L’adoption par la République Centrafricaine (RCA) du Bitcoin comme monnaie officielle aux côtés du franc CFA a généré un débat houleux à travers le monde. Bon nombre d’observateurs considèrent le geste de Bangui comme un défi à la France et au Fonds monétaire international (FMI).
Issa SIKITI DA SILVA
Dans un continent où les sentiments anti-français continuent de prendre une allure inquiétante, la décision d’adopter le Bitcoin dans ce pays membre de la Communauté économique et monétaire des Etats de l’Afrique Centrale (CEMAC) semble être interprétée comme une gifle sur le visage de la France, le « père spirituel » du franc CFA, une monnaie de plus en plus contestée en Afrique.
« Bien que ce soit une décision qui, à mon avis est populiste, la majorité des centrafricains l’ont quand même saluée parce que pour eux cela montre que leur gouvernement en a ras-le-bol de l’attitude néocolonialiste des Européens et des institutions de Bretton Woods et qu’il est capable de tenir tête devant qui que ce soit », s’est confié un confrère centrafricain à l’Economiste.
Le président centrafricain Faustin-Archange Touadéra a indiqué sur son compte Twitter que la promulgation de cette loi serait une opportunité pour le développement économique et technologique de la RCA.
Selon cette loi, tout agent économique est tenu d’accepter les crypto monnaies comme forme de paiement lorsqu’elles sont proposées et de disposer d’une convertibilité automatique et instantanée des crypto monnaies utilisées en République centrafricaine.
« Le comble de malheur est que la décision a été prise sans consulter les autorités monétaires de la région, et je crains pour l’économie et l’avenir du pays. Qui sait, on pourrait même nous expulser de la CEMAC. C’est un affront à Yaoundé », a ajouté la source.
La nouvelle a fait l’effet d’une bombe nucléaire dans la capitale camerounaise, où se trouve le quartier général de la Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC).
Le gouverneur de la BEAC, Abbas Mahamat Tolli, a adressé une note virulente de rappel à l’ordre au gouvernement de la RCA, dans laquelle il a cité la convention régissant l’Union Monétaire de l’Afrique Centrale (UMAC) qui dispose en son article 6, que « l’unité monétaire légale des Etats membres de l’Union est le Franc CFA ». Le FMI a aussi exprimé son inquiétude face à cette décision. Selon la DG du FMI, Kristalina Georgieva, l’utilisation d’actifs cryptographiques volatils comme monnaie n’est pas recommandée.
Télécommandés ?
« Oubliez ces gens-là, les CEMAC, FMI, BEAC et je ne sais quoi, ce sont des groupes télécommandés par l’Occident. Regardez un peu nos vies, c’est toujours la misère à cause de ce fameux CFA. Je félicite la RCA d’avoir défié Paris. C’est le moment de faire bloc contre la France et son CFA, et même le FMI, afin de trouver d’autres alternatives, sinon ça ne va pas », dixit Alfred Mavoungou, un congolais de Brazzaville.
Qui va emboîter le pas à la RCA ? Affaire à suivre.