En 2023, les pays en développement ont franchi un seuil historique en déboursant un montant record de 1 400 milliards de dollars pour le service de leur dette extérieure. La situation soulève de sérieuses préoccupations sur la viabilité économique de ces nations.
Aké MIDA
Les pays en développement ont déboursé un montant record de 1 400 milliards de dollars en 2023 pour le service de leur dette extérieure, selon le dernier rapport de la Banque mondiale sur la dette internationale. La charge des intérêts a atteint 406 milliards de dollars, un niveau inédit depuis vingt ans, marquant une hausse de près de 30 %, selon le document.
Ce fardeau a particulièrement affecté les pays les plus vulnérables, en particulier ceux éligibles aux prêts de l’Association internationale de développement (Ida). La charge des intérêts y a fortement augmenté, impactant sévèrement les finances publiques et limitant les investissements dans des secteurs cruciaux tels que la santé, l’éducation et l’environnement.
Ces pays ont payé 96,2 milliards de dollars pour leur dette l’année dernière, un chiffre record. Bien que les remboursements du principal aient diminué de 8 %, les paiements d’intérêts ont atteint des proportions alarmantes, représentant aujourd’hui près de 6 % des recettes d’exportation, un seuil jamais observé depuis 1999. Dans certains pays, cette proportion grimpe jusqu’à 38 %.
Ce phénomène a exacerbé les difficultés budgétaires, restreignant la capacité d’investir dans des secteurs vitaux pour le développement durable. La réduction des prêts par les créanciers privés, qui jouent un rôle majeur dans l’endettement des pays en développement, a accentué cette pression financière.
Les institutions multilatérales, comme la Banque mondiale, ont dû intervenir davantage pour soutenir les économies les plus vulnérables. Entre 2022 et 2023, ces institutions ont injecté près de 51 milliards de dollars dans ces pays, bien plus que ce qu’elles ont perçu en remboursements de dettes.
Améliorer la transparence
Indermit Gill, économiste en chef de la Banque mondiale, cité dans un communiqué de presse, souligne : « Les institutions multilatérales sont devenues la dernière planche de salut pour ces économies, jouant un rôle pour lequel elles n’ont pas été conçues, mais qui reflète un système de financement défaillant ».
La situation a été aggravée par la pandémie de Covid-19 et la hausse des taux d’intérêt mondiaux, rendant les emprunts encore plus coûteux. En 2023, les taux d’intérêt pour les créanciers publics ont doublé, dépassant les 4 %, tandis que ceux des créanciers privés ont atteint un niveau record de 6 %. Bien que les taux mondiaux commencent à baisser, ils resteront bien au-dessus des niveaux observés avant la pandémie.
Cette dynamique de la dette internationale met en lumière les défis croissants auxquels les pays en développement sont confrontés, devant jongler entre le remboursement de leurs dettes et le financement de leurs priorités nationales.
Le rapport de la Banque mondiale souligne aussi l’effort pour améliorer la transparence des données sur la dette, un élément essentiel pour attirer de nouveaux investissements et prévenir les crises futures. « Des données exhaustives sur les engagements des gouvernements peuvent favoriser de nouveaux investissements, réduire la corruption et prévenir de coûteuses crises de la dette, estime Haishan Fu, statisticien en chef de la Banque mondiale et directeur du Groupe de gestion des données sur le développement de l’institution.
Les perspectives restent incertaines pour ces nations. Sans un réajustement du système financier global, leur vulnérabilité pourrait perdurer, entravant leur développement à long terme.