Les eaux souterraines sont essentielles à l’activité et à la croissance économiques, à la sécurité alimentaire, au développement socioéconomique et à l’adaptation aux effets du changement climatique, selon la Banque mondiale. Toutefois, poursuit cette institution de Bretton Woods, la pérennité de cette ressource critique est menacée dans de nombreuses régions, entre autres parce qu’elle n’est pas appréciée à sa juste valeur et qu’elle est tenue pour acquise. Bien que négligées et marginalisées en Afrique, les eaux souterraines sont une ressource immense capable de jouer un rôle vital pour la sécurité de l’eau et face aux changements du climat.
Issa DA SILVA SIKITI
« Avec des réserves bien plus importantes que celles des rivières, des lacs et des barrages, les eaux souterraines pourraient changer la donne pour le continent, en particulier dans des régions comme la Libye, l’Égypte, le Soudan et l’Afrique du Sud », a indiqué Yaa Ngonyama, consultante principale de Frost & Sullivan Africa.
Dans un document d’analyse publié sur le site Nature Africa, Abdullahi Tsanni et Gilbert Nakweya ont fait savoir que de nombreux pays d’Afrique disposaient d’abondantes réserves d’eau souterraine, suffisantes pour survivre à au moins cinq années de sécheresse. Malheureusement, ces deux experts ont déploré sa négligence et sa sous-utilisation, même dans les pays où elles sont suffisantes pour fournir de l’eau pendant plus de 50 ans, comme en Éthiopie, au Mali, à Madagascar, au Niger et au Nigeria.
Et la Banque mondiale de renchérir : « Les eaux souterraines constituent une sorte d’assurance ‘naturelle’. Elles peuvent compenser un tiers des pertes de croissance économique mondiale dues aux sécheresses, tout en garantissant que les villes ne manquent pas d’eau pendant les périodes de sécheresse prolongées. Dans la plupart des cas, cette ressource a été sous-évaluée et surexploitée, sans que l’on tienne suffisamment compte de sa préservation à long terme, ce qui s’explique en partie par l’absence de recherches systématiques sur son importance économique ».
Libérer son potentiel
Face à cette litanie d’attributs proférée par des spécialistes sur l’abondance et l’importance capitale des eaux souterraines dans un continent sous-développé menacé par une insécurité hydrique sans précédent, l’experte sud-africaine de Frost & Sullivan, citée ci-dessus, lance un appel solennel à la communauté des nations africaines. « La solution à la crise de l’eau en Afrique se trouve juste sous nos pieds, donc il est temps de libérer son potentiel.
Une gestion prudente est donc essentielle pour assurer sa durabilité pour les générations futures ».
La Banque mondiale tape du poing sur la table : « (…) Les eaux souterraines doivent être considérées comme une priorité par les responsables politiques afin de garantir qu’elles soient utilisées d’une manière qui profite à la société, à l’économie et à l’environnement. Une action politique de haut niveau est nécessaire pour concilier les coûts privés et sociaux de l’utilisation des eaux souterraines ».
« Par exemple, des politiques ciblées et des réformes des systèmes de subventions peuvent garantir que l’expansion des énergies vertes et des investissements agricoles n’entraîne pas de surexploitation, de dégradation et de mauvaise gestion des nappes phréatiques et des écosystèmes qui en dépendent ».