Le déploiement de l’outil Tadat en Afrique de l’Ouest marque une avancée significative vers des administrations fiscales plus performantes et transparentes. Une approche coordonnée des réformes est essentielle pour optimiser la gouvernance fiscale et améliorer la mobilisation des recettes.
Aké MIDA
L’Afrique de l’Ouest renforce son engagement en faveur de l’amélioration des administrations fiscales à travers l’adoption du Tax Administration Diagnostic Assessment Tool (Tadat). Depuis son lancement en 2015, cet outil mondialement reconnu a permis d’évaluer 135 administrations fiscales nationales et 45 entités subnationales. « En un peu plus de dix ans, Tadat est devenu l’outil de référence, internationalement reconnu, pour identifier les priorités de réformes et orienter les stratégies de modernisation des administrations fiscales », assure Modeste Somé, représentant résident du Fonds monétaire international (Fmi) au Bénin.
A travers le Centre régional d’assistance technique (Afritac) pour l’Afrique de l’Ouest, le Fmi met son expertise au service des pays de la sous-région pour appuyer leurs programmes de modernisation. Neuf des dix pays membres de l’Afritac Ouest ont déjà utilisé Tadat pour évaluer les performances de leurs administrations fiscales, dont quatre ont répété l’exercice afin de mesurer les progrès accomplis. Le Bénin, engagé dans ce processus depuis 2019, a réalisé une deuxième évaluation en 2023, après une auto-évaluation en 2022. En dehors du Bénin, trois autres pays de la sous-région ont entrepris une deuxième évaluation, leur permettant d’ajuster leurs stratégies fiscales en fonction des résultats obtenus.
Un instrument structurant
Tadat s’impose comme « un instrument de référence pour évaluer la performance des administrations fiscales et identifier les axes d’amélioration », souligne Nicolas Yènoussi, directeur général des impôts du Bénin. Sa méthodologie rigoureuse et standardisée permet de diagnostiquer avec précision les forces et faiblesses des systèmes fiscaux.
L’outil repose sur neuf domaines d’analyse clés, couvrant notamment la gestion des contribuables, la promotion du civisme fiscal, la gestion des dettes fiscales et la transparence. Il s’appuie sur 32 indicateurs et 55 dimensions de mesure, notés sur une échelle de quatre niveaux (A à D), offrant ainsi un diagnostic précis des performances fiscales.
Toutefois, Tadat présente certaines limites. Il ne prend pas en compte le cadre juridique et institutionnel, la gestion des ressources humaines et matérielles, la promotion de l’intégrité ou encore la lutte contre la corruption.
Des perspectives prometteuses
Si Tadat encourage les réformes fiscales, il ne fournit ni recommandations ni feuille de route. La responsabilité d’exploiter les résultats des évaluations pour corriger les faiblesses et renforcer les progrès revient aux pays eux-mêmes. Ceux qui ont su tirer parti de ces évaluations pour définir des plans d’action adaptés ont réalisé des avancées notables. Cependant, l’absence d’un cadre régional harmonisé limite l’efficacité des réformes.
« Nos administrations fiscales gagneraient à mutualiser leurs efforts et partager leurs expériences réussies afin de développer des plans d’actions post-Tadat plus robustes, assortis d’indicateurs Smart pour un suivi efficace », a déclaré Nicolas Yènoussi, lors d’un atelier de haut niveau organisé du 4 au 7 février 2025 à Cotonou. Cet événement, initié par Afritac Ouest et le Fmi, a réuni les directeurs généraux des impôts et les responsables des réformes fiscales des pays participants. L’objectif était d’harmoniser les pratiques fiscales et d’élaborer des plans d’action post-Tadat plus efficaces.
Les experts ont insisté sur la nécessité d’institutionnaliser l’évaluation périodique des administrations fiscales et de développer une matrice stratégique de réforme fiscale harmonisée. Une feuille de route régionale Tadat est mise en place et augure du développement d’un outil de gestion des plans post-évaluation, avec des indicateurs de convergence fiscale pour assurer un suivi optimal des réformes.
Par ailleurs, le TADAT évalue la performance du système d’administration fiscale d’un pays en examinant ses composantes clés. Le cadre comprend neuf domaines de résultats, appelés domaines de résultats de performance (DRP).
Encadré
Les neuf domaines de résultats de performance du TADAT
1-Intégrité de la base de données des contribuables enregistrés : L’enregistrement des contribuables et la tenue à jour d’une base de données complète et exacte des contribuables sont fondamentaux pour une administration fiscale efficace.
2-Gestion efficace des risques : les performances s’améliorent lorsque les risques pesant sur les opérations de l’administration fiscale et des recettes sont identifiés et gérés systématiquement.
3-Soutenir la conformité volontaire : En règle générale, la plupart des contribuables s’acquitteront de leurs obligations fiscales s’ils reçoivent les informations et le soutien nécessaires pour leur permettre de s’y conformer volontairement.
4-Dépôt des déclarations fiscales dans les délais : Le dépôt dans les délais est essentiel car le dépôt d’une déclaration fiscale est l’un des principaux moyens par lesquels l’obligation fiscale d’un contribuable est établie et devient due et payable.
5-Paiement ponctuel des impôts : Le non-paiement ou le paiement tardif des impôts peut avoir un effet néfaste sur les budgets publics et la gestion de trésorerie. Le recouvrement des arriérés d’impôts est coûteux et prend du temps.
6-Déclarations exactes : les systèmes fiscaux dépendent largement de la déclaration complète et exacte des informations dans les déclarations fiscales. Les activités d’audit et autres vérifications, ainsi que les initiatives proactives d’assistance aux contribuables, favorisent la déclaration exacte et atténuent la fraude fiscale.
7-Résolution efficace des litiges fiscaux : Des mécanismes d’examen indépendants, accessibles et efficaces garantissent le droit d’un contribuable à contester une cotisation fiscale et à obtenir une audience équitable en temps opportun.
8-Gestion efficace des recettes : les recettes fiscales doivent être entièrement comptabilisées, comparées aux prévisions budgétaires et analysées pour éclairer les prévisions de recettes du gouvernement. Les remboursements d’impôts légitimes aux particuliers et aux entreprises doivent être versés rapidement.
9-Responsabilité et transparence : En tant qu’institutions publiques, les administrations fiscales sont responsables de la manière dont elles utilisent les ressources publiques et exercent leur autorité. La confiance de la communauté est renforcée lorsque les actions administratives sont clairement redevables au ministre, au pouvoir législatif et à la communauté en général.