La convergence est d’abord un concept, ensuite une disposition pratique qui permet de définir les caractères spécifiques d’un projet commun « convergence ».
. C’est donc une action commune de tendre vers un même but, c’est-à-dire l’objectif ciblé par les Etats regroupés en communauté économique
Il apparaît ainsi que la convergence n’est pas et ne peut devenir, par la suite, un engagement politique neutre de tout Etat membre d’une union économique.
Plusieurs experts font croire que l’intégration africaine peut être réalisée tout de go, ce qui nous parait un leurre. L’intégration économique et sociale, dans un contexte africain, est un processus à la fois expérimental, dégressif et progressif, qui doit s’adosser à une ferme volonté des décideurs politiques.
La convergence dans les faits incite voire oblige tout membre d’une communauté à prendre parti soit, pour une voie claire pour l’intégration soit, par une manière propre, ralentir ou bloquer le mécanisme d’intégration mis en place et adopté d’un commun accord.
C’est pourquoi, lato-sensu, la « convergence » consiste à engager pour un même résultat des efforts convergents dans une tendance évolutive liée à la vie d’une communauté humaine ayant un destin, à priori, inséparable ou unie par un intérêt.
En matière d’intégration économique africaine, mettons alors et un instant en réserve tout instinct technocrate de macroéconomiste. Cette politique des Institutions de Bretton Woods est en partie la cause des difficultés économiques de l’Afrique. Des décennies plus tard, ces mêmes références notamment la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International (FMI) ont reconnu que ce fut une erreur d’avoir dissout des structures et des Institutions africaines pour mauvaise gestion et, cependant que celles-ci répondaient à des besoins clairement exprimés par les populations.
Peut-être devrions-nous, sous toute réserve, raisonner et agir mieux en microéconomiste ? C’est-à-dire, et dans un dialogue ouvert engagé par les décideurs politiques, nous préoccuper du comportement individuel des agents économiques, les besoins des populations de l’union économique et sociale en construction, pour un but unique, une Afrique unitaire : les Etats-Unis d’Afrique. Ce sont, cet état unitaire, les citoyens, les représentants de la société civile : syndicats, associations de consommateurs, les ONG, des maillons essentiels du modèle de vie, en création. Ne devrons-nous pas faire une autre expérience ? Adopter une stratégie nouvelle de développement : au plan national et régional, en matière d’intégration dans une nouvelle vision : « Modèle de la Réalité Economique et Sociale de l’Afrique » (MO.R.E.S.A.)
L’U.A, Cercle vertueux de l’Intégration
L’Union Africaine (UA), en instituant, par exemple, un standard continental de qualification des Enseignants, dans une perspective que les Chefs d’Etats africains facilitent la mobilité de ces enseignants, au niveau régional comme continental ; cette stratégie ouvre de facto la voie à une intégration du secteur de l’enseignement. Cette manière douce de l’intégration sera la mieux réussie car, c’est ce qui est recherché par les populations directement concernées.
De même, la Zlecaf est un outil que l’Union Africaine devrait fortement promouvoir auprès des dirigeants africains. Les perspectives agricoles de l’OCDE/FAO indiquent que l’Afrique produit moins de 10% du riz mondial, et que les importations du Continent devraient exploser d’ici 2028, passant de 17 millions de tonnes à 29 millions de tonnes ; faisant établir la part de l’Afrique dans les importations mondiales à 49% contre 35% actuellement, en 2019.
Les négociations au sein de la ZLECAF, l’union Africaine, dans son rôle de maitre d’œuvre de l’Etat unitaire, doit s’installer dans une mission de cercle concentrique et vertueux pour tous les Etats parties de la ZLECAF et, proposer un schéma permettant de responsabiliser des pays africains, avec des mesures d’accompagnement, à produire du riz, en quantité et en qualité, permettant de réduire voire de supprimer la dépendance de l’Afrique concernant l’importation hors zone Afrique, de cette denrée alimentaire.
Plusieurs autres exemples existent et devraient faire l’objet des négociations statutaires dans le cadre de la ZLECAF.
L’union Africaine devrait s’installer dans un rôle de manager et de stratège politique d’intégration. C’est-à-dire, arrêter et proposer d’une façon pratique une planification régionale, nonobstant l’existence des négociations entre Etats parties qui présentent des intérêts communs à créer des Comités d’action (sectoriels) en vue de promouvoir, avec succès, des activités et des secteurs ciblés d’un commun accord. Le mémorandum de Badagry de 2003 pour le Bénin et d’une manière générale l’expérience du 20 août 2019, entre le Nigéria et les pays voisins relativement à la gestion des frontières communes dans le cadre des échanges commerciaux constituent un test positif pour une approche pragmatique et solidaire des négociations Zlecaf : entre Etats parties ayant des intérêts communs d’une part , et dans une perspective de planification et de spécialisation au sein de l’Union Africaine, pour la gestion des surplus de production, et des spécialisations, d’autre part. L’intégration, c’est la somme des forces et des faiblesses mises en gestion solidaire et, d’amour.
Tout ce processus doit s’appuyer sur des mécanismes innovants de compensation adaptés et aptes à accélérer le processus politique et surtout social d’intégration engagé et ayant un réel impact sur la vie des populations. En vérité, il s’agit désormais et pour chaque dirigeant politique que l’intégration africaine devienne un véritable instrument de politique de développement et social, à la fois national et communautaire, source de paix et d’identité africaine; de la sorte que des secteurs domestiques ou communautaires qui méritent d’être soutenus, promus, en fonction des critères avérés ou non, constituent des objets de négociations entre Etats Membres dans un élan de solidarité africaine et de développement inclusif et harmonisé.
La question de la monnaie africaine fondée sur les monnaies régionales a été évoquée dans le quotidien «L’économiste» du Bénin dans sa parution du 13 Août 2019, N°1472.
Examinons maintenant d’autres aspects de la politique d’intégration africaine dans un essai de définition, d’observations de certains indicateurs économiques et, dans une comparaison empirique, en se référant à un contexte de «gouvernance » internationale, en dehors de toute contribution (directe) du continent africain.
La politique–économique, monétaire…, lato sensu, c’est l’ensemble des options prises pas un ou plusieurs Etats et relevant de leur domaine de compétence. Celle des Etats de l’U.E.M.O.A. apparait bivalente: lutter contre l’inflation dans un modèle de déflation et, assurer un certain équilibre des comptes extérieurs. Ainsi, ce qui se présente comme une volonté politique n’est pas une dominante, une priorité, voire une stratégie obstinée, pour financer les activités de transformations économiques et sociales de l’Union en construction.
Le taux d’inflation annuel de l’Union s’établit à 0,9 % en 2018 contre 0,8 % en 2017. Le taux d’endettement est passé à 47,8% en 2018 contre 45,4% en 2017 et la situation extérieure de l’Union durant la même année 2018 se caractérise par un solde global excédentaire de 568,3 milliards contre 304,1 milliards FCFA observé un an plus tôt, en 2017.
Le solde de la balance des paiements excédentaire de 1.142,5 milliards FCFA en 2018, révèle également des faiblesses structurelles des économies de l’UEMOA : un déficit du compte courant de 4.470,2 milliards du fait de la dégradation du solde de la balance des biens, un déficit commercial, indique le Rapport, qui « s’est aggravé », le déficit de la balance des services qui s’est dégradé de +2,1%, le déficit du revenu primaire (paiement dividendes et intérêts dette publique). Seuls les revenus secondaires, les transferts de fonds des migrants se sont accrus de +13,9%.
Toutefois, ce rapport d’activité de l’UEMOA indique que cette Communauté est classée 58ème économie mondiale, en précisant que cet ensemble économique dispose des atouts pour hisser le revenu des populations « à au moins au niveau des pays à revenu intermédiaire ».
Plusieurs études comparatives sont faites relativement à l’évolution de la Zone UEMOA par rapport à d’autres ensembles économiques. Retenons celle de Dedewanou Finagnon Antoine, chercheur à l’Université de LAVAL, CANADA, qui a retenu notre attention (CF Revue d’analyse des politiques économiques et financières, volume 1- 2015, Ministère des Finances, COTONOU BENIN).
Ce chercheur constate dans une démarche empirique et par un pragmatisme que le développement des BRICS (Brésil-Russie-Inde-Chine-Afrique du Sud) sur les périodes examinées (80-96 et 97-2013) se caractérise par une performance économique et sociale rapide tandis que les pays membres de l’UEMOA sont restés à la traine.
Dans une étude réalisée deux années plus tard, le Rapport du PNUD sur le développement humain 2015, révèle qu’il n’existe aucun pays membre de l’UEMOA classé « Développement humain très élevé ni élevé ». Au titre du développement humain faible, l’Afrique est représentée par plus de 40 Etats sur les 55 Etats membres de l’Union Africaine, dont les Etats membres de l’UEMOA, ayant un membre qui occupe le dernier rang des 188 pays examinés par le PNUD (CF François Kouadio, les Politiques d’Intégration en Afrique, COTONOU BENIN, 4e trimestre 2017).
Une différence fondamentale apparait entre les BRICS et les Etats membres de l’UEMOA : l’outil de la monnaie, qui n’est pas neutre, comme un des instruments de financement du développement et de la transformation sociale associée à une politique agricole sur mesure dans une planification régionale adaptée, comparable aux choix de la politique agricole des BRICS et, un peu sur le modèle de la Politique Agricole Commune de la CEE (PAC), a semble-t-il fait défaut à l’UEMOA. Certes, la PAC révèle désormais ses limites. Mais elle a le mérite d’entrainer l’Union Européenne dans un mouvement d’ensemble de réformes adaptées qui pourraient, sans un répondant en Afrique, devenir, si ce n’est déjà le cas, une source de blocage de toute initiative de développement agricole dans nos pays.
L’unique chance pour le continent et donc pour l’UEMOA, et aussi pour la sous-région CEDEAO est que le paysage bancaire comme les structures économiques sont relativement modestes dans les différentes régions africaines et, de ce fait, transformables par des réformes opportunes, progressives et adaptées. On note pour l’UEMOA, 127 Banques à fin décembre 2018 et 18 Etablissements financiers. Apprécions ensemble les 12 meilleures banques de l’UEMOA en 2018. Ce ne sont pas des banques ni de transformation économique, ni de financement des choix de politique d’intégration.
Les indicateurs ci-après en témoignent.
Tableau des 12 meilleures banques en 2018 de l’UEMOA.
Source : BCEAO
+ GAB= Guichet automatique de banque.
Voici le paysage bancaire de l’UEMOA
L’offre globale de crédits bancaires dans l’UNION est en hausse de 17,5% en 2018, soit en valeur absolue 14.849,1 milliards FCFA contre 12633,2 milliards FCFA en 2017. «La structure des crédits mis en place selon l’objet dans l’UEMOA en 2018 », indique aussi clairement les choix de politique économique des Etats membres de l’UNION : les crédits d’exportation augmentent de +201.0%. Et la répartition de l’offre globale de ces crédits bancaires, par secteur, se présente comme suit : Trésorerie (63%), Consommation (13%), Equipements (9%), Habitation (2%), Exportation (1%) et Autres 12%, à l’intérieur desquels, on retrouvera les financements des investissements dont les crédits aux Petites et Moyennes entreprises. Par ailleurs, la part des crédits dont l’échéance est égale ou inférieure à deux ans est prépondérante (75,3%) et les crédits de « longue durée, supérieure à 5 ans » ne sont pas adaptés au financement immobilier, même pour les jeunes salariés présentant des garanties de salaire, de carrière et dans une branche d’activité qui a la perspective d’une bonne évolution.
La zone UEMOA compte 120 millions d’habitants dont 20 millions seulement bancarisés, soit 17% et, parmi les 100 millions de non bancarisés, on dénombre 31 millions qui possèdent des Smartphones susceptibles d’utiliser des services financiers numériques.
De 2015 à 2018, le PIB en volume de l’UEMOA a connu cette évolution : 47.940,3 (2015), 50.991,8 (2016), 54.365,4 (2017) et 57.958,6 milliards FCFA en 2018 ; pour respectivement des crédits bancaires de 11.976,4 milliards FCFA ; 12.376,8 ; 12.633,2 ; et 14.849,1 milliards de FCFA.
Des choix à tâtons
Retenons deux notions essentielles en matière de convergence économique : le critère et la norme.
Le critère, c’est le principe auquel on se réfère, c’est-à-dire la règle générale théorique qui guide la conduite d’un groupe d’Etats, en matière de bonne gouvernance. Tandis que la norme, c’est ce qui est conforme à la règle établie et adoptée, de commun accord par ce groupe d’Etats, cette communauté.
Source : Commission UEMOA, juin 2019.
Les efforts de convergence sur les trois dernières années (2016, 2017 et 2018) dans l’Uemoa nous révèlent que la convergence apparait comme une disposition non contraignante. La Commission de l’Union a certes un droit de regard sur l’évolution de cet engagement politique mais, elle ne semble pas outillée pour exercer une pression particulière sur un Etat membre.
UEMOA, zone de déflation
Depuis, nos recherches publiées partiellement sous le titre : « Doit-on redéfinir une nouvelle parité du Franc CFA ? », in le Monde de l’économie, septembre 1977, Paris- France ; seuls les éléments récents de « l’état de la convergence » dans l’UEMOA, permettent de mettre en évidence la véritable nature de zone de déflation du Franc CFA.
En effet, on note que la zone de l’UEMOA est semblable à une zone de déflation : pour une norme de 3% d’inflation, les Etats membres réalisent plutôt des taux d’inflation nettement plus bas, cependant que les normes relatives à la pression fiscale et à la masse salariale sur les recettes fiscales sont insuffisamment respectées. En conséquence, l’UEMOA peut être assimilée à une économie de déflation. Toute croissance est artificielle : pas homogène ni inclusive.
La déflation, lato-sensu, dans une acception monétariste, la monnaie n’étant pas neutre et comme un des instruments de la politique économique, est une diminution continue du niveau des prix, associée généralement à une contraction de l’activité économique : baisse de la demande et un marché de l’emploi déprimé, qui résulte soit d’un mouvement spontané de l’économie, soit d’une politique : réduction de la masse monétaire, encadrement du crédit…
Nous venons de rappeler ci-dessus l’évolution de deux agrégats, P.I.B et offre globale de crédits bancaires dans l’UNION. Or, le produit intérieur brut, la somme des valeurs ajoutées : biens et services, réalisées annuellement sur le territoire national, et en l’espèce dans l’UEMOA, par les entreprises exerçant leurs activités dans l’UNION indique une forme de corrélation entre le crédit bancaire et le P.I.B. Et l’investissement n’est pas véritablement soutenu par des crédits bancaires adaptés. L’une des raisons tient à l’utilisation abusive du PIB, à l’origine, à cause de la crise de 1929, est un indicateur de crise. Par la suite, le PIB, après Bretton Woods, est imposé au reste du monde par les Etats Unis, et voilé secrètement par le Plan Marshall, comme un indicateur de bien-être : le PIB ne mesure pas la santé, l’éducation, l’alimentation, même la biodiversité et le secteur dit « informel » est ignoré. L’Indice du Développement Humain (IDH) du PNUD a réduit le mythe du PIB et du taux de croissance.
Le Rapport Crédits Bancaires sur P.I.B nous donne les taux suivants : 2015 (24,98%), 2016 (24,27%), 2017(23,23%) et 2018(25,62%). Cette moyenne UEMOA est faible. Ce ratio a atteint 40% au 30 juin 2019, pour le Togo (CF Financial Afrik, 7octobre 2019).
C’est pourquoi, toute analyse économique de cette UNION est perplexe. La transparence est réduite en ce qui concerne le choix politique de convergence dans l’UNION. En outre, cette convergence est une disposition non contraignante.
De même, il n’est guère aisé de comparer l’évolution de la convergence U.E.M.O.A par rapport à la convergence recherchée par la C.E.D.E.A.O (U.E.M.O.A + Cap Vert, Gambie, Ghana, Guinée Conakry, Libéria, Sierra Léone et Nigéria).
Le tableau de convergence U. E.M.O.A ci-dessus mentionne cinq grandes rubriques selon l’objet recherché par cette Communauté. A défaut d’un essai de comparaison avec un tableau identique de la C.E.D.A.O, on relève plutôt que l’objet préoccupant, du moins pour les 7 autres Etats membres de la C.E.D.A.O, fixe la priorité sur deux (2) critères : la convergence de premier rang : ratio du déficit budgétaire/P.I.B nominal, Taux d’inflation, financement du déficit budgétaire par la Banque centrale et Réserves brutes ; Et la convergence de second rang qui se préoccupe : des arriérés, du ratio recettes fiscales/P.I.B nominal, du ratio masse salariale/Recettes fiscales, du ratio investissements publics financés sur ressources internes/ recettes fiscales, du taux d’intérêt et de la stabilité des taux de change réel.
La réalité économique, selon les travaux du Professeur Jean Fourastié, cet « immortel », une pensée économique fondée sur le réel (CF Productivité et richesse des Nations, Gallimard, Paris), il est conséquent d’admettre que les préoccupations de bonne gouvernance de ces deux organisations apparaissent identiques. Mais, chacun de ces organismes se réclament des approches expérimentales propres qui sont de nature à ne pas favoriser, du moins dans la solidarité économique et politique, la convergence unitaire : celle qui permet de disposer d’un principal instrument de politique économique, la Banque centrale multilatérale. Au mieux ces Etats peuvent demeurer à la fois dans une Union Monétaire, pour un groupe ; en Entente monétaire avec le second groupe, sans un grand succès de parvenir à une Union Monétaire définitive pour l’ensemble de cette communauté.
Réduire la suprématie du dollar américain
Il apparaît nécessaire d’harmoniser le chemin de convergence par la création de l’Institut Monétaire Fédéral, et véritablement commun, dans une approche différentielle, Union et Ente monétaires, mais rigoureuse qui permet de réaliser l’intégration économique et sociale avec des monnaies échangées entre elles à parité fixe. On peut décider d’un taux de change fixe entre les monnaies de la Zone et vis-à-vis d’une monnaie ou un panier de monnaies des principaux partenaires de la Zone et, arrêter une fluctuation dans la limite d’un taux pivot X% de part et d’autre (de haut et en bas) ; en faisant intervenir soit les Banques Centrales africaines concernées soit et/ou avec l’Institut d’Emission du ou des partenaires concernés, afin de maintenir la fixité du taux et les marges de fluctuation préalablement arrêtées d’un commun accord. L’Euro, a peu joué son rôle de monnaie de réserve : le niveau de réserves mondiales en Euro est demeuré à 20% tandis que le dollar américain, le reflet du déficit américain qui frôle les 1.000 milliards de dollars en 2019, (4,6% du PIB), se maintient, avec son économie d’endettement, curieusement sans conséquence pour Washington, à environ 70 à 80% des réserves mondiales, cela pour plusieurs raisons : 1/L’Europe accepte voire apprécie les euro-dollars (dollars à l’extérieur des Etats-Unis), et elle règle encore l’essentiel de ses transactions dont 80 % de ses importations de pétrole en dollars malgré l’existence de l’Euro. 2/L’Afrique a des difficultés parce qu’elle a pour monnaies de règlement les devises étrangères, Euros et dollars principalement. Le système bancaire des pays africains à une dépendance vis-à-vis des autres systèmes bancaires et, notamment à la liquidité dollars.
La puissance du dollar des Etats-Unis est ainsi créée par le reste du monde. C’est pour cela que le dollar n’est plus simplement un moyen de paiement mais un pouvoir de domination entre les mains de l’Exécutif Fédéral américain.
En l’espèce, et dans l’U.E.M.O.A ; il n’est pas excessif de dire que la mission de la B.C.E.A.O. est proche du « mandat de la B.C.E. (Banque Centrale Européenne) de maintien de la stabilité des prix ». D’ailleurs, l’institut monétaire multinational ouest africain et ses archives affirment : « Outre l’objectif explicite de stabilité des prix assigné à la politique monétaire… (et) sans préjudice de l’objectif de la stabilité des prix, la BCEAO apporte son concours aux politiques économiques de l’Union ». Cependant dans le système des banques centrales européennes, la BCEAO n’est pas une interlocutrice de la B.C.E, c’est plutôt la Banque de France. La session extraordinaire de l’UEMOA du 2 décembre 2019, Dakar a fait aussi d’autres constats face aux médias. L’Afrique doit cesser de se faire peur et décider de battre monnaie : elle a l’avantage de s’inspirer des expériences africaines et des autres monnaies, le dollar et surtout du Franc français institué le 7 avril 1803. A l’origine, cette monnaie était fondée sur l’argent et l’or, puis sur l’or seul et convertible : elle valait 322,5mg d’or et elle a connu plusieurs dévaluations : 25 juin 1928 (1ère guerre mondiale), 1936, 1938, 1940, 1945,1949, décembre 1958 et, le « nouveau franc » fut crée en 1960. Il eut d’autres dévaluations durant l’expérience européenne : le Serpent monétaire en 1972, le Système monétaire européen (SME) en 1979, le Franc relativement faible subit une dépréciation de fait de 60% par rapport au Mark Allemand, entre 1975 et 1983. Le 1er janvier 1999, avec l’adoption de la monnaie unique européenne, le Franc devient une subdivision de l’Euro, nouvelle monnaie scripturale officielle de la France. La valeur de l’Euro a été fixée à 6,55957 francs (0,152 Euro pour 1 Franc), consacrant la disparition du Franc le 17 février 2002. Le 1er janvier 2002, les pièces et les billets en Euro sont mis en circulation en France.
On doit retenir, notamment, que toute monnaie a, à la fois un rôle de stabilité mais, elle a aussi un rôle déterminant dans la politique économique, donc du développement d’une nation. Voilà comment se présentent l’enjeu et le défi de battre monnaie pour une nation, une communauté économique et sociale. Il faut admettre que toute décision, en cette matière, est un pari à gérer rigoureusement. C’est un choix raisonné du pouvoir et des intérêts communs et, surtout de souveraineté. Il existe toujours « des monnaies dominantes et des monnaies dominées », quelque soit le partenaire en face : ce sont des négociations, parfois longues, secrètes qui doivent consacrer à la monnaie africaine, son identité de monnaie de souveraineté négociée.
De nos jours pour qu’une monnaie soit véritablement internationale, il faut qu’elle remplisse ces trois fonctions : monnaie de Réserve (avec possibilité de contrôle par l’Etat concerné), de Paiement et enfin monnaie de Facturation, c’est-à-dire la fixation des prix des échanges des pays concernés dans leur monnaie, nonobstant que les marchés des capitaux (et/ou flottants) font l’objet de surveillance. Plusieurs instruments existent : la BAD, les bourses des valeurs, etc…
Il n’existe plus une règle rigide, en la matière depuis que le président Américain Richard NIXON, en 1974, a mis fin au Système Monétaire International issu des Accords de Bretton Woods, en déclarant l’inconvertibilité du dollar en or ; et la fin de la stabilité des changes. A cette époque, les Etats-Unis avaient décidé de jouer un rôle de paix et de reconstruction de l’Europe après la seconde guerre mondiale. Cette politique est désormais révolue, à la lumière du rejet du multilatéralisme par les Etats-Unis au sein des instances de l’O.N.U et du G.7 notamment.
Les Européens qui font au contraire la promotion du multilatéralisme n’utiliseront certes pas l’Euro comme une arme commerciale et, même comme un pouvoir de domination. C’est pourquoi l’Europe (associée à l’Afrique intégrée) doit contribuer à réduire toute situation politique et commerciale imprévisible que pourrait provoquer le dollar américain.
Les Africains en refusant de mettre en place des mécanismes aptes à leur donner un pouvoir de négociation dans les Instances internationales, ne peuvent que se plaindre à leur manque de vision réaliste d’un monde nouveau organisé, en cercles de confrontations diplomatiques et commerciales, une forme de jungle, aux effets négatifs réels et immédiats sur les populations insuffisamment représentées par leurs instances politiques.
Ainsi le droit de battre monnaie devient un acte fort de négociation et de souveraineté dans nos sociétés d’individualisme.
Le G.7 clos, le 26 Août 2019 à Biarritz (France) propose un nouveau pacte pour la lutte contre l’insécurité dans le Sahel(G.5) et, plus généralement en Afrique C.E.D.E.A.O et centrale(Cameroun), sans se préoccuper véritablement des problèmes de réduction des inégalités, la source principale de l’insécurité.
La crise financière mondiale 2008-2009 est une œuvre des pays occidentaux : elle est née par le comportement des Etats les plus industrialisés et, ce sont eux-mêmes à travers leur « G.7 » qui proposa l’orientation économique nouvelle et les mesures mises en œuvre ont permis de contenir cette crise et, en tenant à l’écart toute contribution de l’Afrique et de ses besoins de croissance. Il est évident que l’Afrique, l’Union Africaine, soit 55 pays qui représentent environ 3% du commerce mondial, ne peut guère recevoir, en matière d’Investissements Directs Etrangers (I.D.E) de ces principaux groupes : Puissances occidentales, la Chine et le Japon, et de chacun de ces groupes, qu’environ 3% conformes à la place de l’Afrique dans les échanges mondiaux. Parfois, il s’agit d’une confusion de ligne de crédit et de .I.D.E. En effet, la lecture des statistiques internationales : C.N.U.C.E.D, européennes, Japon et Chine est peu lisible à distinguer les I.D.E relevant des Etats et des autres investissements initiés par une personne morale ou physique non étatique. Quand, par exemple, la T.I.C.A.D 7 (Japon) retient cette vision : «Faire progresser le développement de l’Afrique par les hommes, la technologie et l’innovation », est-ce indicatif de ce que le continent africain n’a pas encore une véritable stratégie politique d’intégration ? La ZLECAF, sera-t-elle utilement mise en œuvre par les Etats africains ?
L’Afrique se contente de réclamer et, en vain, une réforme des Nations Unies. Cependant qu’elle refuse de s’armer par des outils de vérité, susceptibles de mettre à nu les règles désormais obsolètes de Bretton Woods. C’est par exemple, l’absence de candidat africain quand, il a s’agit de pourvoir à un poste vacant dans une institution de Bretton Woods : le cas de la succession de Christine Lagarde au F.M.I. par Kristalina Georgieva, en octobre 2019.
Par ailleurs, l’Afrique c’est aussi la manifestation d’une conscience non en éveil des Responsables des Institutions panafricaines portés plus à l’action politique, quelquefois polémique, plutôt qu’à agir dans la discrétion, en Conseillers rompus à la persuasion et avec une foi inébranlable afin d’obtenir des Dirigeants politiques africains, une volonté ferme, de participer effectivement à la prise de décisions mondiales, celle qui n’est possible que si le continent africain dispose des instruments de négociation : Une monnaie de souveraineté, une économie attractive et participative pour des populations certes différentes mais ayant en commun le sentiment de bienveillance. Car, dans un tel modèle naturel de société, c’est la prédominance de l’amour parfait (Sainte Bible : Jean 13,34), oblatif, qui ne fait aucun mal au prochain.
C’est imiter l’être suprême, notre Créateur qui nous exhorte à naitre de nouveau, avoir une vie nouvelle dans cette acception : «Il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir »(Sainte Bible, Actes des Apôtres 20,35). Dieu, notre Créateur, a besoin de toutes ses créatures pour faire croître son royaume, pour ceux qui croient à la vie éternelle et, qui se préoccupent de la vie spirituelle de leur âme (Sainte Bible : Mathieu 16,26) ; alors s’interrogent-ils régulièrement : dans quelle mesure ce que je fais, dans mon quotidien, est-il un gain ou une perte de mon âme ?
La question ne se pose pas en terme de religion. C’est plutôt rejeter la vulgarité ambiante de notre temps : la liberté totale par laquelle l’homme peut se choisir une finalité, construire une personnalité propre dans une application intempérante de l’égalité. Cette fermeture sur soi nuit aux relations sociales, au vivre ensemble, et même à la démocratie, parce que c’est l’absence d’idéal moral, l’éducation de soi, dans un monde qui se proclame pourtant village planétaire, dans son triste aspect inhumain, désormais visible.
Docteur François Kouadio
Ancien Fonctionnaire International
Cotonou, Décembre 2019