la sécurité est fortement menacée ?
Il n’y a pas de sécurité à 100%. Ce serait utopique de le penser. Les criminels ne se résignent pas si facilement. Ils observent et surveillent les baisses de forme des stratégies sécuritaires qui sont déployées pour attaquer. Pour réduire les risques d’insécurité, les apports ou soutiens des citoyens sont vivement souhaités.
Si le Bénin améliore son appareil sécuritaire, quel peut être l’impact sur l’économie dans quelques années ?
Un système sécuritaire amélioré impactera positivement l’économie. C’est indiscutable.
Avez-vous un message à l’endroit des différentes sources de sécurité au Bénin ?
La sécurité est la matière la plus négligée. Mais à l’évidence, elle n’a pas de prix. Et pour cela, chaque citoyen doit se former et conscientiser tout son entourage à des gestes simples et préventifs.
Entretien réalisé par Nafiou OGOUCHOLA